La nouvelle version de Frostfall est arrivée ! Rendez-vous dans ce sujet pour en savoir plus.
Avis aux nobles, n'oubliez pas de recenser votre maison ici, si ce n'est déjà fait.
N'oubliez pas de voter pour Frostfall sur les top-sites une fois toutes les deux heures ! Plus on a de votes, plus on a de membres.
Le Deal du moment : -29%
PC portable Gamer ERAZER DEPUTY P60 – ...
Voir le deal
999.99 €

Partagez
 

  A flame of oath ♤ Ehvan

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
AuteurMessage
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyJeu 24 Avr - 22:27



Flashback - An 928




I
benholt n'avait jamais été aussi resplendissante, lui semblait-il. La saison estivale apportait sa doucereuse kyrielle de fragrances florales, et avec elles, les nippes des bonnes gens chatoyaient de teintes plus criardes, cherchant inconsciemment à singer la jovialité colorée d'un été exceptionnellement chaud malgré qu'ils aient été dans les landes septentrionales. Jora n'osait songer aux folles températures qui devaient oeuvrer dans les contrées australes si, ici déjà, l'astre diurne suait d'une chaleur inusuelle mais pas moins appréciable. Peut-être était-ce le Feu du Midi qui brûlait en son sein, mais par toutes les déités, les ferventes caresses du soleil sur son derme lui étaient infiniment plus préférables que l'étreinte de l'aquilon ou l'effleurement d'une quelconque poussière nivale. Car avec la chaleur des cieux, la population devenait sémillante, et les austérités s'épuraient de leur rigorisme intrinsèque – du moins, en apparence. Celle du lord Ebonhand se lénifiait lorsqu'il était question des lubies frivoles de son unique descendante, à laquelle il avait octroyé son chapelet de libertés suite à un funeste événement dont ils avaient depuis tu l'existence, comme si la putrescente disparition de l'une de ses gouvernantes n'avait jamais été qu'un mauvais songe. Pas même encline à se dire qu'il s'agissait d'un ineffable mal pour un bien salvateur, la donzelle feignait d'avoir tout bonnement occulté le drame, et profitait non sans félicité d'une latitude chèrement acquise. Depuis approximativement deux années pleines, elle avait l'agrément paternel quant à des flâneries hors de cette cage dorée qui l'avait préservée, mais aussi esseulée du monde. Des permissions obtenues au compte-goutte, car Hulgard n'était pas quidam à lâcher les brides sans conditions ni précautions. Force avait toutefois été de constater que son enfant s'était inexorablement épanouie depuis qu'il l'avait introduite à la cour du souverain Kalanar, l'âcreté d'une captivité même affectueuse d'un pater inquiet tout de go chassée par la perspective de rencontrer d'autres personnalités, de découvrir tous les points cardinaux de Jernvugge et de s'ouvrir à une société dont elle ne connaissait que des aspérités superficielles. C'était cette éloquente allégresse qui avait achevé de convaincre le sieur spartiate de ne plus la posséder avec une jalousie parentale, comme l'on chérissait un joyau d'exception que l'on se hâtait de replacer dans son écrin cuirassé avant que quiconque ait eu le loisir de poser ses calots sur sa vénusté diaphane. Les exceptions qui avait constellé l'enfance de la sylphide n'avaient fait qu'entériner la règle, une époque pas si lointaine qu'elle se remémorait avec aversion.

Et puisque toutes les opportunités étaient devenues bonnes à saisir, elle avait profité que les coercitions diplomatiques aient mandé son géniteur au palais pour l'accompagner, malgré tout talonnée par une cohorte de gouvernantes et dames de compagnie qui avaient pour marotte de la suivre lors de ses déplacements. La demeure patriarcale ne se situant qu'à une poignée de minutes de la merveille architecturale – dont la forme lui faisait furieusement penser à celle d'un pourceau ferré – qui abritait le Trône de Jais, ils furent promptement sur place, le seigneur non peu fier de musarder en présence de son héritier dont on louait la chaste vénusté. Ce dernier la quitta lorsqu'ils arrivèrent à l'orée de la Salle Ovale où les hérauts du Grand Conseil avait coutume de se réunir, la serinant des sempiternelles instructions qu'il avait également pris le soin de ressasser à son escorte. Quel péril aurait donc bien pu la mettre en péril en plein poumon du logis royal ? Point un, ce fut donc sereine et guillerette qu'elle se mêla à la foule de dignitaires qui jalonnait le dédale du bastion, s'arrêtant auprès des faciès amicaux pour ergoter sur des sujets et puis d'autres. Puis, ce fut alors qu'elle jabotait paisiblement que, parmi tous, elle reconnut un phonème guttural et avec lui, le furtif éclat d'une armure notoire. Le crin flavescent disparut à l'angle d'un corridor, une cataracte d'or qu'elle ne connaissait que trop bien et pour laquelle elle abandonna ses palabres, glissant une discrète prose à l'un de ses chaperons qui n'eut de toute façon pas le temps de la retenir. Elle s'élança dans la direction naguère mirée, les pans de sa robe lactescente ocellée d'une couleur lie de vin sensiblement relevés pour ne pas qu'elle s'y enchevêtre les pieds, car il aurait été dérisoirement malencontreux de choir devant un parterre de pontifes.

Elle rattrapa et suivit sa cible avec une discrétion toute relative, mais suffisante pour ne point se faire repérer par l'intéressé qui, inconscient de la menace composite qui l'épiait, poursuivait tranquillement son chemin. Ehvan était l'immuable bouc émissaire d'une espièglerie qu'elle n'exprimait qu'auprès de rares personnes, et il y avait une raison à cela : outre la piété quintessencielle de leur relation, lui qui arpentait sans cesse ce réseau de salles et de couloirs ne savait jamais quand ni comment il croiserait le sentier de sa tendre amie. Et c'était parce qu'il ne s'y attendait pas plus souvent que la jouvencelle avait pris l'habitude de le surprendre à chacune de ses arrivées, rivalisant d'ingéniosité pour qu'il en soit toujours pantois. Aujourd'hui ? Son imagination pourtant féconde ne parvenait pas à enfanter la moindre idée opportune, aussi, avant qu'il ne rejoigne ses subalternes, les abords du monarque, un office dont l'accès lui serait interdit ou que savait-elle encore, elle décida d'improviser. Alors que le jeune lion progressait dans un corridor désert, il put ouïr l'impact d'un objet chutant au sol. Lorsqu'il fit volte-face, ses prunelles océaniques furent attirées par de vifs reflets qui semblaient presque le héler. A proximité, dissimulée au revers d'un monolithe sculpté, la nymphe guettait, patiente, jusqu'à ce que le quidam ne revienne sur ses pas et ne s'accroupisse pour récupérer ce qui s'avérait être une armille d'argent sertie de gemmes améthystes. L'instant était propice à l'offensive, et l'Ebonhand sortit de sa cache à foulées feutrées pour se glisser dans l'échine de l'apollon, à laquelle elle s'ajusta pour mieux apposer ses mains sur ses yeux et s'incliner à son oreille. Oreille, dans laquelle elle ne susurra pas – non, bien plus importunant, elle y souffla dans l'unique dessein de le taquiner. Un plan qui, elle se plut à le croire, porta ses fruits... sans la préparer à la réplique qu'elle ne soupçonna pas une seconde. Tout à coup, elle sentit ses petons quitter la stabilité du par terre et ses gambettes fuselées flotter dans les airs.

« Ehvan ! » Celui-ci n'avait eu qu'à se redresser de toute sa hauteur, emportant avec lui la demoiselle légère comme l'éther qui avait eu l'idée biscornue de s'avachir sur lui, et qui se retrouvait à présent agrichée à ses épaules, bien loin du sol. « Repose-moi ! » Jora, qui se sentait glisser sur l'habit d'acier du capitaine, n'eut d'autre choix que de ceindre la taille du jeune homme de ses jambes pour se hisser un peu mieux sur cette truculente monture. Une scène qui aurait assurément heurté le puritanisme des courtisans s'ils avaient eu des spectateurs. « C'est trop haut pour moi, espèce de géant nigaud ! Et si quelqu'un nous surprenait ! » Des propos auxquels la colombe elle-même ne croyait pas, hilare depuis le sommet de son juchoir qu'elle aimait pour sa simplicité probe, qui oeuvrait bien malgré la distinction de leurs patronymes et leur décennie de différence. Son rire cristallin se répercuta en écho dans l'endroit, jusqu'à ce que des pas qui n'étaient pas les leurs en fassent de même, alertant aussitôt la cavalière improvisée qui se mit à gesticuler. « Des gens viennent ! Vite, fais-moi descendre ! Fais-moi descendre ! » Et avec prestesse, elle se retrouva de nouveau sur le plat de ses chausses, eut tout juste le loisir d'arranger son vêtement et de recouvrir un semblant de contenance avant qu'un couple n'apparaisse. Feignant de contempler une ronde-bosse non loin d'ici, le premier binôme laissa passer le second, le sieur et son épouse les dévisageant légèrement avec une mine improbatrice avant de s'éloigner. Une fois qu'ils furent à l'antipode de là, la vénus à la chevelure argentine guigna son comparse et ne put contenir un nouveau rire. « Mes aïeux, je gage que cette lady se serait pâmée sous le choc de me voir chevaucher le capitaine de la Garde Royale au beau milieu d'un corridor. La situation aurait été d'un ubuesque à s'en damner, mais je ne suis pas certaine que mon père aurait apprécié ! » Ni lui, ni quiconque par ailleurs. « Et l'on aurait cancané que c'est de ta faute, que tu me dévergondes. Ce qui n'est pas faux. » Elle lui offrit sa plus belle risette, les mains scellées dans son rachis et le minois penchée sur son côté dextre, arborant la mine la plus fallacieusement innocente de tout Middholt.

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyMar 29 Avr - 23:13


A FLAME OF OATH
Présentement, le jeune capitaine de la Garde Royale aurait donné absolument tout ce qu'il possédait pour devenir sourd. Depuis qu'une Lady dont il avait déjà oublié le nom l'avait abordé – pour ne pas dire harponné – au beau milieu du corridor pour bavarder avec lui de la merveilleuse saison estivale, il n'avait eu qu'une envie, perdre l'ouïe. Si le jeune homme était parfois plus naïf qu'un agneau, il n'était pas idiot pour autant. Il se doutait bien que la demoiselle qui manquait de défaillir à chaque fois qu'il ouvrait la bouche ne s'était pas jetée sur lui parce qu'elle avait eu un soudain besoin de palabrer avec quelqu'un au sujet des chaleurs de l'été. Aussi agacé que gêné, Ehvan ne l'écoutait que d'une oreille distraite et l'esprit ailleurs, et se contentait de lui répondre par mono-syllabes. Par tous les dieux, ce qu'elle était bavarde... Ou simplement fort nerveuse ? Personne n'aurait pu l'en blâmer. L'adonis, qu'elle avait abordé dans un élan de bravoure vite regretté, impressionnait non seulement de par sa carrure imposante, mais aussi de par la force tranquille qu'il dégageait, à l'instar d'un lion placide mais non pas moins capable de rugir et de sortir les griffes s'il le fallait. Ajoutez à cela un visage plus qu'harmonieux taillé dans le plus noble des granits et deux grands yeux azurés, et vous obteniez un jeune homme plus qu'attirant pour ces dames. Heureusement, ou hélas – tout dépendait des points de vue, il n'en avait jamais abusé, bien trop souvent pétri de bonnes intentions et drapé dans un honneur encore immaculé. Si le patriarche des Clanfell était encore en vie, sans doute aurait-il roulé des yeux à chaque fois qu'il les aurait posés sur son fils, qui s'avérait être un naïf doublé d'un grand romantique. Le jeune lion l'ignorait encore, trop occupé à chercher un prétexte qui lui permettrait de s'excuser poliment, mais ce tempérament lui attirerait de nombreux ennuis par la suite, des ennuis qui n'auraient pas pris corps dans les pires de ses cauchemars. Car il lui semblait que son existence était aussi pénible qu'il était possible de l'être. Naïf, vous dis-je.

Ne sachant plus que faire sinon sourire comme un parfait imbécile, il finit par prétexter une obligation inhérente à son rang et non sans avoir soupiré puis affiché une mine contrite, la Lady le laissa prendre congé. Lorsqu'il en fut éloignée de quelques pas, il soupira longuement et passa une main dans sa crinière dorée, non content de pouvoir retourner vaquer à ses occupations. Si la compagnie des dames était bien loin de lui être désagréable, il aurait mille fois préféré qu'on le jette sans vergogne au milieu d'un champ de bataille plutôt que d'avoir a endurer une nouvelle conversation comme celle-ci. Trop occupé à essayer de chasser de ses pensées le bavardage inutile des dernières minutes, Ehvan ne remarqua pas que l'on s'était lancé à sa poursuite, une fois de plus. Avancé dans l'un de ces couloirs qu'il connaissait à présent par cœur, il se figea lorsqu'il ouït quelque chose qui heurtait le sol. Il leva les yeux au ciel, fronça les sourcils. « Allons bon, quoi encore... » Il grogna, agacé, et fit volte face. Son regard se posa sur un bijou qui n'avait rien à faire sur la dalle, et qui, il en était certain, ne s'était pas trouvé sur son chemin quelques instants plus tôt. Curieux de savoir comment elle s'était retrouvée là, le jeune lion s'en alla ramasser l'armille égarée... Et fut presque aussitôt surpris par une petite souris qu'il n'avait point entendue arriver. Un large et franc sourire étira ses lèvres alors que la demoiselle qu'il connaissait bien et affectionnait tout particulièrement se glissa dans son échine, glissant ses mains devant ses yeux dès qu'elle en eut l'occasion. Il aurait pu feindre d'être étonné de la trouver accroché à son cou, mais ce n'était point la première fois qu'elle le surprenait de la sorte. Plutôt que de tourner le visage pour lui souffler à la figure comme elle venait de le faire à son oreille, le jeune homme décida de se venger autrement.

La petite dame accrochée à son cou, il se redressa de toute sa hauteur, sachant parfaitement qu'elle n'aurait d'autre choix que de s'accrocher à lui d'une drôle de façon si elle ne voulait pas atterrir sur le séant. Ehvan se fendit d'un rire à la fois attendri et un brin moqueur, qui fit écho à celui de la jouvencelle. « Trop haut pour toi ? Depuis quand as-tu le vertige ? » Taquin, mais jamais méchant, il tenait beaucoup trop à elle pour risquer de la froisser. Elle ? La douce Jora Ebonhand, qu'il fréquentait plus ou moins régulièrement depuis toujours, mais n'avait appris à connaître que depuis une paire d'années. Il n'eut pas le temps de faire davantage d'humour, des pas firent écho dans le couloir, et si leur jeu était absolument innocent, mieux valait que personne ne surprenne l'héritière Ebonhand juchée sur le dos du plus jeune Clanfell. Il se rabaissa donc et la laissa glisser au sol avec douceur, et tandis qu'elle remettait ses jupes en place, il fit de même avec sa cape, avant de se perdre dans la contemplation de... Absolument rien ni personne, il se contenta d'orienter son regard dans la même direction que celle de Jora, et tâcha de ne pas avoir l'air d'un parfait imbécile en ce faisant. Il était capitaine, tout de même, il ne pouvait pas se permettre de passer pour un bouffon. Sans quoi, il ne doutait pas que Synric viendrait lui tirer les oreilles. Ou peut-être que non, il était si occupé depuis qu'il avait pris la suite de leur père, devant ainsi seigneur de Fortrekke.

Le couple auquel appartenait les pas disparu, le capitaine croisa les bras sur sa large poitrine, pas peu fier de sa farce, même si elle avait manqué de leur attirer quelques ennuis. « Quoi ? Serais-tu en train d'insinuer que je suis une mauvaise monture ? Je suis vexé ! » Il ne l'était pas, évidemment. « Mais tu as raison, ton père n'aurait sans doute pas apprécié d'entendre le récit de notre petite chevauchée inopinée... Je tiens à garder la tête accrochée aux épaules encore quelque temps, mieux vaut donc ne pas risquer de le froisser... Les dieux seuls savent ce que cette lady aurait pu lui conter ! » La cour avait cette mauvaise habitude de faire des montagnes de broutilles... Sa position faisait qu'il en savait davantage que bien des gens, et il le regrettait parfois. Souvent. Il n'avait nul besoin de savoir qui partageait la couche de qui, qui avait tel affront à monsieur ou madame... Il n'en avait cure, il souhaitait simplement accomplir sa besogne sans qu'on lui rabatte les oreilles de ragots. « Moi, je te dévergonde ? » Il se pencha, jusqu'à ce que sa figure soit à la hauteur de celle de son amie. En somme, il était plié en deux. « De nous deux, lequel s'est lancé à la poursuite de l'autre dans le seul et unique but de le surprendre pour ensuite lui grimper dessus, hm ? » Il fit mine de réfléchir une seconde, puis posa un index sur le nez de la demoiselle. « Oh, cela me revient. C'était toi ! »  Il ne savait jamais quand il la verrait, et cela Jora l'avait bien compris, ainsi il semblait qu'elle s'était fait un devoir de le surprendre à chaque fois. Ce qui ne lui déplaisait pas, sa simple présence à ses côtés suffisait à égayer sa journée.

Le jeune homme se risqua à égarer une caresse sur la joue veloutée de la jeune fille avant de se redresser, pour ensuite lui offrir son bras comme un parfait gentilhomme. « Mais dis-moi... Je ne vois pas tes gouvernantes et autres dames de compagnie... Où les as-tu perdues ? Loin de moi l'idée de me plaindre de leur absence, dieux ce qu'elles peuvent piailler, mais ne crains-tu pas qu'elles ne s'empressent d'aller trouver ton paternel pour lui dire que tu t'es sauvée ? » Il n'en faudrait pas plus pour que l'Ebondand fasse retourner le palais pour que l'on retrouve son enfant. Le jeune homme fit la moue. Il hésitait. Devait-il ramener Jora auprès des dames qui l'escortaient et la surveillaient, ou devait-il lui offrir un moment de paix en sa compagnie, loin de tous les tracas de la cour et de l'oppression paternelle ? Soit il remplissait parfaitement son rôle de représentant de la Garde Royale, soit il l'abandonnait pour enfiler l'habit de l'ami. Finalement, il décida que ce n'était pas à lui de le décider. « Dois-je me conduire en héros et t'escorter jusqu'à ta, hm, garde personnelle, ou jouer les brigands et te kidnapper le temps d'une poignée d'instants ? »


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyJeu 1 Mai - 13:32




L
'obédience filiale qui coulait dans les marbrures de la jouvencelle ne signifiait pas qu'elle était totalement insipide – pour peu qu'elle parvienne à se sentir suffisamment confortable, et alors, une fois lancée de la cavalcade de la conversation ou du délassement, il devenait délicat d'endiguer sa jovialité pulsionnelle. Irradiante de bonhomie en société, là où Hulgard rayonnait plus d'une superbe sévère, elle savait mettre les convenances pudibondes de côté en quelques occasions, comme celle-ci où s'acoquiner avec nul autre que le capitaine de la Garde Royale aurait assurément fait esclandre. Mutine mais inoffensive, elle était à l'image d'une colombe qui flânait candidement dans une cage qui, à défaut d'avoir entièrement disparu, s'était amplement agrandie. Un simulacre de liberté qui lui seyait pour l'heure, tant que cela lui permettait d'entretenir et de chérir des relations comme celle dont elle jouissait avec le bel apollon. Ce dernier ne la considérait point uniquement comme « l'héritière Ebonhand », ni comme une lady triviale et vénale comme la cour de Sa Majesté en recelait. Pour lui, elle était Jora. Unique, une âme propre à laquelle il reconnaissait ses bons comme ses mauvais acabits, lui qui savait si bien comment ne pas l'épargner des vérités tout en la préservant avec une irréfragable maestria. . Il était le grand frère qu'elle n'avait jamais eu, et les dieux savaient qu'elle était béate devant l'intégrité qui caractisait le plus jeune lion. Confiance et admiration, tels étaient les ingrédients de la félicité amicale, par laquelle elle pouvait être elle-même plus que la muse mutique et bienséante du quotidien. L'influençait-il ? A n'en point douter, dans la meilleure des voies plausibles. Et ce fut fallacieusement téméraire à outrance qu'elle combattit les gemmes azurines qui s'inclinèrent sur elle comme si ce fut la voûte céleste qui se penchait sur son minois. Mains sur des hanches qui avaient gagné en cambrure, elle leva le museau avec une moue coquette, sans peur aucune face au titan dont la coquille ressemblait plus à celle d'une nue duveteuse plutôt qu'à une cuirasse de ferraille. Elle le connaissait l'auguste félin, qui avait plus marotte à pouponner la biche qu'à la dévorer.

Elle le laissa déplier les pans de sa réflexion feinte, ses lippes charnues s'évasant en un large sourire, avant qu'elle ne louche puis papillonne des cils lorsqu'il effleura le bout de son nez. « Calomnies bon sieur, j'ignore de quoi vous voulez parler ! » La jouvencelle se drapa dans une morgue surjouée, le port altier et les mirettes aiguillées vers le corridor comme si elle se désintéressait de son interlocuteur. « Une dame digne de ce nom ne grimpe pas... et je te signale que j'avais seulement l'intention de te surprendre, je n'aurais pas été obligée de m'accrocher à toi comme un naufragé à son étoc si tu ne t'étais pas brusquement redressé. » Quelle idée de façonner des quidams aussi monstrueusement grands ? Les arcs de muscles que l'on devinait plus que aisément sous l'armure estampillée du lion des neiges n'épuraient en rien ce favoritisme de la nature, mais où la chance offrait ses bonnes grâces, le sort ne tardait jamais à rééquilibrer la balance, et cela se vérifiait avec la quasi totalité de la vie du jeune homme. Mais loin des tribulations, la belle recouvrit une contenance plus usuelle lorsqu'il souleva le sujet de son arroi féminin, et elle ne put s'empêcher de mirer à l'antipode du couloir comme s'il lui était possible d'y voir la cohorte de gouvernantes et ladies. « Je les ai abandonnées dans le hall en me lançant après toi, je leur ai dit que je revenais tout de go, je gage qu'elles ne s'ombrageront pas si ce n'est pas le cas. Et je doute qu'elles aillent en référer à mon père, tu sais comment il est, enfin... ce sont elles qui risqueraient de se faire tancer les premières pour m'avoir quittée des yeux. Et puis, si je ne suis pas en sécurité à Jernvugge, où d'autre le serais-je ? Surtout lorsque c'est toi qui es avec moi. » Après tout, Ehvan n'était pas n'importe qui, son statut encore plus que son patronyme en faisant une figure notoire et importante, et le lord Ebonhand lui avait plus d'une fois confié la veillance de sa fille. De plus et en tant que Main du Roi, ce dernier devait être présentement occupé à des coercitions fondamentales, de celles que l'on n'interrompait pas en pure perte.

D'une doucereuse poigne, elle prit enfin le bras suggéré pour s'y pendre non sans joie, entamant instinctivement les pas lents d'une marche sans but. Elle échappa un ricanement diaphane à l'expectative de l'adonis, qui se trouvait vraisemblablement entre l'arbre et l'écorce sans savoir comment s'en sortir. « Ehvan, me poses-tu la question ? As-tu peur que je boude ton rigorisme dans l'option numéro une et que je m'offusque de ta désinvolture dans la seconde ? Tu es censé être plus hardi, à ton âge. » Derechef, elle arbora une mine innocente suite au trait d'esprit taquin et ces dix années de différence qui creusaient malgré eux le fossé. Elle n'était qu'une enfant là où il était un adulte accompli, le monde, ils ne le contemplaient pas par les mêmes rétines, et c'était aussi ce qui constituait le charme de leur binôme. « Peut-être pourrais-tu commencer par me rendre mon armille ? » Qu'il tenait toujours dans sa large paume, soit dit en passant. Et plutôt que de simplement la récupérer, l'oiselle tendit son poignet et octroya au preux sigisbée le privilège d'en ceindre le bijou au chatoiement améthyste, comme un mari plaçant la sacro-sainte alliance au doigt de son épousée. Dès lors que ce fut chose faite, elle soupesa mentalement l'alternative tout en sachant que, nonobstant sa badinerie, l'affaire n'était pas si anodine. Il n'était pas question que ses suivantes se fassent du mauvais sang, mais comment daignerait-on lui en tenir rigueur si elle ne faisait que musarder au bras du benjamin Clanfell ? Avec lui comme escorte, nul ne viendrait lui nuire, c'était un fait. « Nous n'avons qu'à harmoniser le tout, dirigeons-nous lentement vers ma garde personnelle en nous autorisant un maigre détour pour pouvoir tout de même discuter, qu'en dis-tu ? »

Une fois qu'elle eut l'agrément du chevalier, ils partirent ensemble s'enfoncer dans les corridors du l'illustre palais, allongeant leur temps de trajet initial en flânant aux entours des Jardins de Glace qui, malgré la chaleur estivale, ne perdait absolument rien de son enchantement hiémal – un mystère que nul ne semblait en mesure de résoudre. Pourtant, ce n'était point à cette beauté architecturale de givre que l'Ebonhand prêtait attention, mais bien à un dialogue chamarré de sujets disparates qui avait le don de l'ébaudir plus qu'elle ne l'était déjà. « […] et Leonild s'est retrouvée sur le séant, les quatre fers en l'air avec un air abasourdi alors que la jument semblait railler de la pauvrette ! Jamais, plus jamais je ne l'emmènerai faire une promenade à cheval, même Irinwe n'a presque pas pu se retenir de rire ! » Et ce fut son rire à elle qui s'éleva tandis qu'elle se remémorait la scène. Leonild, l'une des plus anciennes domestiques de sa famille qui, en dépit des âges filant, n'avait rien perdu de son autorité orgueilleuse et biscornu qui en faisait un personnage excessif. « La dernière fois je l'ai aussi surprise à écouter aux portes. Quelle petite fouine ! Oh... en parlant de fouine. » Elle vrilla ses cervicales pour pouvoir apercevoir la physionomie de son interlocuteur. « J'ai suivi ton conseil et j'ai demandé à Père... tu sais, pour la genette. » La demoiselle était tombée férue de ce mammifère dont elle avait aperçu un individu au grand marché de la Cité, chez un célèbre marchand originaire des Iles Brûlées qui lui avait par ailleurs assuré et démontré que la somptueuse créature était tout à fait apprivoisable. Le Clanfell avait eu tout loisir de constater l'attrait de sa jeune amie pour le truculent animal tant elle avait pu lui en parler. « J'ai bien tenté de prendre mon minois le plus adorable en lui jurant que ce serait mon unique caprice... mais je n'ai glané qu'un refus catégorique. Il dit que la bête risque de s'en prendre à moi ou à nos serviteurs, que le Grand Nord n'est de toute façon pas un endroit adéquat pour l'espèce et que cette lubie me passera... » Elle soupira lourdement, désappointée, la mine basse. « Le marchand m'a pourtant garanti que les genettes s'adaptaient très bien à leur environnement, et que si elles étaient dressées petites, elles obéissaient aussi bien qu'un chien. Je sais que c'est tout sauf un animal répandu ici, et justement, je trouvais cela original, et... c'est tellement beau ! Oh Ehvan, lorsque tu auras un peu de temps et avec la bénédiction d'Hulgard, voudras-tu bien m'accompagner au marché ? Je t'en ai toujours parlé mais je ne t'ai jamais montré les genettes, et je sais que le détaillant s'en retourne bientôt vers d'autres horizons ! S'il te plait ? » Elle le regarda à nouveau, et une interrogation sans aucune liaison avec sa requête lui vint soudain. « Au fait, ce n'était pas lady Eileen avec toi tout à l'heure ? Te faisait-elle encore de l'oeil ? »

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyLun 5 Mai - 16:51

L'adorable poupée de porcelaine avait davantage de répondant qu'on ne l'aurait cru, et ce n'était pas pour déplaire à son immense compagnon. Il était fort dommage que Lord Hulgard la garde enfermée comme un rossignol en cage. Si la jeune Lady Ebonhand avait pu être à ses côtés plus souvent, le jeune lion aurait certainement su se départir de l'amertume qui semblait le poursuivre où qu'il aille. Hélas, il ne pouvait profiter de la demoiselle qu'une fois par ci, une fois par là, quand son lord de père voulait bien la laisser hors de la cage qui la retenait prisonnière. Il comprenait son désir de la protéger de tout et de tous, mais égoïstement il aurait préféré que ce ne soit pas le cas. Se rendait-elle seulement compte à quel point sa présence lui était bénéfique ? Certainement pas, et c'était cette innocence charmante qui faisait sourire le capitaine. Innocence dont il ne souhaitait pas la voir se départir de si tôt. Elle était encore si jeune, mais combien de temps les affres de l'existence l'épargneraient-elle encore ? Il redoutait le jour où Hulgard offrirait sa main à un quelconque lord et secrètement nourrissait le fol espoir d'en être lui-même... digne ? Il se dépêcha de repousser cette sotte pensée dans un recoin de son esprit, faute de quoi il risquerait de faire une drôle de grimace qui surprendrait sa jeune amie. Jeune amie qu'il s'étonnait d'ailleurs de trouver seule, elle qui d'ordinaire se déplaçait avec une cohorte de dames de compagnie et autres suivantes. Un tel convoi avait de quoi faire pâlir un homme d'effroi, et probablement de quoi le rendre sourd, car le pépiement de ces dames était assourdissant. À force il y était habitué, lui qui avait à de nombreuses reprises gardé un œil sur Jora lorsque le père de celle-ci le lui avait demandé. Si les recommandations du lord – répétées inlassablement à chaque fois – l'avaient agacé, que dire de celles des dames qui semblaient croire que parce qu'il était du sexe opposé, il ne serait pas capable de subvenir aux besoins de la demoiselle le temps d'une poignée d'heures ? Il n'y avait eu que son respect pour les ladys pour le faire acquiescer poliment, un sourire de circonstance accroché aux lèvres. Autant dire qu'Ehvan n'était pas mécontent de ne pas les trouver dans leurs pieds, bien qu'il y ait de quoi se demander où la jeune fille avait bien pu les semer, et si elles ne risquaient d'alerter le premier venu de la fuite de leur petite maîtresse. Il ne voulait pas la rendre aux bons soins de ces mères ours, simplement s'assurer qu'elle ne s'attirerait pas d'ennuis à cause de lui.

« Tu me flattes, Jora, mais la dernière chose dont j'aurais envie serait de déplaire à Lord Ebonhand en te soustrayant à tes gardiennes... » Il fronça les sourcils un instant, avant de retrouver son sourire. Il était vrai qu'il sentait fort flatté, pour ne pas dire fier, que la demoiselle se sente en sécurité en sa compagnie, mais sans doute ne se rendait-elle pas compte à quel point il pouvait paraître suspect qu'elle passe du temps seule en sa compagnie... Si le jeune lion faisait bien souvent preuve d'une candeur que certains auraient pris pour de la stupidité, il n'en restait pas moins lucides sur bien des choses. Une demoiselle seule avec un jeune homme avait de quoi éveiller les... soupçons. Et ce n'étaient pas les risettes béates qu'ils affichaient tous deux qui joueraient en leur faveur si d'aventure un quidam venait à poser un regard suspicieux sur leur binôme. Se méfiait-il bien trop pour cette fois ? Après tout, le paternel de la donzelle lui avait accordé sa confiance, ce qui était en soin un miracle. Et il portait l'uniforme de la Garde Royale, dont il était le commandant. En somme, Ehvan Clanfell suait la fiabilité par tous les pores de sa peau... Ce qui ne l'empêchait pas de se sentir comme un voleur sur le point d'être pris la main dans le panier alors qu'il promenait la demoiselle à son bras dans les couloirs du palais, sans avoir la moindre idée d'où ils s'en allaient. L'air faussement outré et vexé, il biaisa un regard en direction de Jora. « Mon âge ? Mais dites donc jeune fille, insinueriez-vous que je suis un vieillard ? » Bien malgré elle, elle venait de lui renvoyer leur dizaine années d'écart dans la face, ce qui arracha au jeune homme un sourire triste. L'air benêt, il contempla le bijou qu'il tenait toujours dans son poing, puis le ceignit avec précaution au délicat poignet de sa propriétaire, puis sa main retrouva le pommeau de son épée, sur lequel elle s'égarait bien souvent. Il songea à la proposition de son amie le temps de faire quelques pas, soupesant le pour et le contre. Finalement, il acquiesça en silence ; une promenade tout ce qu'il y avait d'innocent ne pourrait leur attirer d'ennuis. Tout du moins, il l'espérait.

Leurs pas les conduisirent jusqu'aux Jardins de Glace, auxquels Ehvan ne prêta pas la moindre attention, ses yeux déjà trop attirés par une autre beauté. S'il avait cru mourir d'ennui lorsque la lady qu'il avait fuie lui avait parlé du beau temps et de ses petits tracas de dame, il prêtait cette fois une oreille plus qu'attentive aux propos de la demoiselle accrochée à son bras. Il ne parlait que très peu, mais s'amusait de son ton de conteuse et de moquait gentiment des mésaventures de sa domestique, qu'il n'avait aucun mal à imaginer les quatre fers en l'air après sa chute de cheval. Il se pencha légèrement vers sa compagne dès lors qu'il remarqua qu'elle se tordait le cou pour le regarder, tandis que leur conversation dérivait une fois de plus vers la fameuse genette dont ne cessait de rêver Jora, et qu'il lui aurait offerte depuis belle lurette s'il n'avait craint de froisser le père de celle-ci, qui ne semblait pas résolu à l'autoriser à posséder une telle bête. Ehvan ne comprenait pas pourquoi, ce n'était après tout pas comme si elle réclamait un lionceau ; bien que d'une certaine façon, l'on pouvait dire qu'elle en avait déjà apprivoisé un. « Je suis navrée pour ta genette, mais je ne doute pas qu'un jour tu puisses te vanter d'en posséder une, dressée à merveille qui plus est. » Il mourrait d'envie de lui promettre de lui faire cadeau de l'animal un jour, mais les dieux seuls savaient combien d'années pourraient s'écouler avant qu'il ne puisse tenir sa promesse et ainsi accéder au désir de la belle. Il se fendit d'un rire sincèrement attendri lorsqu'elle le supplia presque de l'accompagner au marché, où elle pourrait admirer une dernière fois l'animal convoité avant que le marchand ne s'en retourne d'où il venait. « Bien, bien, ne t'agite pas ainsi, je t'accompagnerai où tu voudras. » Ils étaient alors tous deux bien loin de se douter que non content de l'accompagner là où elle le désirerait, Ehvan ferait simplement tout ce qu'elle désirerait, sous couvert de de beaux principes, mais en réalité presque uniquement mû par la force de sentiments qu'il n'était pas encore en mesure d'entrevoir. Amour et haine étaient les deux faces d'une même pièce, une pièce qu'il avait lancée et attendait avec appréhension de voir retomber.

Le brusque changement de conversation le prit de court ; il s'empourpra comme une jouvencelle énamourée et se détourna de la demoiselle le temps de se recomposer une expression qu'il espérait neutre. Autant le dire, ce n'était pas un franc succès. « Euh... Lady Eileen, oui peut-être... Je n'ai pas prêté beaucoup d'attention à la conversation, j'essayais de lui échapper... » confessa-t-il en passant une main dans sa crinière blonde, le regard perdu sur uns sculpture glacée. « Mais Lady Eileen n'est-elle pas promise à je ne sais quel Ser ? Non pas que cela ait une quelconque importance, Lady Eileen n'est pas... » Il chercha ses mots ; il avait l'impression de patauger dans la boue. « ...mon genre... » lâcha-t-il après une réflexion pas si mûre que cela. Son genre ? Il n'en savait fichtre rien, il ne s'était jamais posé la question et n'avait pas l'intention de se la poser, et surtout pas en présence de Jora. Notamment parce qu'un simple coup d’œil à la jeune fille à la chevelure d'opale aurait suffi à répondre à la question. D'un geste qui il l'espérait suffirait à détourner son amie de cette conversation embarrassante, il désigna un siège et l'invita à s'y asseoir, pour atermoyer leur retour dans la grande salle, où devaient encore attendre son escorte. Cependant... La demoiselle n'était pas encore assise qu'Ehvan aperçut un quidam qui l'observait non loin de là. Un nobliau qu'il ne connaissait pas et n'avait pas envie de connaître, la façon dont il regardait l'Ebonhand suffisait à lui donner envie de lui tordre le cou. Jaloux ? Il était tout à fait ignorant de ce terme ridicule. C'est dans le seul et unique but de protéger sa délicate compagne des vifs rayons de soleil qu'il resta debout, pour lui servir d'ombrelle sur pattes, et ce n'était qu'un malheureux hasard s'il se tenait également sur le chemin du regard de l'idiot. « Elle m'a toutefois fait remarquer à quel point la saison promettait d'être chaude... Personnellement, je ne peux qu'approuver, j'ai déjà l'impression de bouillir dans mon armure. Là, tout de suite, je t'envie... Tu n'échangerais pas tes robes contre mes plaques de métal, dis ? Je suis certain que tu ferais forte impression ! Et moi... Je ferais un bon bouffon du roi, qu'en penses-tu ? »


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyMar 6 Mai - 14:07




P
ourrait-elle un jour orner ses épaules du mammifère à la robe moucheté et se pavaner ainsi à travers la cour de Sa Majesté ? Les oeillades pantoises et jalouses convergeant vers son minois, et, enfin, elle aurait quelqu'un d'autre que ses gouvernantes pour lui tenir compagnie au domaine patriarcal. Plus elle y songeait, plus l'atome d'espoir qui demeurait croissait... et plus elle se remémorait la négation impérieuse du pater qui ne changerait pas d'opinion de si tôt. Si les minauderies de sa précieuse enfin avaient été vaines, rien ne seraient à même d'altérer cette opiniâtreté que d'aucuns disaient atavique, alors, si ce n'était Hulgard qui lui offrait sa genette... Qui serait-ce ? Son époux ? Les Dieux seuls savaient quand et à quel quidam d'exception sa main serait ployée, du peu qu'elle en savait à ce sujet, nul n'était encore suffisamment digne de l'unique héritière de la Main de Nacre pour obtenir le consentement paternel. Que le Clanfell soit sincère ou non dans sa projection d'espérance, elle le remerciait au moins de s'y intéresser, il était toujours agréable de se sentir considérée pour ses envies propres.  Lorsqu'il accepta sa requête, elle le gratifia d'un sourire tendre et reconnaissant, il y en avait décidément peu qui accéderaient à ses lubies sans craindre le courroux ou les sempiternelles consignes de la Main du Roi. Soudain, la virevolte discursive eut un effet pour le moins fortuit, qui évasa les lippes d'incarnat de la donzelle pour découvrir sa denture d'opale en une risette considérablement plus large que la précédente. Ehvan avait cette façon unique de choir en décontenance lorsqu'il était question des damoiselles – en particulier celles qui le couvaient d'un œil charmé, et elles n'étaient pas peu nombreuses. Chevalier et féal émérite, et voilà qu'il s'empêtrait dans l'embarras et se teinter de joliettes érythèmes comme l'aurait fait une jouvencelle. Une situation cocasse que Jora avait déjà eu l'opportunité de contempler, ce qui ne l'empêchait pas d'en être toujours autant amusée que la première fois où elle avait compris qu'il était de ces adorables timorés. Trop probe pour farder ses émotions – un comble pour un fils de Dagoth ! - le malaise fut palpable et la réponse bien que limpide dans les faits, trop ponctuée de suspensions et de réflexions empressées pour quérir des mots adéquats. Qu'il était mignon, le jeune lion.

Les frêles épaules de son interlocutrice se haussèrent brièvement lorsqu'il l'interrogea sur un hypothétique fiancé, puis elle le lorgna d'un air espiègle et inquisiteur. « Ah oui ? » Pas son genre ? Elle était fort curieuse qu'il lui narre quelque précision, elle qui ne l'avait jamais pris en flagrant délit de regard entiché pour une quelconque dame de Jernvugge, et alors, il était soit outrageusement pusillanime, soit assez retors pour ne pas ce faire devant sa jeune amie, question de déférence ou de pudibonderie. Elle s'apprêta à prendre la parole quand la main du Capitaine la convia à s'asseoir pour atermoyer leur retour dans le fameux hall, ce qu'elle fit sans l'ombre d'une incertitude, trop guillerette à l'idée d'écouler du temps seulement avec lui. Elle ne remarqua pas même l'individu à leurs abords que l'imposant galbe du fauve se hâta de toute façon d'occulter, en même temps que les faisceaux du soleil qui avaient déjà déposé un subtil voile hâlé sur la physionomie de la sylphide. Qui aurait donc pu se targuer avoir l'un des plus proches cerbères du roi en guise d'ombrelle ? Très peu de chançardes, et elle était loin de s'en lamenter. « Rase-toi la barbe, boucle-moi cette jolie crinière et je suis persuadée que tu deviendras la plus belle donzelle d'Ibenholt plus que le bouffon du souverain ! » Répliqua t-elle dans un rire spontané et cristallin, observant du même coup l'habit protecteur et probablement lourd sur lequel l'astre diurne jouait de nitescence. L'héraldique estampillé sur le plastron rappelait de quel degré de noblesse se couronnait le jeune homme, et aussi, que sa famille était et de loin l'une des plus puissantes de Middholt. Privilèges, et tout autant de coercitions. « Hey, marche à genoux et tu pourras te faire passer pour moi, tandis que de mon côté, si je monte sur des échasses et que je porte un heaume, je pourrai devenir Capitaine de la Garde Royale ! Echangeons nos places pour quelques jours et voyons laquelle de nos vies est la plus pénible, je suis prête à parier que tu ne tiendrais pas longtemps dans la mienne ! Allez, la seule chose que tu apprécierais peut-être, c'est de te faire pouponner et bercer par de charmantes nourrices à l'instar d'Irinwe. » Main posée en travers de ses lèvres, elle tenta d'étouffer son hilarité en imaginant sa folle élucubration s'illustrer pour de vrai, mais ce ne serait point demain la veille que quiconque les confondrait l'un avec l'autre. Et puisqu'il était encore question de nymphes, elle revint sur le cas de la précédente, qu'elle n'avait diantrement pas omise nonobstant la diversion du beau sieur.

« Je crois me souvenir qu'un ser est en pourparler avec le père de lady Eileen pour la main de sa fille, sans doute est-ce pour cela qu'elle multiplie les assauts sur toi, peut-être dans l'espoir que tu t'énamoures et que tu lui fasses ta demande avant que ses fiançailles ne soient définitivement scellées ? L'on ne peut pas dire que tu sois le pire parti du royaume. » Jambes croisées, elle se mit dans le fond de son siège pour ne pas avoir à trop harasser ses cervicales à force de lever le menton. « Viendra un jour où le fauve devra quitter son rocher et partir en chasse, trouver une lionne qui lui convienne et avec laquelle il pourra fonder une petite tribu. Non ? Ne penses-tu pas que c'est dans l'ordre des choses de s'unir et d'avoir des enfants ? Faire prospérer son patronyme, s'entourer d'une famille aimante, si les dieux le veulent. Il n'y a rien de plus poétique que l'amour de deux êtres qui crée une nouvelle âme, même si cela signifie prendre des risques pour... oh... » Penaude, l'Ebonhand se couvrit de honte. Des risques pour la faire naître, avait-elle été sur le point de dire, et elle savait qu'il savait. L'ironie voulait qu'ils soient tous deux venus au monde dans les mêmes circonstances, car, si en voyant le jour Ehvan avait arraché la vie de sa génitrice, il n'en avait pas été autrement pour Jora. Ce qui les différenciait alors n'était autre que les incriminations éhontées des Clanfell, là où Hulgard n'en avait jamais tenu rigueur à sa fille, qui avait ainsi pu s'épanouir avec des remords de moindre ardeur. « … pardon... » Les mirettes sur le sol, elle tritura nerveusement une mèche argentine, se molestant intérieurement pour cette bévue tout sauf opportune. Navrée, elle se pinça la lippe et ne sut plus que dire, saluant alors la providence qui fit apparaître un quidam en armure qui s'en vint saluer et solliciter son supérieur.

« Lady Ebonhand. » Il fit courbette devant cette dernière dans un élan respectueux. « Capitaine, j'aimerais vous dire un mot. C'est urgent... » Il fit silence un instant. « … et privé. Cela concerne le roi Kalanar... » Le devoir revenait au galop, même si, à en voir la contenance du factionnaire, l'affaire devait plus tenir de la formalité que de la véritable urgence – ce qui ne l'empêchait pas d'être prioritaire. Bienséante, la naïade n'intervint que lorsque les prunelles azurées de son ami se posèrent sur elle avec interrogation. « Va, je patienterai, je ne bouge pas d'ici jusqu'à ton retour. Promis. » Elle lui sourit dans le but de le mettre en confiance, et elle ne doutait pas que s'il devait vraiment s'en retourner vaquer à ses occupations, il viendrait l'en informer pour qu'elle puisse regagner le hall et poursuivre sa journée oisive. Finalement, les deux sigisbées s'éloignèrent ensemble, abandonnant la belle à une méditation qui serait promptement endiguée par la hardiesse d'un prédateur qui, non loin, guettait toujours.

Une dizaine de minutes eut loisir de s'écouler entre le départ impératif de l'apollon et les échos de ses foulées qui annonçaient son arrivée. Loyale à sa tirade, la muse ne s'était pas mue, non, c'était un loup aux calots affamés qui avait osé s'approcher. Debout non loin du siège sur lequel elle s'était antérieurement installée, Jora conversait avec un éphèbe au crin d'écorce et à la toison aussi fière que l'ensemble de son apparence. Tenue brodée de soie et blason de sa maison niellé à hauteur de poitrail, il se tenait droit, enjôleur, le verbe doucereux et les mimiques aguicheuses. En face, la biche ne semblait pas moins enchantée, quelques rougeurs flattées venues enjoliver ses pommettes et les doigts occupés à manipuler la tige d'une fleur que l'étalon avait pris le soin de cueillir dans les Jardins de Glace avant de l'aborder. Leurs rires s'élevèrent de concert, et de leur échange, Ehvan ne put capturer que peu – et peut-être déjà trop. « Je vous le dis ainsi, milady. Vous n'êtes qu'un vil encenseur... Doublé d'un fourbe opportuniste, à n'en point douter, mais il m'aurait fallu être fou à lier pour ignorer cette chance. » Audacieux, il prit la menotte de l'Ebonhand et la porte à ses lèvres pour y déposer un chaste baiser, enivré par des pensées qui l'étaient assurément beaucoup moins. « N'est-ce pas le destin ? »

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyVen 9 Mai - 17:16

Tantôt Ehvan était incapable d'oublier les dix années qui le séparaient de Jora, tantôt il les oubliait comme si elles n'avaient jamais existé, et n'existeraient jamais. Il ne se permettait de badiner qu'avec elle, le reste du temps il arborait le masque rigide du Capitaine de la Garde, et en dehors de l'exercice de ses fonctions... Eh bien, il n'avait guère souvent l'occasion de faire risette. Ainsi, il prenait soin de se soûler du bonheur que lui procurait la jeune fille, et sans en perdre une seule goutte. Lorsqu'il avait fait sa connaissance quelques années auparavant, il avait été à mille lieues de songer qu'un jour, une si belle amitié naîtrait entre eux. Il avait couvé d'un regard tendre et protecteur la jeune Ebonhand, comme un frère aîné l'aurait fait avec une petite sœur. Inconsciemment, il avait substitué Sylarne à la demoiselle, échangeant de ce fait une vipère pour une rose et une sœur... contre une autre ? Point exactement, mais il était encore trop tôt pour qu'il ne puisse le comprendre. Plus pour très longtemps, bien qu'il affiche un sourire espiègle, le jeune lion n'en oubliait pas pour autant le bougre qu'il éclipsait et qui lorgnait sur son amie avec un air qui était tout sauf innocent et déplaisait tout particulièrement au capitaine, pour le peu qu'il avait toléré d'en voir. Il y avait des façons élégantes de mirer les demoiselles... et il y avait les autres. Il supposait tout bonnement que l'homme comprendrait qu'il avait tout intérêt à passer son chemin, bien que le message soit tout sauf cristallin. Ehvan était habitué au respect mêlé de crainte que l'on devait à son rang davantage qu'à sa personne, si bien qu'il ne songeait pas une seule seconde que l'importun oserait se rapprocher de Lady Ebonhand dès que la plus petite occasion se présenterait. Aussi étonnant que cela puisse paraître le jeune lion était davantage habitué à rugir qu'à mordre, aucun n'était encore passé sur le fil de son épée, et bien que l'envie l'ait démangé plus d'une fois.

« Ehvan Clanfell, la Belle de Middholt... Ce titre me siérait parfaitement, à bien y réfléchir ! » Il battit des cils comme l'aurait fait une jeune demoiselle, ce qui lui donna un air absolument ridicule, et déclencha l'hilarité de Jora. Le rire plus grave du jeune homme fit écho au sien, tandis qu'il tentait de s'imaginer vêtu des mêmes soieries que Jora, ou encore materné par son armée de nourrices. « Fichtre non, je crois que je préfère encore rôtir dans mon armure plutôt que de laisser une seule de ces rombières me toucher ! Tu remportes la victoire, je crois que je ne supporterais pas une seule journée dans ta peau ! Je ne saurais pas rester en place pour les laisser me pouponner et par les dieux, je crois que je distribuerais les gifles à la volée ! » Peut-être aurait-il pu composer avec les nourrices, les fards et les coiffures, les règles de bienséance dues aux dames... Mais les galants et autres courtisans ? Il n'aurait pas eu la patience de les supporter, et n'aurait guère su tolérer les regards lubriques et les gestes déplacés... Non, assurément, le capitaine n'aurait pas fait une demoiselle très délicate, il aurait été de celles que l'on traitait de harpies pour la simple et bonne raison qu'elles ne souhaitaient pas se soumettre à la volonté toute puissante de leurs comparses masculins. Le jeune lion était certes d'une maladresse parfois affolante avec les dames, mais il leur offrait le respect auxquelles elles avaient droit, mêmes les plus agaçantes d'entre elles. Sans doute se sentait-il, d'une drôle de façon, obligé de faire preuve de déférence, car il avait arraché la vie de sa génitrice en s'extirpant de sa matrice. La maternité était plus périlleuse que la pire des guerres, c'était la première leçon qu'il avait apprise, et qu'il n'était pas prêt d'oublier.

Quant au jeu dangereux de l'amour... Ehvan n'avait pas le cœur de dire à Jora qu'aussi bien elle que lui avaient bien peu de chance de faire des mariages d'amour, qu'importaient les élans passionnés de leurs palpitants. Leurs noms et leurs rangs en faisaient des partis de choix, et il s'agirait davantage de faire prospérer le patrimoine familial que d'assouvir leurs desseins amoureux. C'était une vérité triste mais hélas universelle dans le monde de la noblesse, et si des rares avaient le bonheur de s'unir à l'être aimé, la majorité devait se plier aux divers besoins de leur patronyme. Les unions étaient bien souvent malheureuses, et les amants et amantes nombreuses... Que la belle garde ses illusions innocentes et enfantines, ce ne serait pas lui qui lui qui les lui ôterait. Lui ? Il n'était pas pressé de passer la bague au doigt d'une lady, bien qu'il ait l'embarras du choix. L'honneur reviendrait en premier à Synric... Car c'était lui l'héritier, lui qui devrait assurer l'avenir de la maison Clanfell. Pas Ehvan, qui avait déjà toutes les peines du monde à y trouver sa place. Les choses étaient ainsi parce qu'il avait involontairement tué Kataryn et si les paroles maladroites de la jeune fille lui arrachèrent une grimace discrète , il ne lui en tint pas rigueur. Ce n'était pas comme s'il n'y pensait pas quotidiennement, après tout. Sans compter que Jora avait vécu la même malheureuse expérience, bien que leurs pères respectifs aient eu deux réactions bien différentes. Là où Sylar avait dédaigné son enfant, Hulgard avait enfermé le sien dans une cage dorée de sécurité. Était-ce parce qu'Ehvan était né homme et Jora femme que leurs paternels avaient réagi de telles façons ? Ce n'était plus Sylar qui pourrait répondre à cette interrogation, et si Hulgard le pouvait... Mieux valait le questionner au plus vite, car la roue du temps ne lui serait plus favorable bien longtemps.

« Ce n'est rien, ne t'en fais... » commença-t-il doucement, avant d'être interrompu par un des gardes sous ses ordres. Il arqua un sourcil, et avant de se préoccuper de la nouvelle prétendument urgente, il s'inquiéta de laisser son amie seule, et si loin de son escorte. Ce n'était pas tant d'elle que le jeune lion se méfiait, plutôt du reste des fauves qui seraient susceptibles de lui tourner autour. Hélas, le devoir l'appelait, et le capitaine ne pouvait s'y soustraire. « Tu ne bouges pas. » répéta-t-il, davantage pour se rassurer que pour intimider la jouvencelle. Il ne l'abandonna pas à son banc l'esprit tranquille, et c'est en pestant silencieusement qu'Ehvan suivit son subalterne. Ce qu'il avait à dire avait tout intérêt à être réellement urgent, sans quoi il aurait à subir ses foudres. En fin de compte, il s'agissait d'une histoire concernant la sécurité des appartements royaux, qui se devait d'être renforcée selon certains... Le bougre qui avait interrompu Ehvan et Jora n'était qu'une sorte de messager envoyé par ses pairs, des pairs qui se pensaient plus finaux que leur capitaine, qui avait calculé à l'homme près le nombre de gardes qui devraient assurer la sécurité de leur souverain. À quoi bon renforcer la sécurité des appartements royaux si le roi et son épouse ne s'y trouvaient pas. Avaient-ils réalisé, les imbéciles, que l'effectif était doublé partout où se trouvait le souverain ? De toute évidence non, et une fois l'affaire réglée, Ehvan roula des yeux si fort qu'il aurait presque pu apercevoir sa propre cervelle.

Si cet entretien ne fut qu'une perte de temps, cela n'entacha cependant pas l'humeur du lion, qui s'en retourna trouver la gazelle qu'il avait abandonnée le temps de régler l'histoire. Il fit déjà la moue en entendant le rire de son amie résonner, car il paraissait évident qu'elle ne s'esclaffait pas seule. Au détour d'une sculpture de glace, Ehvan eut la désagréable surprise de trouver Jora en compagnie de l'indélicat qu'il pensait avoir découragé. Ses doigts se refermèrent nerveusement sur le pommeau de son épée et l'air revêche, il n'hésita pas un seul instant avant d'interrompre le galant dans sa tirade mielleuse. « Le destin semble bien trop généreux avec les cavaleurs. » De votre genre, manqua-t-il d'ajouter. Surpris par l'interruption acide du capitaine, l'importun lâcha la main de Jora et s'éloigna d'un pas – sage décision. La douceur avait laissé place à l'exaspération, pour une raison inexpliquée... ou au contraire plus qu'évidente. « Il faut croire qu'une rose ne peut s'épanouir sans que quelques insectes n'essaient de s'accrocher à elle. » L'insecte en question ravala sa salive de façon fort peu ragoutante, tandis que le lion le toisait de toute sa hauteur. « Certaines fleurs peuvent être cueillies par n'importe quel rustre, et les autres... Eh bien, les autres sont hors de leur portée. » Il considéra une seconde la fleur que tenait Jora entre ses doigts graciles et leva les yeux au ciel. « Et toutes les roses ont des épines, vous feriez mieux de ne pas l'oublier. » Ehvan se tenait parfaitement entre la demoiselle et l'importun. Si Jora était la rose, lui était les épines, et le bougre ne voudrait pas s'y piquer. « N'avez-vous pas quelque amante à assommer avec vos piètres vers ? » Il ne fallut qu'un regard glacé pour achever d'impressionner l'homme, qui fila sans même faire une courbette à la lady qu'il avait pourtant abordé avec des manières en apparence courtoises. Les bras croisés sur le plastron de son armure, Ehvan ne se détourna pour faire face à Jora qu'une fois l'énergumène hors de sa vue. Alors, il découvrit la jeune fille qui arborait une mine... contrariée ? « Eh bien, quoi ? » Son expression se radoucit, et il décroisa les bras. « Tu n'es tout de même pas fâchée ? Allons, il fallait bien que je le fasse déguerpir, sans quoi il t'aurait... » Il se gratta le menton, ignorant jusqu'où la sincérité l'autoriserait à être délicat. « Certains hommes sont plus indélicats qu'ils n'y paraissent, crois-moi. » Pour le coup, c'était l'hôpital qui se moquait de la charité, car il n'avait pas fait preuve de beaucoup de délicatesse en chassant l'individu. « Et puis, ton père ne me l'aurait jamais pardonné si j'avais laissé ce serpent te charmer. »


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyDim 11 Mai - 14:43




E
tre une femme avait ses incommodités, une pléthore de désagréments lorsque l'on y songeait, mais aussi ses quelques privilèges. Qu'existait-il de plus flatteur en ce monde que de se sentir comme l'unique rosacée parmi les ronces et l'ivraie ? L'égo dorloté par les rimes doucereuses, admirée certes pour sa noblesse sous-jacente, mais aussi pour les courbes sculpturales qui gagnaient en joliesse au gré des lunaisons, Jora se souvenait avec émoi qu'elle n'était plus seulement une fille, mais une femme. Ingénue,il était vrai, inexercée dans l'art minaudier et trop longtemps isolée pour ne pas honteusement profiter des odes que l'on pouvait créer à l'occasion de sa vénusté adolescente. Y avait aussi, cet arôme d'interdit qui enrobait les jardins éternellement inertes dans le gèle, la promiscuité sans chaperon d'un sieur avec une damoiselle, un conciliabule qui n'avait point lieu d'être et pour lequel tous deux pourraient se faire durement tancer – si ce n'était châtier pour le jouvenceau que d'aucuns diraient trop hardi. Mais qui heurtaient-ils donc, si ce n'était la bienséance ? Personne. C'était tout du moins ce que la belle pensait, jusqu'à ce qu'à l'angle du corridor, ne feule le fauve de retour de ronde. Un territoire assidûment gardé, et n'y avait pas seulement celui royal qui était alors concerné. Toute aussi pantoise que son fourbe enjôleur, l'Ebonhand soubresauta – ou réflexe inconscient de celle qui sait parfaitement être dans l'irrégularité. - pour finalement distinguer la crinière du lion furibond qui approcha et les sépara. Si le bougre s'éloigna, elle fit également un pas en arrière et contempla sans mot dire l'étrange face-à-face dont elle n'était pas l'arbitre, mais le grand prix. Il n'était pas rare que les courtisans se pressent à ses pourtours, mais toujours en public et de façon assurément moins cavalière, aussi était-ce la première fois qu'elle voyait Ehvan courroucé – et encore, il était irréfutablement capable de plus que cette ire sourde qu'il parvenait à contrôler avec maestria pour ne pas outrepasser les lisières. Contrairement à son adversaire qui, se sachant coupable, ne chercha pas à confronter la figure d'importance et partit avec ce qui lui restait de dignité entre les jambes.

Aux côtés du mâle dominant, la jouvencelle traversa différentes phases d'émotions : aux prémices l'étonnement, puis un profond embarras qui la fit s'empourprer, avant de finaliser le tout par une contrariété qui ne fit pas plus blêmir ses saillantes pommettes. Ce fut un regard torve qu'elle darda sur le responsable de cette déconvenue, et ce, même si elle le savait dans le vrai. Ses arguments bien que incertains dans leur expression étaient fondés, même s'il avait omis l'art et la manière de congédier un dignitaire qu'il ait été en infraction ou non – et encore, quel délit était-ce. Et en dépit du bon sens, elle ne put réprimer son acrimonie. « Tu n'es pas Lui ! » Il n'était pas son paternel, pas même son frère, qu'importait si elle l'avait toujours considéré comme tel, il n'en avait pas pour autant tous les droits légitimes. « Toi aussi, tu penses que je suis trop sotte et vaine pour pouvoir me débrouiller ? Dis-le, que je ne suis qu'une idiote qui se cache dans les bras de la Main du Roi, ou peut-être que je ne suis qu'un pion sur l'échiquier de ce dernier ? Pour qui te prends-tu ?! » Les sourcils froncés et la mimique indélicate, petite oiselle vexée et épuisée que l'on ne cesse d'agir à sa place sans la concerter plus avant. Il était injuste qu'elle épanche sa bile sur son pauvre gardien qui, au final, n'avait fait que son devoir. Elle le comprenait mais... refusait de l'admettre. « Tu n'avais pas besoin de l'éconduire de cette façon ! Et... ce que je fais de mes honorables accointances ne te regarde pas ! Je... je ne t'appartiens pas... » De la colère elle glissa à la tristesse offensée, comme si ses propres mots n'étaient que des coups de hachoir. « Je n'appartiens à personne... » Reprit-il, dans le dessein de se convaincre elle-même, alors qu'elle savait pertinemment qu'il n'en était rien. Elle se détourna, songea un instant, puis abandonna finalement la fleur argentine et indigo sur le siège non loin d'elle, avant de progresser dans le couloir – sans le Clanfell. « Je retourne au hall, n'aies crainte, je ne compte pas m'acoquiner avec le premier... serpent qui passe. Au revoir Ehvan ! » Elle souleva les pans de sa robe opaline et accéléra le pas en petit trot, signifiant par là qu'elle ne désirait absolument pas revenir sur sa décision et qu'il l'accompagne. Bientôt, son galbe disparut, inconsciente du sel qu'elle laissait sur la plaie d'un coeur au lyrisme nouveau.






L
'huis piaula, puis claqua violemment dans le sillon de la jeune femme qui se statufia, immortalisée dans une contenance à la fois fière et affligée. Les paupières closes, elle retenait les perles diaphanes de choir de ses cils telle une ondée inopportune, les retenant au revers du voile de carne sur lequel étaient projetées toutes ses affres. Comment en étaient-ils arrivés là ? Pourquoi avait-il fallu que le géniteur cède à la convoitise dommageable qu'il lui avait habilement dissimulée sous ses airs fallacieux de père aimant ? Elle l'avait deviné, qu'il était rongé par une ambition aussi pernicieuse qu'elle était sanguinaire, ce n'était point l'amour filial qui ferait office de cécité sur des vices plus conséquents que le monde. La dernière fois que Jora s'était tenue ici même, dans cet ouvrage d'architecture obscur et glacial qu'était Jernvugge, elle n'était qu'une ouaille, l'enfant d'un haut représentant, mais rien de plus. En trop peu de temps qu'il n'en fallait pour le dire, tout avait basculé, l'eau saumâtre d'un océan de ténèbres avait inondé l'ensemble de sa vie pour lui offrir un avènement dont elle ne voulait pas. Hulgard, roi d'Ibenholt, usurpateur qui avait lavé le Trône de Jais avec le sang des elfes, le sang d'innocents. L'encens pourprin avait enjolivé son couronnement, elle avait quitté un seigneur pour se réfugier à Ravenhole, où les innommables conjurations lui avaient été révélées par Lorkhan, et avait retrouvé un monarque qui prônait avoir reconquérit son héritage. Leur héritage. Ibenholt n'était plus la même, la fragrance térébrante du sacrifice et de l'iniquité y flottaient en frimas constant, elle en avait le vertige, et aurait tant voulu ne jamais rentrer. Quelques jours, seulement, cauchemardesques et bariolés d'algarades, d'objurgations, de pleurs et de doléances, qu'elle avait reposé pied en la contrée qui l'avait vu naître et qui la verrait apparemment ceinte de la couronne dans un avenir qu'elle espérait lointain. Elle se remémorait les paroles du fils Ravncrone, une guerre juste. Et elle avait beau fureter, elle n'y trouvait rien de juste, dans cette croisade qui avait exterminé une ethnie de leur ville, à quelques exceptions près. Kalanar n'était plus et les dieux seuls savaient où se trouvait son épouse et sa progéniture, le quotidien n'aurait plus jamais le même aspect, ni la même nature. C'était un nouveau chapitre qui s'entamait, rédigé à l'encre de garance.

Dans l'aile du Dragon qui était désormais son chez elle, la nymphe désenchantée sortait d'une entrevue avec le régicide, qui avait comme à chaque fois su étouffer le brasier juvénile avec une éloquence prompte à en faire glapir les sépultures. Ce n'était pas elle qui prenait les décisions, elle n'aurait rien à dire, rien, comme toujours, il lui faudrait accepter – ou plutôt subir – la glorieuse destinée qu'il lui apprêtait. Tremblante de rage et de rancune, elle dépassa le dragon d'obsidienne et se dirigea vers ses appartements hautement surveillés non loin d'ici, soudainement interloquée par quelques éclats phoniques qui semblaient provenir du début du corridor. Parmi les voix, elle crut en reconnaître une, trop belle pour être vraie, si bien qu'elle s'en alla vérifier. Ce fut un binôme de factionnaires et leur ancien capitaine qu'elle rencontra, les premiers refusant obstinément d'ouvrir la voie au second. En croisant les prunelles d'Ehvan, la sylphide pensa défaillir et sentit son palpitant bondir contre sa cage thoracique. Séparés par les cerbères en cuirasse, il leur fallait trouver un moyen de se réunir. « Qu'est ce que tout cela signifie ?! » A l'envolée féminine, les sentinelles se redressèrent en position de déférence, surprises par l'ingérence inopinée. « Princesse... ! » Princesse. C'était ainsi qu'on la surnommait à présent, qu'elle le veuille ou non, tel était son titre officiel, auquel elle peinait encore à s'accoutumer. « Nous avons ordre de ne laisser passer personne sans agrément spécial estampillé du sceau royal, tels sont les ordres de votre père. Mais enfin, cessez votre zèle ridicule et faites preuve de jugeote, auriez-vous omis que c'est à l'homme qui se tient devant vous que vous devez votre place ? » Après, c'était le jeune lion qui, naguère, choisissait lui-même les éléments de la Garde Royale, l'ingratitude était criarde. « Là n'est pas la question votre altesse, la dignité durement acquise peut vite s'effondrer lorsque d'opiniâtreté, l'homme dont il s'agit renie son devoir et se dresse contre plus haute autorité. » Le quidam toisa le flavescent colosse, le vouant silencieusement aux gémonies. « Qui êtes-vous pour parler de félonie ? Un témoin, votre Grâce. » La chique coupée nette, la naïade biaisa une oeillade de détresse vers celui qui était si proche, et si loin à la fois. Furtivement, elle réfléchit, pointant une probable faille dans les consignes appliquées. « Mon père vous a sommé de ne laisser passer personne dans l'Aile du Dragon ? Si fait, Sa Majesté tient à votre sécurité et à sa tranquillité. Fort bien, vous ne verrez donc pas d'inconvénient à ce que ce soit moi qui sorte de l'aile. » A peine le temps de réaliser, que la belle avait franchi le barrage et s'était saisie de la paluche de l'adonis qu'elle entraîna autre part.

Dans leur course hâtive, la chaleur des paumes jointes agissait comme un onguent dont elle se languissait de profiter des propriétés curatrices. Finalement et par crainte que quiconque ne les interpelle, elle pénétra la première salle venue, un boudoir dont elle referma promptement la porte après eux. Porte, contre laquelle elle laissa ses mains appuyés, la retenant comme si une légion de démons menaçait de l'enfoncer. Après l'effervescence de la fuite, le calme soudain de l'arrêt et le mutisme des âmes torturées. La tête basse, le minois caché sous l'étincelante crinière, elle resta figée le temps de plusieurs secondes qui parurent durer une éternité. Puis, ses épaules tremblotèrent, avant d'être plus brutalement secouées par des sanglots qu'elle n'essaya plus d'endiguer. « Je savais... » Elle révéla son faciès sur lequel les larmes pleuvaient. « Je savais que quelque chose se tramait lorsqu'il m'a envoyée à Ravenhole... Mais comment a t-il pu faire cela, comment a t-il pu... » Elle plongea dans l'azur amical, couinant à l'instar d'un chaton sans sa mère. « Il a fait emprisonner Irinwe, je ne peux plus la voir... Il veut la faire exécuter... ! » Un sanglot plus puissant que les précédents la réduisit à l'état de poupée éplorée, une menotte sur ses lippes, elle voûta l'échine et pleura tout ce que d'autres avaient pleuré durant la Nuit des Larmes.

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyMar 13 Mai - 14:32

La petite rose avait davantage d'épines que le jeune lion l'aurait soupçonné, mais il en aurait fallu davantage pour l'effaroucher, il avait l'habitude de se piquer le bout du museau à bien pire. Ce qui ne l'empêcha pas d'être profondément troublé par l'emportement de la demoiselle, qu'il n'avait jamais vue se mettre dans un état pareil. Comment lui dire ? Comment lui dire qu'il n'avait rien voulu d'autre que la protéger, veiller sur elle ? Pas comme l'aurait fait le Capitaine de la Garde Royale, pas l'aurait fait un ami, et certainement pas comme l'aurait fait un frère... Mais comment aurait-il pu s'exprimer sur une vérité que lui même peinait à comprendre ? De toute évidence, les dieux n'avaient pas fini de martyriser le pauvre Ehvan ; le voilà qui s'entichait d'une jeune fille de dix ans sa cadette ! Oh, cela n'avait en soi rien de bien extraordinaire, c'était simplement suffisamment perturbant pour que le jeune homme n'y songe pas. Pas encore, même si d'aucuns lui auraient dit que cela se voyait comme le nez au milieu de la figure. Ce qui aurait pu être sa seule source de réconfort ? Jora ne semblait pas plus lucide que lui. La Fatalité en soit louée, au moins ne l'accuserait-elle pas de jalousie en plus ! D'autant plus que, et bien qu'elle hurle le contraire, elle était vulnérable. Ehvan n'aurait jamais songé à la traiter de sotte, mais sa naïveté et son cruel manque d'expérience au milieu des vautours et des renards qui composaient la plèbe en faisait une proie facile. Elle avait davantage besoin du lion pour la protégeait qu'elle ne le soupçonnait – et sur ce point, l'avenir donnerait raison à Ehvan. Ehvan qui n'osa pas dire un traître mot, de peur d'alimenter l'ire de la jeune fille. Qu'elle râle et cogne du poing si elle le voulait, il avait fait son devoir et personne ne le convaincrait du contraire. S'il avait laissé le bougre jouer son jeu comme il l'entendait, les dieux seuls savaient où cela aurait mené la petite rose.

Petite rose qui ne voulait appartenir à personne, ce qu'il pouvait comprendre aisément. C'était tout ce qu'il lui souhaitait, d'être libre de faire comme bon lui semblerait... Hélas, avec un paternel comme Hulgard et un patronyme comme le sien, la pauvre Jora avait bien plus de chaînes aux poignets qu'aucune autre. Le jeune lion lui avait rendu un fier service en la débarrassant du galant, si cet incident était parvenu jusqu'aux oreilles du lord Ebonhand, il aurait rajouté d'autres barreaux à sa cage dorée. Qu'importe si la jouvencelle en veut à son protecteur sur l'instant. Lorsque la colère sera retombée, lorsqu'elle sera de nouveau seule dans sa tour, elle comprendra... Plus tard, elle comprendra. C'est du moins à cette pensée que se raccrocha le jeune homme en regardant son amie disparaître, dans une tornade de soieries et de mèches opalines. S'il avait pu étriper son serpent, Ehvan l'aurait fait avec le plus grand des plaisirs. Lui qui ignorait quand il reverrait la jeune fille ne pouvait s'empêcher d'être amer, face à la triste fin de cette balade. C'est donc particulièrement irrité qu'il s'en retourna à son devoir, et il aurait fallu être dément pour l'importuner.


 A flame of oath ♤ Ehvan 962983line

Il aurait pu la toucher. Il n'aurait eu qu'à tendre le bras pour effleurer sa joue de velours de ses doigts... Hélas, des factionnaires qui avaient oublié à qui ils devaient leur place se tenaient entre lui et Elle. Le lion avait envie de rugir et de sortir les crocs, ce n'était rien de plus que son affection pour la jeune femme qui l'en empêchait. Cela et la douleur encore bien trop vive de son flanc gauche, qui l'empêchait encore de jouer au chevalier héroïque – une chance pour les ingrats qui lui barraient le passage. Ce n'était plus du sang qui coulait dans les veines du Clanfell, c'était de la lave en fusion, et mieux valait ne pas le titiller. Il bouillonnait d'une rage sans nom, et ce depuis que son aîné et lui en étaient venus aux mains. Meurtri dans sa chair et dans son cœur, il avait l'impression de ne plus être un pantin désarticulé qui se traînait sans volonté. Du moins... Jusqu'à ce que l'envie de voir la désormais princesse Jora ne l'emporte sur la raison, l'entendement et l'affliction. Il avait chevauché jusqu'à l'Aile du Dragon comme si sa vie en dépendait et peut-être était-ce le cas. La culpabilité le rongeait une fois de plus ; il avait failli à son devoir de protecteur, d'ami, et plus encore... La Nuit des Larmes n'aurait de cesse de le hanter, mais pis encore il regrettait de ne pas avoir été aux côtés de la toute nouvelle héritière du trône pour être son bouclier contre la vilenie du monde et de ses habitants. Il avait voulu jouer au héros pétri de bonnes intentions, mais avait failli à la tâche, et son honneur avait été bafoué et piétiné. Lui qui n'avait jamais voulu que faire le bien se voyait à présent marqué du sceau de la traîtrise – l'on aurait difficilement pu trouver situation plus ironique que celle-là. Voilà que c'était lui que l'on empêchait de voir Jora ! Si les imbéciles continuaient à débiter des inepties tout en lui barrant le passage, c'était leurs nerfs qu'il allait mettre à vif... Il n'oubliait pas qu'il restait meilleur qu'eux, et qu'un homme abattu était capable du pire.

Fort heureusement pour les deux bougres, la princesse sut mettre à mal leurs facultés cognitives en pointant une faille dans leurs ordres, et tandis qu'ils s'interrogeaient, elle en profita pour filer entre eux et s'emparer de la main du lion, qui la suivit sans demander son reste, mais non sans avoir foudroyé du regard ses anciens subordonnés. Le cœur battant à une cadence désordonnée, Ehvan laissa Jora les guider jusqu'à un boudoir où ils s'enfermèrent, cachés des horreurs et des débilités du monde, qui n'en finissaient plus de surgir de toutes parts. Il ne prêta aucune attention aux lieux, son regard était rivé sur la demoiselle, qu'il n'osait pas toucher tant elle lui paraissait fragile et au bord de la perdition, comme une fine porcelaine en équilibre précaire sur une étagère. Il la vit trembler avant d'entendre ses sanglots, et lorsqu'elle lui révéla son minois de poupée baigné de larmes, il se sentit aussi impuissant qu'il l'avait été lors de la Nuit des Larmes. « Jora... » Lui qui était venu pour se faire cajoler et réconforter se trouvait impuissant face à la détresse de la petite gazelle. Il balbutia le prénom de la jeune femme encore une paire de fois, pétrifié et empêtré dans son incompétence. Finalement, après d'interminables instants passés à la regarder larmoyer, il glissa ses bras autour de sa frêle silhouette et l'attira contre lui, une main caressant tout doucement son dos, l'autre apposée sur sa tête. « Chut... chut, ne pleure pas, ne pleure plus, je suis là, je suis là... Jora, ne pleure plus... » Elle avait pourtant toutes les raisons du monde de laisser les larmes inonder ses joues. Il ignorait comment la rassurer, ignorait s'il était seulement possible de le faire... Le jeune lion n'était plus qu'un fauve incapable, amputé de ses facultés guerrières aussi bien que mentales, tout ceci... lui échappait. « Calme-toi, calme-toi... Je suis là... » Et à quoi servait-il, lui qui n'avait pas su empêcher son propre frère de se parjurer ? « Ton père ne fera pas exécuter Irinwe, il sait combien tu tiens à elle, il n'oserait pas. » Ah oui ? Ebonhand était-il à un crime près ? Certes non, mais ce n'était pas ce genre de mots que la jeune femme voudrait entendre, elle semblait déjà au bord de la pâmoison. Ignorant la douleur de son flanc, Ehvan la serra plus fort contre lui, et il baissa le sommet de son crâne avec toute la dévotion de son affection pour elle, dans le vain espoir de l'apaiser.

Puis il s'écarta un peu, prenant toutefois garde à ne pas rompre le contact. Avec délicatesse, il se saisit du visage de Jora, et il la força à le regarder avec délicatesse. « Je ne sais pas de quoi l'avenir sera fait, mais je sais ceci : quoi qu'il advienne, je serai là pour toi, pour te défendre et te protéger. Je te le promets, je te le jure sur mon honneur. » Son honneur, c'était la seule chose qu'il lui restait. Et ce qui était le plus précieux à ses yeux et à son cœur, Jora le savait. « Et rien ni personne ne me fera faillir à cette promesse, tu entends ? Pas ces imbéciles de gardes, pas tous ces parjures et ces opportunistes... Pas même ton père. Rien ni personne. » Il essuya les larmes qui roulaient encore sur les joues de la princesse et se pencha pour embrasser son front. « Tu es tout ce qu'il me reste... » Triste aveu que celui-ci et pourtant, au moment où les mots étaient prononcés, il le pensait sincèrement. « Tout ira bien.  Je suis là. »


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyMer 14 Mai - 15:13




D
ieux, qu'elle l'abhorrait, qu'elle souhaitait que l'on traîne le despote sanguinaire sur la claie d'infamie, qu'elle voulait qu'il paie pour ses ignominies qui avaient fait grimper une crue vermeille dans les venelles de la ville, qu'elle priait pour qu'il daigne battre sa couple et ainsi faire amende honorable, quand bien même cela n'aurait point ramené ceux qui étaient tombés sous le joug de son ambition. Rien, elle le savait, ne pourrait estomper le génocide qui avait eu lieu, rien ne pourrait jamais excuser Hulgard Ebonhand qui se niellait en exemple du genre, tyran impavide qui ajustait la couronne sur son crâne avec minutie. C'était la première fois en plus de dix huit ans, que Jora ressentait une telle aversion pour son propre père, la première fois qu'elle élevait explicitement sa voix contre la sienne pour le condamner dans sa folie hiératique, folie qu'elle savait loin d'être finie... Ce n'étaient que les prémices d'une kyrielle dont elle n'osait imaginer l'acabit, après avoir éradiquer la grande majorité des ouailles elfiques de Jernvugge, mettre le reste de Middholt à feu et à sang n'importunerait assurément pas le nouveau monarque d'Ibenholt si cela servait ses desseins. Ils n'étaient qu'à l'aube d'une ère pourpre et pourtant, la jouvencelle en avait déjà assez, bien trop pour son âme chaste et débonnaire qui troquerait volontiers un trône pour la concorde des contrées. Utopiste, vomir ses billevesées aux pieds de son géniteur serait vain, elle n'avait jamais eu une once d'influence sur l'essence pestilentielle de l'opportuniste avide de patrimoine, ce ne serait diantrement pas maintenant qu'il était l'un des quidams les plus importants des Cinq Royaumes qu'elle en aurait. La situation était d'autant plus affligeante qu'il était l'unique famille qu'elle avait jamais eue, et en cet instant, elle goûtait un peu des affres du jeune lion qui avait toujours été le galeux de son clan. Et elle savait à présent qu'elle n'aurait pu survivre si elle avait été à sa place, que de tous les valeureux, il était l'empereur.

Plus que courageux parmi les courageux, il était le socle fidèle et infrangible de son bien-être, dans quels bras aurait-elle pleuré s'il n'avait pas été là ? Irinwe était encellulée, elle maudissait Dralvur pour son concours dans les conspirations de son géniteur – et ce, même si les déités l'avaient châtié en le privant de son plus jeune fils occis durant la Nuit des Larmes. - Blaze et Jack auraient été impuissantes face à sa détresse, boucliers-lige avant tout, et il y avait bien son armada de nourrices, mais ce n'était pas comparable. C'était son étreinte à lui qu'elle voulait, sa gaucherie attendrissante qu'elle aimait, et immuable, la franchise de ce qu'elle croyait encore être un amour fraternel. Sotte, elle l'était plus qu'elle n'était encline à l'admettre, ingrate, de ne pas toujours lui rendre autant qu'il lui offrait, autocentrée alors qu'il souffrait lui aussi. Ne valait-elle donc pas mieux qu'Hulgard ? L'hypothèse la fit larmoyer plus encore, tandis que le fauve meurtri la conglomérait doucereusement à sa puissante charpente. Les paroles rassurantes eurent malheureusement peu d'effet sur les plaies à vif, ce furent davantage les baisers et l'étincelle de son regard qui parvinrent à la calmer et à lui redonner un semblant de contenance. Elle hocha timidement la tête, sachant que s'il jurait sur son honneur, il ne briserait jamais le sceau de son serment à moins de finir la tête sur le billot – ce qu'elle serait tout bonnement incapable de supporter, sa perte signerait la cessation de son être entier. Jora renifla, rubiconde, encore ballotée par les spasmes de son émoi qui se lénifiaient au gré des secondes. « Je suis désolée... je ne voulais pas pleurer, je te le jure, mais... ces gardes m'ont contrariée et je suis... tellement heureuse que tu sois là ! Si tu savais comme tu m'as manqué à Ravenhole, je regrette tant de ne pas avoir été là. » Quel miracle aurait-elle accompli, si tel avait été le cas ? Elle n'aurait eu qu'une vue tragiquement spectaculaire sur la croisade régicide, et contempler l'horizon ensanglanté du crépuscule depuis l'Arête du Ciel avait amplement suffit à ses sorgues de cauchemars. « Je suis terrorisée, Père me fait confiner dans mes appartements depuis mon retour et il parle de me faire constamment suivre par ma Garde. Pour le moment il refuse que je côtoie la cour, quiconque même, le temps qu'il l'« épure », il dit... il dit que je peux être la cible d'assassins ou que sais-je, je ne veux pas vivre dans la peur que l'on me tranche la gorge au détour d'un corridor ou que l'on empoisonne ma nourriture... ! »

Ce n'était point une vie pour une jouvencelle, pas Elle, elle s'y refusait, était indignement prête à renoncer à l'héritage de ses aïeux Ebonhand si cela signifiait avoir un quotidien quiet. Du haut de sa joliesse juvénile et outrageusement préservée des ressacs, elle ne mesurait pas tout ce que son patronyme symbolisait ni les sacrifices obligés des uns pour les convenances des autres. Tout cela la surpassait, elle ignorait quelle attitude adopter en pareilles circonstances. Soudain, ses phalanges glissèrent du pectoral du flavescent colosse jusqu'à son abdomen, où elle put distinctement sentir le pansement qui gardait ses blessures, en plus de la fragrance d'onguents ou elle ne savait quel cataplasme qui se dégageait. Elle se souvint alors, qu'elle n'était pas la seule à avoir matière à se lamenter. « Ehvan... je suis tellement égoïste... Je suis là à me plaindre, à me pâmer dans tes bras alors que je te sens trembler... Mais ce n'est pas l'effroi... c'est la douleur... ? » Question plus ou moins rhétorique, car elle avait eu tout loisir de se faire narrer les exploits de l'ancien capitaine mis au ban de ses fonctions. C'était d'admiration, qu'elle avait brûlé pour lui en apprenant avec quelle probité et aplomb il avait refusé de s'abaisser aux vilénies orchestrées par la Main Blanche, la Corneille et le Lion des Neiges en une trinité infernale. A sa connaissance, c'était l'unique à s'être soulevé – ou l'unique à être encore vivant... « Tu es fou de t'être risqué jusqu'ici dans ton état ! Asseyons-nous, tu seras probablement plus à l'aise... et je t'interdis de discuter les ordres de ta princesse... » Un rire triste lui échappa alors qu'elle plongeait dans l'étendue maritime de ses yeux, si son nouveau rang devait servir une fin, ce serait celle de prendre soin de son ami, qu'elle conduisit aussitôt à l'un des divans sur lequel ils prirent place.

Là, plusieurs secondes s'écoulèrent, le temps que la sylphide sèche définitivement les perles lacrymales de ses cils et pommettes, qu'elle prenne une profonde inspiration puis se tourne entièrement vers son interlocuteur, dont elle n'avait pas lâché le bras. « L'on m'a conté ce qu'il s'est passé, et je veux que tu saches : je suis incroyablement fière de toi. Tu es l'homme le plus honorable que Middholt ait jamais porté, je suis admirative et ô combien reconnaissante que tu ne te sois pas laissé corrompre comme beaucoup l'ont fait, ne doute pas que tu aies fait le bon choix ! Merci d'être resté toi, Ehvan, tu es bien le seul ici. » Elle saisit la paluche du sigisbée dans ses délicates menottes pour la couvrir de tendresse, portant le dos de la dite main jusqu'à sa joue ronde pour simuler une caresse. « Je suis navrée que les choses se soient terminées ainsi entre ton frère et toi... je... bonté divine... Comment en sommes-nous arrivés là ? Nous n'avons tout bonnement rien vu venir. Dis-moi que tu ne souffres pas trop, ta blessure est-elle grave ? Comment supportes-tu tout cela ? » La sensation d'impuissance s'apposa en étau autour de sa gorge, elle avait l'âcre impression que même ses mots sonneraient creux et improductifs. Pourtant, elle voulait lui faire comprendre que s'il était présent pour elle, l'inverse était tout aussi vrai.

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptySam 17 Mai - 0:02

De quoi diable s'excusait-elle ? Qu'elle pleure un océan de larmes, s'il n'y avait que cela pour l'apaiser et la consoler. Ce n'était certainement pas Ehvan qui la blâmerait d'avoir envie de s'épancher, lui-même en mourait parfois d'envie. Il n'était pas d'usage pour les mâles de larmoyer, alors comme les autres il serrait les dents et clignait des paupières pour renvoyer les perles salées d'où elles venaient, ce qui ne rendrait pas leur écoulement moins nécessaire. Enfant, combien de fois avait-il pleurniché sur son sort de petit garçon maudit, les sanglots étouffés par les couvertures et les oreillers ? Il se souvenait sans mal de s'être senti soulagé une fois les larmes écoulées, soulagé et calmé, au moins pour quelques heures au cœur de la nuit. Le garçon pouvait pleurer, l'homme n'en avait pas le droit, c'était l'un des nombreux enseignements appris aux Tours d'Airain. Un chevalier se doit de toujours rester droit et fort, un chevalier se doit de protéger ceux qui ne peuvent le faire seuls, un chevalier... doit prêter tant de serments, jusqu'à en avoir le tournis, jusqu'à parfois devoir oublier les premiers pour faire de la place aux derniers. Des serments et des promesses, encore et encore... Plus pour Ehvan. Il n'y avait plus qu'un serment, plus qu'une promesse, celle de veiller sur la jeune Ebonhand ad vitam aeternam. Ses jours à lui seraient hélas bien plus courts que les siens, le destin était cruel. Cruel au point que peut-être ni lui ni elle ne verraient leurs vieux jours. Une triste pensée qu'il eut vite fait de claquemurer dans un recoin de son esprit, car ressasser trop d'injustices finirait par le rendre malade – et il avait déjà bien peu d'allure.

« Oh, Jora... Moi, je suis heureux que tu n'aies pas été là. » Ehvan n'avait rien d'un jouvencelle impressionnable, mais même lui s'était trouvé le cœur au bord des lèvres en découvrant les traces du massacre. Il était bien content qu'elle n'ait rien vu, elle en aurait perdu le sommeil – tout comme lui. Dans son infinie folie, Hulgard avait au moins songé à préserver encore un peu l'innocence de son enfant... mais pour combien de temps encore ? Jusqu'où le nouveau souverain irait, le jeune lion ne voulait pas le savoir. Comme il le haïssait, d'avoir mis la belle dans une telle position ! N'était-elle pas assez fragile, fallait-il qu'il fasse d'elle une princesse contre sa volonté, une princesse déjà haïe par la moitié de Middholt à cause de lui ? Ah, s'il avait pu, il l'aurait enlevée et aurait fui avec elle, loin de ces maudites forteresses, loin de tous les vautours qui y rodaient... S'il était né sous d'autres cieux, il aurait pu hériter du don de prescience et alors il aurait su que c'était là la meilleure idée qu'il ait jamais eue. Las, il la pensait plus à l'abri qu'ailleurs entre les murs d'obsidienne de l'Aile du Dragon. « Arrête, je t'en prie, cesse ces inepties ! N'as-tu pas entendu ce que je viens de te dire ? Il ne t'arrivera rien. Si je dois traquer moi-même tous les empoisonneurs et tous les assassins du royaume pour assurer ta sécurité, eh bien soit ! » Il lui semblait qu'il n'avait plus que cela à faire, de toute façon. Il se garda en revanche bien de lui dire qu'il approuvait l'idée de la faire suivre en permanence par sa garde, car si elle était composée d'ingrats, au moins ces ingrats étaient-ils compétents, il s'en était lui-même assuré. Tout ce que le jeune lion voulait, c'était voir sa gazelle adorée en sécurité. S'il y avait bien une chose qu'il ne pourrait supporter, c'était qu'il lui arrive quelque chose. Il le lui avait dit, elle était tout ce qu'il lui restait, et il le pensait. Elle était la seule étoile qui éclairait encore les ténèbres de ses nuits, il n'était pas question de la voir s'éteindre. De prédateur il était passé à proie, et il n'y avait rien qu'une proie n'aurait fait pour sauver sa peau... et celle de la petite biche qui l'accompagnait. Dans son malheur, Ehvan avait de la chance, il n'avait plus à s'inquiéter que de Jora, maintenant que Synric lui avait révélé son véritable visage.

Une légère grimace déforma les traits du jeune homme lorsque les doigts de la belle glissèrent à l'endroit de sa blessure – qu'il avait d'ailleurs occultée aussitôt qu'il l'avait étreinte. À présent, il ne se souvenait que trop bien de son existence, et si la plaie était bien moins douloureuse grâce aux cataplasmes, le colosse n'en était pas moins affaibli. Et pourtant, il fit de son mieux pour rassurer la princesse, qui semblait épouvantée de ne se souvenir que si tard des mésaventures du lion. « Mon état n'a rien de préoccupant, n'aie crainte... Je n'ai pas mal, je t'assure. » Un mensonge prononcé de façon éhontée, alors que ses chairs l'élançaient à chaque mouvement. Il ne voulait pas l'accabler davantage, ne voulait pas jouer au chaton battu... Cela, il avait eu tout le loisir de le faire en compagnie de son aînée, et cela ne l'avait nullement soulagé. Au contraire, il était ressorti plus chamboulé que soulagé de leur confrontation. Mais puisque la princesse lui ordonnait de s'asseoir, il ne discuta pas et prit place à ses côtés sur un large divan. Il la laissa sécher ses dernières larmes dans un silence religieux, tandis que son corps se détendait. Quoi qu'il en dise, il n'était pas mécontent de pouvoir reposer ses muscles malmenés par le voyage, lui qui n'avait quitté la selle de sa monture que pour un bref passage à Fortrekke.

Autrefois, les paroles de la demoiselle auraient suffi à lui faire bomber fièrement le torse comme un lion accompli, mais au contraire, il se contenta là de détourner le regard, puis de baisser la tête, sa crinière terne faisant comme un rideau devant sa mine affligée. Non, il n'avait pas laissé la convoitise le changer, il s'était accroché à des idéaux qu'il croyait justes et... Il avait perdu. Il n'avait pas voulu jouer avec les mêmes règles que les autres, et bien mal lui en avait pris. Son refus d'obtempérer face à l'injustice apparaissait comme un merveilleux acte de bravoure aux yeux de Jora qui n'hésitait pas à l'aduler comme l'homme le plus honorable de Middholt – Sylarne l'avait simplement traité d'imbécile et bien que cela coûte au lionceau de l'admettre, c'était peut-être l'aîné abhorrée qui avait le jugement le plus éclairé. Ehvan ne releva la tête que lorsque Jora se saisit de sa main pour la porter contre sa joue veloutée et il la laissa faire avec douceur lui qui n'avait qu'une envie, se laisser aller contre son giron et ne plus penser à rien, ni à personne d'autre qu'elle. Il ferma les yeux et soupira longuement ; comme il aurait voulu plier l'échine... « Je supporte tout cela, parce que... » Parce qu'il le faut ? « Je n'en sais rien. Je ne sais plus, Jora, je ne sais plus. Je crois que je n'ai fait que me bercer d'illusions. J'étais persuadé que Synric était mon meilleur allié, mon meilleur ami... Je n'aurais jamais imaginé qu'il se dresse entre moi et la défense de centaines d'innocents, je croyais... Je l'ai provoqué en duel, mais je pensais que cela suffirait à lui faire comprendre qu'il se fourvoyait... Et me voilà le flanc percé, et je n'ai pas sauvé un seul elfe du massacre. » Il rouvrit les yeux et glissa sa main libre dans la nuque de Jora, qu'il attira doucement à lui pour poser son front contre le sien. « Mais ne t'en fais pas pour moi, dans son infinie bonté mon cher frère a épargné mon cœur... » Et elle, l'épargnerait-elle, ce pauvre palpitant malmené au point d'en perdre le rythme de ses battements ? « Tout ce que j'espère, c'est que ce maudit sens de l'honneur dont je m'évertue à faire preuve ne me coûtera pas ma place à tes côtés... » S'il avait autrefois chassé les idiots qui osaient tourner autour de Jora, ne risquait-il pas de goûter à sa propre médecine à présent qu'il s'était élevé contre les voix unies d'Ebonhand, Ravncrone et Clanfell ?


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyDim 18 Mai - 14:04




L
a trahison. Perfidie émotionnelle qui les avait poignardé dans l'échine, la pointe de l'estoc félonne ressortant à l'exacte hauteur du coeur... sans les avoir occis. Ce n'était qu'un mal qui les rendait moribonds, le temps que l'acide qui fluait dans leurs veinures ne s'estompe au gré des lunes qu'ils contempleraient se transfigurer de croissant à sphère, comptant les phases avec peine et pas suffisamment de doigts. L'abjection des proches qu'ils avaient tant chéris abandonnerait sur leur peau de mémorables stigmates, et il en était d'autant plus vrai pour le blond adonis qui, fort de sa probité, avait sincèrement désiré sauver son patronyme de la disgrâce éthique, sans apercevoir le tragique corollaire de sa vertueuse folie. Le simple fait que nul ne l'ait entretenu des conjurations de trois des plus importantes familles de Middholt avant qu'ils n'en arrivent à l'instant t constituait un témoignage explicite, Jora elle-même aurait pu augurer qu'Ehvan n'aurait diantre jamais offert son agrément à pareille brigue, alors, l'on avait patienté jusqu'au dernier grain du sablier pour le mettre face au fait accompli, dans l'espoir qu'il abdique à l'inéluctable. C'était si mal le connaître... et il avait fallu que son propre frère aille jusqu'à faire couler l'hémoglobine de son benjamin pour qu'il comprenne que l'infamie ne se partageait pas fatalement par ce même sang. La donzelle s'était maintes fois vue conter le lien qui les avait pourtant unis, avant tout ceci, et tout comme elle ne pourrait plus octroyer sa confiance à son père, elle concevait plus que parfaitement que Synric ait chu des monts de la considération du plus jeune lion. Comment aurait-il pu en être autrement ? Et, comme à l'usuel, elle supputait qu'on l'avait taxé d'inepte, d'imbécile à ne pas avoir simplement obéi comme on le lui avait demandé. Il s'était infligé des souffrances qui auraient certes pu être évitées, mais qu'en était-il, alors, de l'intégrité de l'Homme ? Cet apanage qui semblait se perdre de génération en génération, misérablement occulté par l'opportunisme et une plus grande part encore d'égotisme, ce trésor raréfié que l'on ne trouvait qu'en peu d'élus de la vertu. Elle aurait versé toutes les larmes de son corps et bien davantage s'il avait été passé au fil de l'épée, mais puisqu'il était en vie et sur la voie de la guérison, elle pouvait se permettre de lui susurrer quelques vers laudatifs qui se perdraient dans la chaleur de leur intime conciliabule. Mais à son plus grand regret, son apologie s'avérait anémique, tant le traumatisme et les incertitudes assaillaient l'esprit du sigisbée.

« Ehvan... » Prononça t-elle d'une voix cristalline, comme dans l'espoir que cela suffise à conjurer les affres qui ballotaient le pauvre quidam à ses côtés. Elle-même, qui avait été à plus d'une centaine de lieues d'ici, ressentait un remord infernal quant à l'impuissance qui l'avait étreinte lorsqu'elle avait appris les desseins d'Hulgard, alors, lui... elle n'osait même imaginer la pesanteur de culpabilité qui lui piétinait les épaules – et les dieux savaient pourtant à quel point elles étaient solides. Elle se doutait bien, qu'il aurait été incapable d'écorcher même superficiellement son aîné, il n'avait jamais été question de fratricide dans l'impulsion de sa mutinerie, seulement de protection de l'innocuité elfique. Les choses avaient échappé à tout contrôle, même à celui du premier Clanfell qui, grâce aux cieux, n'avait point été perfide au point d'observer son rival agonir dans une marre vermeille. C'était à croire que nul n'avait de véritable poigne sur son propre sort, et ce truisme abrasif était effarouchant. Si bien que l'Ebonhand ne se fit pas prier pour se rapprocher de son interlocuteur et juxtaposer son front au sien, les paupières closes et leurs souffles meurtris se mêlant l'un à l'autre dans un piètre bal d'infortune. Alors qu'il avait bien plus à craindre pour son futur que pour le sien, c'était pour elle qu'il se rongeait les sangs, et qu'il était doux, de constater que l'on désirait prendre soin d'elle de façon désintéressée. L'expression de la nymphe se fendit de mélancolie et d'un voile de désespoir, puis elle secoua doucement le chef, tant pour refuser la perspective qu'il présentait que pour effleurer son nez du sien. « Non, non... je ne tolérerai pas que l'on t'éloigne de moi, avec Irinwe, tu es le seul équilibre qu'il me reste, ils ne peuvent pas faire cela, ils n'en ont pas le droit... » Mais tous les droits, ils les prenaient, et prendraient aussi celui-ci si le sadisme leur en disait. Si son paternel avait osé jeter la nourrice qui l'avait autrefois bercée dans les geôles de Jernvugge, rien ne serait à même de le dissuader d'enjoindre que l'apollon n'approche plus sa fille. La vérité était cruelle, toujours. « Nous trouverons une solution, je te le promets. Une fois que l'effervescence des derniers drames se sera pacifiée, je suis convaincue que le roi me laissera de nouveau musarder parmi les courtisans, et que je sache, il ne t'a pas encore interdit l'accès au palais ! Nous n'aurons peut-être plus l'opportunité de nous voir en tête-à-tête, mais... nous pourrons toujours nous parler et... je suis sûre que cela ira... Il faut que ça aille ! »

A bien y songer, rares avaient été les fois où ils s'étaient réellement entretenus sans au moins un chaperon, du moins, plus depuis que Jora avait atteint l'âge d'intriguer la gente masculine. Elle ne se souvenait plus que, bien malgré leur attachement réciproque, ils se soient déjà laissés aller à une promiscuité telle que celle qui les enivrait aujourd'hui. Cependant, cette tendresse s'était manifestée avec un tel naturel qu'il lui semblait qu'elle avait toujours existé, et tous deux en avaient de toute façon besoin. « Même si Synric avait abdiqué en ta faveur, vous n'auriez rien pu faire... » Elle se redressa dans l'optique de mieux mirer la physionomie de son vis-à-vis, dont elle caressa la joue. « J'ignore ce que j'aurais fait à ta place, peut-être n'aurais-je pas eu autant de courage, quoi que tu en dises, je t'admire sincèrement. Tu es ce que se doit d'être un chevalier, n'en doute jamais, je t'en prie. » Elle lui offrit le simulacre d'un sourire, avant de faire choir ses lèvres sur la commissure des siennes et de s'allonger sur le divan, plaçant sa tempe sur les jambes du jeune homme. « Cela ne t'importune pas ? J'aimerais que tu restes encore, même si l'on ne parle pas, je me sens mieux quand tu es là. » Rassurée, plus que tout, si Ehvan avait sauvegardé sa place dans la Garde Royale, elle aurait tout de go imploré son pater pour qu'il daigne l'assigner à sa protection. L'utopie ne deviendrait jamais réalité, mais en attendant, ils pouvaient profiter de cette accalmie inattendue, avant de se hasarder derechef sur les braises en dehors de ce boudoir. De nouvelles secondes passèrent sans qu'un son ne soit émis, la jouvencelle s'était plongée dans ses pensées, les mirettes fixes sur les rideaux tirés de la fenêtre. Puis, son phonème s'éleva à l'instar d'une mélodie funèbre. « Jedath est mort... » Le second fils Snowhelm, la famille féale avait aveuglément suivi la volonté de leur suzerain, et elle en avait payé le prix. « J'ai très brièvement croisé lord Dralvur lorsque je suis rentrée... et je n'ai fait que le jauger d'un air assassin... d'un air si noir que j'ai senti mon âme en trembler... je ne lui ai même pas présenté mes condoléances... » Mais elle avait pleuré le défunt, avec lequel elle avait grandi, puis avait continué à maudire l'Ours Cendré qui, en tant que plus grand ami d'Hulgard, avait toujours été présent dans sa vie. Une sorte d'oncle, qui n'avait désormais plus rien de cela à ses yeux accusateurs. Elle ignorait pourquoi elle narrait ceci au Clanfell, ni même s'il avait été au courant de ce fait avant qu'elle le lui dise, et qu'importait, au fond... « Tant de choses ont changé... et vont encore changer à partir de maintenant. Je sais que bientôt, je ne ferai plus office que d'offrande diplomatique pour un époux que mon père aura assidument choisi... J'ai si peur qu'il miroite de me marier au prince Lorkmir, cet homme est... odieux. » Le premier fils Ravncrone n'était pas connu pour sa bonté ni même sa patience, Lorkhan, qui l'avait accueillie à Ravenhole, l'était déjà infiniment plus. Toutefois, elle ne se voyait au bras ni du premier, ni du second.

Soudain, l'on frappa à l'huis de leur antre, et des phonations qui firent soubresauter la demoiselle s'élevèrent. « Princesse Jora ? Princesse, nous savons que vous êtes là ! Ah bon ? On sait qu'elle est là ? » Une main claqua contre un crâne. « Aïe ! La ferme, imbécile ! »

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyJeu 22 Mai - 20:37

Le lion qui était venu chercher du réconfort dans les bras de la frêle demoiselle n'avait plus rien de majestueux. Blessé dans ses chairs et son esprit, il était sur les rotules, et c'était sur ces dernières qu'il se traînait d'un endroit à un autre. Vaincu, il avait rendu les armes et ignorait quand il les reprendrait, si il les reprendrait... Les idéaux pour lesquels il se battait n'étaient plus, et son impuissance face à son propre frère lui avait fait l'effet d'une douche froide. Glacé jusqu'à la moelle,  la tiédeur de la peau de Jora contre la sienne lui semblait être une douce brûlure – il n'aurait pas été gêné d'en garder les stigmates. Ehvan n'était pas de ceux qui vantaient à qui voulait bien les entendre les mérites et autres forces de sa maison, mais naturellement, il avait toujours cru être taillé dans une roche plus solide que les autres, les Clanfell étant réputés non seulement pour leur fortune, mais aussi pour leur sévérité et aplomb à la limite de l'inconvenance. Hélas pour lui, là où Synric et Sylarne étaient de diamant, il était de cristal. Tout aussi brillant, mais d'une fragilité ridicule. Il abhorrait l'homme qu'était devenu son aîné, tout en continuant à l'envier. Comme il était facile de vivre et de s'élever, lorsque l'on pouvait faire taire sa conscience aussi facilement que l'on soufflait la flamme d'une chandelle ! S'il avait pu faire de même, il aurait vécu sans le poids de la culpabilité sur les épaules, tout ce qu'il désirait il l'aurait pris ou arraché, à n'en pas douter, il serait devenu de ces grands hommes célèbres pour leur férocité et leur détermination... De ces tyrans que l'on admirait comme s'ils avaient été des saints, simplement parce qu'ils étaient arrivés en haut de l'échelle en piétinant les plus faibles et les plus intègres. Heureusement... malheureusement... il n'était pas de ceux là. Mais que les dieux le pardonnent, il n'en pouvait plus d'être des autres, de ceux condamnés à l'ombre et aux cendres par leurs valeurs morales. Il aurait eu fière allure sur le devant de la scène, le petit lionceau. S'il s'était joint à Synric au lieu de lui tenir tête, ils auraient fait un duo redoutable et redouté. Si, encore et toujours si...

Et si il avait fui, juste là, avec elle... que seraient-ils devenus ?

Songer que Hulgard puisse choisir de lui interdire de voir sa fille suffisait à tordre les entrailles du fauve, qui n'osait imaginer à quel point sa vie serait triste sans la jeune femme. Elle n'était déjà qu'un enchaînement et une accumulation de drames, mais Jora avait toujours fait office d'étoile dans la nuit noire de son existence, une étoile qui brillait plus fort que jamais à présent que son soleil de frère s'était éteint. « Quoi que ton père décide, je trouverai toujours le moyen de venir jusqu'à toi. Toujours. » A quoi bon lui promettre de la protéger, s'il baissait les bras à la moindre déconvenue ? Peut-être n'était-il qu'un colosse de cristal, mais pour elle il était prêt à toutes les folies, mêmes celles qui pourraient lui coûter la vie. Si leurs places avaient été inversées, elle aurait fait de même... n'est-ce pas ? Ehvan eut toutes les peines du monde à laisser Jora s'éloigner, comme si elle risquait de lui échapper à tout jamais en s'écartant. La caresse sur sa joue le rasséréna, et ses prunelles azurées accrochèrent celles de la demoiselle, dans lesquelles il aurait adoré se noyer. Les belles paroles de Jora auraient pu suffire à le regonfler d'orgueil, mais avant qu'il n'ait pu ouvrir la bouche pour la remercier d'avoir une telle foi en lui, elle planta un baiser sur la commissure de ses lèvres. Ehvan crut un instant que son cœur avait éclaté, une vague de chaleur traversa sa physionomie avant qu'un frisson ne l'électrise et il se trouva à fixer un point devant lui, les yeux écarquillés aussi sûrement que s'il avait vu un spectre. Bien loin de s'imaginer son trouble, la belle s'étendit sur le divan et plaça sa caboche sur les jambes du jeune homme, qui pendant un instant ignora tout à fait quoi faire de ses mains. Puis, il osa en placer une sur l'épaule délicate de la petite enchanteresse, décidément douée lorsqu'il s'agissait de le déstabiliser, et la seconde vint doucement caresser ses cheveux de soie. Quand le lion reprit la parole, sa voix tremblotait légèrement, mais bien plus qu'il ne l'aurait voulu. « Je n'ai pas l'intention de m'en aller avant que l'on ne me chasse, alors... » Reste là autant que tu le veux faillit-il ajouter, or il craignait un peu trop de se laisser aller aux confidences déplacées et fort mal venues s'il gardait la bouche ouverte trop longtemps. Il n'existait rien de plus terrible que ces aveux inattendus, Ehvan ne le savait que trop bien. Et parce qu'il le savait, il préféra meurtrir son propre cœur encore davantage en les étouffant, plutôt que de prendre le risque d'effrayer Jora qui se dépêtrait déjà dans bien assez d'horreurs.

L'annonce du trépas prématuré de l'héritier de Lord Dralvur le laissa... indifférent. Il avait vaguement côtoyé le défunt, et s'il l'avait trouvé tout à fait convenable, ils n'avaient pas été proches. Ils auraient certainement pu l'être en d'autres circonstances mais les dieux leur en avaient prêté d'autres. Sans doute Ehvan se serait-il senti plus désolé, peut-être même plus triste s'il n'avait pas été à bout de ce qu'il était humainement possible de ressentir sans basculer dans la folie. « Je suis navré. » se contenta-t-il de dire, simplement parce qu'il savait qu'il manquerait à Jora. S'il avait dû verser une larme pour chaque innocent, chaque valeureux guerrier tombé depuis que la trinité infernale s'était élevée, il se serait trouvé aussi sec que le Cimetière de Jaspe. Les paroles de la jeune femme éveillèrent une rage sourde dans l'esprit du jeune homme, qui préféra retirer ses mains de sa personne pour les poser de part et d'autre du divan. Immédiatement, ses doigts accrochèrent le velours, qu'il lacéra involontairement. Lui non plus ne voyait pas la petite oiselle au bras d'un Ravncrone, les corbeaux n'en feraient qu'une bouchée. Les alliés du roi n'étaient toutefois pas le nerf du problème. Hulgard pourrait promettre Jora au plus respectable des hommes de tout Middholt qu'Ehvan n'aurait pas été plus ravi. Et à présent qu'elle était princesse, ce n'était certainement pas l'homme le plus respectable que le souverain chercherait, mais bel et bien celui à travers lequel l'union lui apporterait le plus... Cela suffisait à lui faire grincer des dents. Plus que jamais, il maudissait ses envies de justice, sans elles il serait resté sagement dans le dos de Synric, mais surtout... il aurait fait un parti plus que convenable pour son amie. À présent, il n'était même plus question d'y songer. « Si j'étais resté à ma place au lieu de jouer les héros, peut-être que nous – » Bénis soient les deux imbéciles qui vinrent frapper à l'huis, et interrompirent le Clanfell avant qu'il n'ait eu une parole malheureuse.

Plus droit qu'une lance et anxieux, il attendit que les deux importuns passent leur chemin... ou ne décident d'entrer malgré le verrou fermé. L'ancien capitaine ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel au bruit des pas qui s'éloignaient. « J'ai bien du mal à croire que ces idiots ont un jour été sous mes ordres, et pire, que je leur ai offert la place qu'ils occupent aujourd'hui... » S'étaient-ils vraiment attendus à ce que Jora leur réponde ? Si elle les fuyait, elle n'allait pas leur indiquer l'endroit où elle se cachait si bêtement ! À leur place, il aurait au moins tenté d'ouvrir la porte. Et s'il l'avait trouvée fermée, il n'y aurait eu aucun doute à avoir. « Le roi ferait sans doute mieux d'inspecter sa garde au lieu d'épurer la cour, cela lui épargnerait sans doute de bien vilaines surprises à l'avenir. S'il devait t'arriver malheur à cause de ces incapables, je me chargerais moi-même de leur sort... » Et comme ses promesses, ses menaces n'étaient pas à prendre à la légère ; il n'avait toujours qu'une parole. « Je me demande... Crois-tu que ton père... Crois-tu que ton père m'accorderait son pardon, si j'allais le lui demander ? Synric ne veut plus de moi à Fortrekke pour le moment, comme si je risquais de jeter davantage l'opprobre sur notre nom. Et je me vois fort mal coller aux basques de ma sœur pour faire amende honorable... Mais je ne peux pas m'effacer et faire comme si je n'existais pas. » Il existait, pour son propre malheur avant celui de quiconque. Et si ce n'était pas assez désolant, il était né dans une famille dont la renommée n'était plus à compter, ses frasques ne seraient pas oubliées de si tôt. « Je préfère encore affronter le courroux de ton père plutôt que de laisser la rumeur salir mon nom... Plus qu'il ne l'est déjà, j'entends. Après Ehvan le Maudit, Ehvan le Parjure... Je ne voulais manquer de respect à personne, je ne voulais défier personne, je voulais simplement faire ce qui était juste... Il semblerait que j'aie été Ehvan l'Imbécile, quoi que tu puisses en dire... » Ehvan ne pouvait-il être simplement Ehvan, ou Ehvan le Jeune Lion ? Fallait-il toujours que son nom soit synonyme de malheur ? C'était navrant, désolant. Il soupira longuement, et passa une main sur sa mine fatiguée. « Je ne sais pas, je ne sais pas... Que devrais-je faire, Jora ? Toi... que ferais-tu ? »


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyDim 25 Mai - 14:12




E
n proie à l'ineptie, les factionnaires de la Garde Royale s'étaient réellement attendus à ce que la princesse fasse écho à leurs voix, leur révélant par la même occasion sa localisation exacte. S'ils quêtaient pour elle, elle se demandait s'ils avaient osé référer de son innocente mais pas moins frasque au souverain son père, qui se rongerait inéluctablement les sangs de ne la savoir sous aucune veillance digne de ce nom. Car en tournant le râble à des injonctions pourtant élémentaires, Ehvan n'était plus à même de remplir cette tâche, et bien placé pour connaître la duplicité que tout quidam était enclin à jouer, Hulgard se méfierait. Plus de confiance en la peut-être allégeance controuvée du benjamin Clanfell, et il en serait ainsi jusqu'à ce que ce dernier ait labouré cieux et landes pour redorer son essence chevaleresque et lui prouver son utilité à défaut de son intellect. Car Jora l'avait entendu, honnir l'acte fou de l'ancien capitaine entre les mains duquel il avait jadis placé le bien-être de sa fille unique. Alors, elle priait les déités de chaque saison pour qu'il n'ait pas été mis au fait, au moins pas avant que le jeune lion soit hors du palais, loin du potentiel courroux royal. Le binôme camouflé dans le boudoir fit silence, les prunelles rivées sur l'huis en bas duquel mouvaient les ombres des sentinelles en enquête, et pour leur plus grand soulagement, il les virent bientôt disparaître, le bruit des foulées et des cuirasses s'estompant dans les corridors froids de Jernvugge. Le souffle jusqu'alors bloqué dans les bronches de la donzelle s'extirpa par la carne de ses lippes rosées, qu'elle se mordilla ensuite dans un élan d'anxiété à peine balayé par le trait d'esprit cruellement véridique du sigisbée. Elle soupira un succinct ricanement, clairvoyance et intelligence ne valsaient pas toujours ensemble, mais si ces bougres occupaient une telle place d'importance, c'était que leurs facultés avaient véritablement été appréciées par celui qui les dénigrait aujourd'hui. Redressée en position assise, la jouvencelle serra doucement la paluche du fauve meurtri pour le réconforter de sa tendresse là où les vers étaient peu probants. « Celui qui désirerait m'atteindre aurait bien plus que ces quidams à leurrer, tu n'as vraiment pas à te faire du mauvais sang pour ma sécurité. S'il y a bien une chose que mon père a toujours su assurer, c'est bien elle... » A défaut d'autres choses, mais elle n'avait plus le panache de se lamenter à voix haute.

La belle obliqua sa jolie truffe vers son interlocuteur lorsqu'il reprit, et l'interrogation tant l'information que ses paroles portèrent la laissèrent pantoise. Elle ne sut si elle devait tout d'abord frémir à l'idée qu'il confronte son paternel ou s'indigner face à la décision de Synric. Elle scruta le textile ocellée du divan tout en prêtant l'oreille à l'argutie du chevalier, dont elle comprenait la volonté de ne pas choir dans l'omission et l'inanité les plus totales. Sa kyrielle de sobriquets tous plus affligeants les uns que les autres écorchèrent l'organe qui pulsait dans sa poitrine, et quant à se mettre à sa place et conjecturer sur les actes qui auraient été les siens, elle fut prise de court. « Je... je ne sais pas... je ne suis pas à ta place, c'est difficile... » L'Ebonhand se remit convenablement, l'échine épousant le dossier de velours tandis qu'elle semblait projeter le théâtre de ses pensées sur le mur adjacent. « Mon père est un homme rancunier, il n'oublie jamais les accrocs de ceux qui ont failli à le servir... Je suis persuadée qu'il t'aurait fait exécuter si tu n'avais pas été un Clanfell, pour l'exemple. Sa mansuétude n'est pas désintéressée... mais cela ne signifie pas qu'elle n'existe pas. » Elle soupira lourdement, des mèches argentines chutant sur les flancs de son faciès. « Il sait parfaitement que tu es un excellent bretteur et , même si cela me débecte de le dire ainsi, tu pourrais encore lui être utile. Je... suppose qu'il t'offrirait ta chance si tu le lui demandais, mais ce n'est certainement pas à mon service qu'il te mettra le cas échéant. Si tu veux regagner un semblant d'estime, il te faudra faire profil bas, c'est tellement injuste... J'en suis outrée mais... si tu penses qu'il s'agit de la meilleure chose à faire, sache que je te soutiendrai. Et lorsque les choses se seront un tant soit peu calmées entre lui et moi, j'appuierai ta requête, bien que je ne t'en garantisse pas le succès... » C'était malheureusement tout ce qu'elle était encore apte à lui ployer, un soutien émacié dont elle n'était pas certaine du profit.

La nymphe se laissa choir contre l'épaule de l'adonis, sa tempe caressa suavement la courbe musculeuse et elle s'imprégna en silence de sa compagnie, avant de déclarer, désenchantée. « Je n'en ai pas envie, mais il va falloir que je regagne mes appartements, je n'aimerais pas que tu aies à payer mon hardiesse. Tu as suffisamment à souffrir comme cela. » Elle lui accorda une risette chagrine, baissa un instant la tête puis se leva, entraînant Ehvan avec elle dans sa mouvance. Une fois au pas de la porte, elle s'immobilisa pour l'étreindre avec précaution, tout en sachant qu'il s'agissait probablement de leur dernier conciliabule digne de ce nom. Elle ouvrit ensuite la porte, et l'infortune voulut qu'ils échouent nez-à-nez avec un protagoniste de haute prestance. Devant eux, s'arrêta subito Hulgard, majestueux de sa tunique d'ébène et d'ivoire estampillée de la Main de Nacre. Si l'on retrouvait irréfutablement l'harmonie maternelle sur les traits de Jora, elle avait en revanche hérité de ce crin opalin inhérent aux Ebonhand que le monarque exhibait plus que fièrement. Ses yeux d'un jade perçant jaugèrent la naïade, avant de se poser sur l'ancien capitaine avec plus d'austérité. D'un geste de la main, il invita sa fille à le rejoindre, ce qu'elle fit, les mirettes basses et sans prononcer un traitre verbe. Les phalanges royales effleurèrent la joue pouponne, puis se glissèrent dans son échine pour l'emmener avec lui en direction de l'Aile du Dragon précipitamment désertée. Plus un regard pour le jeune lion, qui se ferait escorter jusqu'à la sortie par les gardes qui avaient accompagné sa Majesté.



 A flame of oath ♤ Ehvan 759759sep



C
'était un cauchemar à la teinte écarlate, le pire de tous les diables avait fait de Jernvugge ses tréteaux infernaux et elle était devenue une pièce de choix. Echec au roi, sur l'échiquier de la politique, et la tête de l'ancien despote avait chuté de son socle. Le Freux avait arraché la phalange majeure de la Main, profitant que celle-ci soit devenue souffreteuse suite à un mal inconnu pour la provoquer en duel dit singulier. Ils avaient joué de taille et d'estoc, sous les oeillades attentives et les respirations retenues de toute la cour, sous la peur impuissante de la princesse qui avait dû contempler le crâne de son géniteur s'éclater la boite sur les marches du Trône de Jais. La physionomie entaillée en deux parts inégales, les calots presque exorbités et une expression indiciblement horrifiée à jamais niellée sur ce visage qui plus jamais ne s'animerait. Tout n'avait été que hurlements à défaut de pleurs, pour la seconde fois, Jora avait vu son univers s'écrouler, et c'étaient les bras de Dralvur qui l'avait retenue de bondir sur Jorkell pour venger la mémoire de l'effigie tout juste occise. Après que sa famille ait tout remporté, elle avait désormais tout perdu, derechef, répétant une histoire maudite nonobstant tous les efforts déployés. Lors d'un instant, elle avait cru que sa lignée s'éteindrait ce jour-ci, que le nouvel Usurpateur la ferait exécuter pour sonner le glas des Ebonhand, mais il avait fait pire encore. Du palais qui était devenu son logis, il en avait fait sa geôle, et avait sommé à ce que l'on claustre l'oiselle dans ses appartements. Qu'adviendrait-il de l'innocente dont la populace avait déjà fait un symbole d'espérance, de quoi serait fait demain, quelle tribulation s'élèverait en même temps que l'aurore pourpre ? Littéralement dévastée, la jouvencelle se sentait seule avec son anathème, réduite au silence et à la captivité avec les ignominies d'Askevale encore en mémoire. Si deux années auparavant, elle avait candidement cru vivre la pire période de son existence, elle s'était vraisemblablement fourvoyée, mais cette fois, n'y aurait plus de père pour la protéger et oeuvrer à sa place. La docile demoiselle s'était transformée en louve furibonde et assoiffée de vendetta, chaque seconde était propice à épancher sa rage pernicieuse de quelque façon que ce soit, nul n'était épargné de ses hurlements de bête blessée. Des cris vains, pourtant, car si tous l'entendait, personne ne l'écoutait réellement.

Exceptionnellement, la princesse aujourd'hui déchue avait eu l'agrément de sortir de sa cage pour se rendre auprès du Ravncrone avec lequel la conversation avait tourné court, la haine viscérale encore trop exacerbée pour qu'elle soit à même d'endurer sa présence avec quant-à-soi. C'était donc en direction de ses appartements qu'elle se redirigeait, cernée et harassée, recrue dans un mutisme exsudant le fiel, tandis que la talonnait une cohorte de roquets dont les plastrons étaient ornés de la Corneille. Dans un geste fortuit, elle égara son regard en contrebas, et aperçut un imposant galbe traverser le hall d'un pas décidé. Et cette crinière féline, elle l'aurait reconnue entre mille... « EHVAN !! » Sa voix avait dilacéré le silence pesant des lieux dans un éclat de détresse. Avec prestesse, elle parvint à se dérober à ses sentinelles le temps de progresser dans le couloir et de réapparaître d'un autre côté, attrapant la barricade du balconnet comme si elle avait l'intention de se précipiter dans le vide pour le rejoindre. « Ehvan !! »

Revenir en haut Aller en bas
Ehvan Clanfell

Le Jeune Lion

Ehvan Clanfell
Le Jeune Lion
Afficher
ARRIVÉE : 15/04/2014
MURMURES : 463



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyLun 2 Juin - 18:42

Il avait servi Hulgard suffisamment longtemps pour savoir que l'homme était de nature rancunière. Qu'importait qu'il se jette à ses pieds en l'implorant, il ne lui concéderait pas son pardon aussi facilement. Et certainement pas maintenant qu'il s'était rendu jusqu'à l'Aile du Dragon sans autorisation, dans le seul et unique but de voir sa fille unique. S'il avait commis une bévue en osant tenir tête à Synric et par la même occasion aux Ebonhand et Ravncrone, en venant retrouver Jora il avait dû achever de tuer toute l'estime que le souverain avait pu un jour avoir pour lui. Cela en avait-il valu la peine ? Sans le moindre doute. Il s'était langui de la retrouver aussitôt qu'il avait quitté Sylarne et Fortrekke et rien au monde ne lui aurait fait regretter de s'être précipité jusqu'à elle. Sa naïveté avait beau être ce qu'elle était, il savait que ce moment passé avec la princesse était peut-être le dernier avant bien des lunes et rien que d'y songer, il était furieux. S'il avait su que son entreprise... héroïque était destinée à échouer, il serait resté à sa place, aurait brillé comme Synric aux yeux d'Ebonhand et... entrevoir la réalité qui aurait pu être mais qu'il avait involontairement tuée de ses mains lui retournait l'estomac et lui fendait le cœur. Dans ce flot d'épreuves et d'horreurs, trouverait-il jamais un rocher auquel se raccrocher, ou était-il condamné à la noyade ? Il n'en avait pas la moindre idée et manquait cruellement de clairvoyance à ce sujet. Il avait déjà perdu le sommeil, la raison ne tarderait pas à suivre si la Fatalité continuait à s'acharner sur le petit fauve, qui n'avait pas connu un jour de répit depuis le triste jour de sa naissance. Inutile donc d'espérer une quelconque absolution de la part de son tout nouveau souverain, c'était encore bien trop tôt. Par les dieux, Synric lui-même l'avait chassé de leur tanière, comment avait-il pu espérer un seul instant la clémence d'Ebonhand ? Il soupira longuement et s'il l'avait pu, il aurait expiré sa misérable existence en même temps qu'il recrachait l'air de ses poumons. « Je vais me faire discret. Disparaître un temps, peut-être. J'ai perdu mon laissez-passer pour Fortrekke, peut-être devrais-je en profiter pour découvrir les belles contrées de Middholt... » Un rire triste le secoua et tandis que Jora posait sa tête contre son épaule, il passa un bras autour d'elle et se pencha pour déposer un baiser sur sa chevelure opaline. « Je vais faire profil bas, je vais... disparaître pour un temps. Mais je ne serai jamais bien loin de toi. C'est promis. » Aussi avilissante que soit l'image, Jora n'aurait eu qu'à le siffler pour qu'il accoure, comme un lion bien dressé.

Le jeune lion fit la grimace lorsque la princesse, très raisonnablement, lui fit remarquer qu'elle ferait mieux de regagner ses appartements avant que son paternel ne vienne lui même les déloger de leur boudoir. Son palpitant subitement plus lourd qu'à l'accoutumée chuta dans ses talons et c'est la tête bien basse qu'il suivit la jeune femme jusqu'à l'huis. Lorsqu'elle l'étreignit, il put sentir sa gorge se serrer jusqu'à lui donner l'impression qu'on l'étranglait et il dut battre des paupières pour chasser les larmes traîtresses qui cherchaient à trouver le chemin de ses joues. Tu vas tellement me manquer, faillit-il dire, mais la belle le prit de court en ouvrant la porte. Et puisque décidément ils jouaient de malchance, ce ne sont pas aux gardes qu'ils durent faire face, mais bel et bien à Hulgard. Si celui-ci dévisagea Ehvan avec une froideur non dissimulée, le regard que le Clanfell lui rendit ne fut guère plus chaleureux. L'envie d'arracher la demoiselle à l'étreinte corrosive de son père lui effleura l'esprit mais il se ravisa et prit congé à son tour, non sans avoir grogné à la barbe des gardes qui avaient pour ordre de le raccompagner, et certainement de s'assurer qu'il s'en était bel et bien allé.


 A flame of oath ♤ Ehvan 962983line

La poix enflammée qui avait dévoré ses chairs et l'avait cloué dans un lit de douleur des semaines durant n'était rien en comparaison de la lave qui bouillonnait à présent dans ses veines. L'ire menaçait de le consumer tout entier, Ehvan Clanfell avançait dans la cour du bien nommé Usurpateur comme l'aurait fait un brasier animé. L'emblème des Ravncrone était fort mal choisi, c'était une vipère assassine que Jorkell aurait dû nieller sur son poitrail ! Lui, qui n'avait aidé Ebonhand à s'élever que pour mieux le jeter à bas de son trône à peine celui-ci gagné. Il n'avait pas gagné de duel, il n'avait fait qu'assassiner lâchement un homme malade et déjà bien faible. Pis encore, le nom du jeune lion était à présent associé à celui de la couronne, puisqu'à travers sa peste de sœur, les Clanfell régnaient sur Ibenholt. Mais plutôt que d'enorgueillir le cadet de la fratrie, cela lui donnait envie de rendre ses tripes aux pieds de tous ces parjures avides de pouvoir, dont les jumeaux Clanfell faisaient hélas partie. Non content d'être rongé par une furia encore inédite, la culpabilité de n'avoir pas été auprès des Ebonhand lorsque Jorkell avait fait démonstration de sa félonie ne cessait de lui marteler le crâne. Une fois de plus il avait été absent, cette fois-ci abruti par la douleur insupportable des brûlures de son dos, que seuls les plus puissants des opiacés avaient pu faire taire quelque peu pour lui permettre de se reposer, mais surtout de ne pas céder à l'envie de se défenestrer pour mettre un terme à ses souffrances.

Condamné à l'inaction, il n'avait eu vent des tragiques événements qu'une fois ses esprits malmenés retrouvés, et malgré les recommandations d'Irinwe et des autres guérisseurs, il s'était remis en selle aussitôt qu'il avait été en état de tenir sur ses pieds. La rage s'était bien vite substituée à la douleur, et lorsqu'il s'était présenté à la cour de l'Usurpateur, il avait bien cru que l'on se moquait de lui. Ce cher Synric, devenu conseiller du roi, lui offrait de reprendre son ancien poste de Capitaine de la Garde Royale. Son infinie bonté, Ehvan avait eu vite fait de la lui faire ravaler, tout comme son pardon hypocrite. Plutôt mourir dans la boue comme un roturier plutôt que d'être le complice de ces atrocités. Il n'était plus le petit garçon adorateur de son aîné, Synric pouvait bien le caresser dans le sens du poil autant qu'il en avait envie, il en avait fini avec lui. Avec lui, avec Sylarne, avec sa maison dans sa totalité. Le jeune lion transpirait l'envie de meurtre, et quiconque se trouvait sur sa route avait tôt fait de s'en écarter pour ne pas être piétiné. Il rêvait d'éviscérer Jorkell à mains nues pour ce qu'il avait osé faire aux Ebonhand. Non content d'avoir assassiné Hulgard pour ensuite voler son trône, il avait fait de Jora une captive et cela, Ehvan ne pouvait le tolérer. Il lui avait juré sur son honneur de la protéger et d'être toujours là pour elle, et si pour cela il devait réduire tous les partisans de Ravncrone à un tas de chairs sanguinolentes, jumeaux aînés compris, eh bien soit !

Et ce fut justement le cri de la princesse déchue qui le fit sursauter alors qu'il était justement en chemin pour exiger sa libération immédiate, faute de quoi il se salirait les mains sans le moindre remord. Il leva les yeux et l'aperçut au balconnet, et la détresse de son appel le fit chavirer. « Jora... JORA ! » Il chercha prestement un moyen de la rejoindre, mais ne trouva  nul chemin pour lui, nulle échappatoire pour la jeune femme. Et lorsqu'il vit les Corneilles surgir dans le dos de la belle pour ensuite l'attraper avec brusquerie, son cœur loupa un battement, et son sang ne fit qu'un tour. « Ne la touchez pas !! JORA ! Espèces de pourritures... ! » De toute son existence, il n'avait jamais eu tant envie d'étriper de pauvres hommes qui, finalement, ne faisaient que suivre les ordres qui leur avaient été donnés. Et ce fut à cet instant qu'il comprit que seul, il n'avait pas la moindre chance de la libérer, que s'il osait lever un doigt contre l'Usurpateur à cet endroit, Clanfell ou pas, il finirait sur le billot avant d'avoir pu tenir sa promesse. « Je trouverai le moyen de te libérer, je te le jure ! Je ne te laisserai pas seule dans ce nid de vipères, je t'en fais la promesse ! Je trouverai un moyen ! » Il se ferait le fer de lance de sa cause, dirigerait toutes les opérations rebelles s'il le fallait car il le savait, ils étaient nombreux à soutenir l'héritière légitime du trône et à vouloir se débarrasser de l'Usurpateur. « Je ne t'abandonnerai pas, jamais, je reviendrai aussitôt que j'aurai trouvé le moyen de te secourir... ! » Déjà, il priait les dieux de leur accorder leur aide, les implorer de bénir son expédition future et leur promettait de leur vendre son âme en échange de la liberté de Jora. Il égara un regard autour de lui, sur les factionnaires qui l'observaient en se grattant le menton, sans trop savoir quoi faire de cet énergumène qui faisait mille promesses à l'héritière Ebonhand en s'égosillant. Il serra les poings, et fort de sa détermination, se permit l'ultime blasphème. « Et je te servirai la tête de Ravncrone sur un plateau d'argent avant de t'asseoir sur le trône, j'en fais le serment ! »


FICHE PAR ELBERETH.

Revenir en haut Aller en bas
Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
Perle de Nacre
Afficher
ARRIVÉE : 26/03/2014
MURMURES : 725



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan EmptyLun 9 Juin - 0:27




E
lle aurait voulu prendre son essor, même s'il devait être le premier et le dernier de sa courte existence, sauter pour mieux le rejoindre et trépasser dans ses bras. La mort lui semblait être une panacée plus douce encore que la vie de captive qui lui était désormais promise, car les dieux seuls savaient combien de temps son assujettissement durerait. Peut-être ferait-elle bientôt partie de l'héritage Ravncrone, la captive qu'ils se transmettraient de génération en génération, elle qui était animée du feu du Midi. Un vulgaire trophée qui sombrerait dans l'omission de tous, et la lignée Ebonhand mourrait avant même que son ultime représentant n'ait passé l'arme à gauche. Le futur n'avait jamais été aussi lugubre, ce n'était qu'une tempête sans déclin qui s'annonçait à l'horizon, et elle implorait Ehvan d'y faire quelque chose. Qu'il trouve la clé de sa cage et lui en ouvre la porte, qu'il l'emmène avec lui, n'importe où, de l'erg isolée aux steppes glacées, mais loin d'ici. Loin de ses bourreaux, loin du rictus triomphant de Jorkell. Mais la fatalité ne lui autorisait qu'à effleurer son utopie du bout des phalanges pour mieux envoyer les démons agricher ses chevilles, et la ramener dans le vortex infernal duquel elle cherchait la sortie. Les gardes de la Corneille eurent trop tôt fait de la rejoindre et de lui sauter sur l'échine, bramant quelque avertissement et injonction que Jora n'entendit point, trop occupée à se débattre, trop occupée à ne pas perdre le lion de vue. Elle parvint à s'accrocher au rebord du balconnet pour demeurer un instant supplémentaire, suffisant pour ouïr l'aubade dévouée du chevalier dont elle n'avait plus profité de l'étreinte depuis une éternité. La peur et la supplique se lisant sur les moindres traits de son minois dévasté, un milliard d'astres solennels luisant dans les cieux de ses mirettes, elle niellait les mots du serment explicite dans les replets de son esprit et ceux de son coeur. Une flamme d'espérance dans la noirceur du monde, le sigisbée n'avait jamais eu son pareil pour ce faire. Cependant, cette fois, les vers ne seraient pas assez pour pacifier ses craintes les plus criardes, et à présent qu'il avait rugi ses desseins à même la cour du nouvel usurpateur, il était plus en danger que quiconque. Et pourtant, dans l'égoïsme juvénile, dans la phobie innocente, elle ne put se résoudre à l'idée qu'il l'abandonne en ces remparts qui n'étaient plus chez elle – qui ne l'avaient peut-être jamais été. « Ehvan !! Ne me laisse pas, je t'en prie, ne me laisse pas ! » Hurla t-elle à son tour, éplorée, ne réprimant plus les perles saumâtres qui rougirent ses prunelles et déposèrent une saveur plus amère encore sur ses papilles, puisque naviguant jusqu'aux commissures de ses lippes. « Pitié Ehvan ! EHVAN !! » Les paluches d'un factionnaire lui saisirent les poignets et l'arrachèrent à son juchoir, ils furent plusieurs à la soulever de terre et à l'immobiliser pour mieux l'emmener dans ses appartements. Et dans les corridors, résonnèrent encore les glapissements désespérés et enragés de l'oiselle, qui appelait pour son bienfaiteur.

Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé



Afficher



 A flame of oath ♤ Ehvan Empty
MessageSujet: Re: A flame of oath ♤ Ehvan    A flame of oath ♤ Ehvan Empty


Revenir en haut Aller en bas
 

A flame of oath ♤ Ehvan

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 

Page 1 sur 1

 Sujets similaires

-
» EHVAN ϟ the lionheart
» EHVAN ϟ hear me roar
» EHVAN ϟ I would rather be an honorable man than a powerful one (terminée)
» Jora et Ehvan prennent des vacances

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
FROSTFALL :: Épilogue :: Archives Rp-