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 Roses with steel thorns [PV Blaze]

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Sylarne Clanfell

Reine consort d'Ibenholt

Sylarne Clanfell
Reine consort d'Ibenholt
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MessageSujet: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptyMar 8 Avr - 2:01

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sylarne clanfell & blaze blackthorn
  Roses with steel thorns
 
L
e jais coruscant des tourelles flanquées de l'oriflamme écarlate avait toujours ancré en elle le seing anachorète du patriarche Clanfell et derrière ses prunelles auréolées de véronèse, le sceau de réminiscences qu'elle aurait volontiers chassé du parchemin de ses jours. La souveraine s'autorisait si peu souvent cette capricante visite qu'elle en avait oublié les moirés oripeaux damasquinés du lion hivernal qui coulaient comme cascades vermeil du faîtage carbone, drapés sanguins qui relevaient de leur caresse l'équerre des parapets et l'affiquet ouvragé des balustrades. Il y avait longtemps qu'elle ne portait plus le deuil du géniteur qui s'était éteint en ces murs devenus cénotaphe, il y avait longtemps qu'elle ne s'abandonnait plus à déliquescente caresse de la lassitude ou qu'elle regrettait les affres d'une jouvence passée à hanter les coursives en murmurant le lamentatio qui incombait à une jumelle qu'on avait séparée de sa moitié. Derrière les croisées, elle ne devinait que la vacuité, que l'aseptique contumace qui n'avait que trop bu l'absence des Clanfell et, depuis le départ d'Ehvan, l'illustre résidence ne s'était nourrie que de silence, jusqu'à vomir inanition et dépeuplement. Et pourtant, la vigie veillait toujours, engoncée dans une pèlerine brodée du lion et enluminée de grenat, comme s'il restait entre les enceintes quelques cœurs fauves à cuirasser. Le fiacre s'ébranla pour mieux s'immobiliser et la reine en émergea, diaprée de soies rubescentes et couronnée de sa crinière flave qui s'étiolait sur ses épaules couvertes. Derrière elle, quelques caudataires courtisans, quelques gardes ourlés de l'écarlate et une poignée de cerbères parés de la violine corneille. Un sourire mouillé de cynisme sculpta sa lippe alors qu'elle adressait aux guetteurs Clanfell l'ordre de lui ouvrir la lourde porte avant de les congédier d'un geste élusif. Elle ne savait que trop bien que les roquets Ravncrone ne la laisseraient pas exempte de leur accaparante présence, se chevillant à ses pas comme on escortait un captif jusqu'au ventre famélique de l'ergastule. Et elle n'attendait pas moins de zèle de leur part, en dociles séides de l'Usurpateur qu'ils étaient. La lionne saurait bien se délester des importuns cerbères en temps et lieu, mais pour l'heure, de pressantes affaires meublaient ses pensées et l'écho retentissant de ses pas ne faisait qu'estamper les parquets de son impatience à régler rapidement les entreprises qui lui échoyaient en l'absence de Synric. La loggia se déclinait en nuances de cinabre et de bis et partout se gaussait le lion, buriné sur l'âtre dont la gueule bée exhalait flammes rougeoyantes, frappé sur le fil métallique des rapières d'apparat dont les reflets chamarrés s'improvisaient réflexions spéculaires de l'astre diurne, gravé jusque sur les calices et façonné dans le bois ligneux du mobilier en figures léonines toutes griffes et crocs dehors. « Laissez-moi. Pas vous, Blaze. »


U
n mois que la fille Blackthorn jouait les sentinelles pour l'héritière Clanfell, un mois que cette femme l'intriguait tout autant qu'elle la fascinait. Certes, l'amazone souffrait des lazzis de tous les courtisans et l'hommasse de ses traits lui attirait d'avilissant quolibets et de turpides exégèses. Gloses que partageait peu la reine et la fauve n'avait rien à faire des foucades de tous ces mignards et des enfantines fadaises qu'imaginaient les pathétiques familiers qui essaimaient à la cour. S'il y avait bien un seul précepte qu'elle partageait avec Ehvan, c'était celui qui délestait les gens de l'étendard du sang pour y substituer l'épée des actes et pour la reine comme pour les Clanfell, le substrat couperosé n'était garant ni de noblesse ni d'accessit. Les allégeances, elles, s'avéraient changeantes, labiles, muées par une cyclothymie implacable. Et si les Blackthorn avaient autrefois été feudataires des Ebonhand, ils avaient désormais lié leurs intérêts à ceux du lion des neiges. Sylarne veillerait à ce que cette fragile alliance devienne pérenne. Elle se servit une coupe de vin, laissant le liquide grenat pleuvoir sur le cristal avant d'en servir une à sa guetteuse et de lui tendre d'une main leste. Quand ses lèvres s'arrimèrent au calice, elle ne put que savourer en silence la lénifiante empreinte du crû alors que devant ses prunelles s'ouvrait le théâtre de pénibles réminiscences. « La dernière fois que je suis venue dans cette loggia, c'était pour y faire la rencontre de mon futur époux, le roi. » Comment occulter cette méprisable immixtion dans sa vie, comment oublier la facilité avec laquelle son propre géminé l'avait cédée à cet homme comme si elle n'était que terre en friche, alleu à essarter et à ensemencer sans déférence ? Oh, elle se rappelait la frigide étreinte de ses doigts contre le vélin de sa peau, le baiser corrodant de ses lèvres marmoréennes, lippes au sérac révulsant qui s'étaient attachées par procuration à son être pour la laisser amorphe, léthargique fiancée qui se voulait domptée par les convenances et apprivoisée par les protocoles. Et la férale lionne, dans cette cérémoniale rencontre n'y avait vu que les frontières d'un clapier qu'on faisait s'abattre sur elle comme un surin entre ses vertèbres. Cet homme, elle l'avait haï dès le moment où il avait pétri ses lèvres de sa bouche ombragée de crins rêches, chassant de son souffle méphitique ce qui restait des baisers de Synric, dispersant les vestiges de sa tendresse filiale et diffractant les épars faisceaux de cette dilection fraternelle. Et quand il eût résilié les dernières primautés de son frère, réclamant sa souveraineté sur chaque parcelle de son corps, comme on réclamait un héritage issu d'un contrat, elle sut qu'elle n'affectionnerait jamais cet homme. Ses yeux s'éprirent de l'incarnadin qui reposait dans sa coupe. « Le devoir, l'honneur. Les hommes n'affectionnent comme bijoux que ces glorieux oripeaux. Et que nous reste-t-il à nous ? » Un soupir émailla ses lèvres, se fondant dans un rayon de lumière diapré qui buvait chaque particule pour en recracher flavescents corpuscules. Elle ne s'était pas retournée face à celle qui partageait sa solitude et cette neurasthénique logorrhée. Tout n'était que rhétorique et pourtant, elle aurait bien aimé qu'on lui fournisse réponses à ses apories. « Devoir et honneur. Le premier poussa Hulgard et Jorkell à jeter cadavres exsangues dans les venelles. Le second les obligea à appeler justice ce que tous auraient nommé carnage. »


S
ylarne s'émancipa enfin du bourbier de ses pensées, trouvant refuge sur une méridienne drapée de soies rubescentes. Elle leva sur Blaze l'émeraude interrogateur de ses mirettes, goûtant une fois de plus au grenat enivrant qui valsait dans sa coupe. Les murs de Fortrekke avaient l’intrigante qualité de retenir les vaporeuses réminiscences pour en laisser filtrer la bruine et dans cette loggia, la reine ne se sentait plus chez elle. Il lui semblait qu'un siècle s'était écoulé depuis qu'elle s'était arrachée au berceau de grès qui l'avait vu naître, depuis qu'elle s'était extirpée du ventre de l'alma mater pour ne plus y revenir qu'en inconnue. « Un mois s'est écoulé depuis que vous avez été affectée par mon frère à mes côtés et pourtant je ne sais rien de vous. » Le sarcelle de ses prunelles s'était rivé aux siennes et elle esquissa un sourire, un de ces rares qui brûlait de sincérité plutôt que de caustique cynisme. « Avez-vous, comme moi, vu les flammes lécher les échines, les bouches n'exhalant rien d'autre que les cendres du trépas, les corps disloqués par la folie des uns et l'inaction des autres ? » Cette fois, la morgue claquait ses aspérités tranchantes sur sa lippe alors que son regard se perdait dans les aléas abscons d'une mémoire troublée. « Parfois je crois que j'y suis pour quelque chose et sachez qu'aucun crépuscule ne me préserve du talion des regrets. Hulgard, Jorkell et Synric planifiaient déjà cette hécatombe dans cette même loggia. » Elle laissa ses yeux sertir chaque fronton, souligner chaque draperie avant de s'amarrer à ceux de la sera. Derrière les prunelles ombragées se glissait le poignard de l'anathème qu'elle retournait contre elle. Qu'avait-elle à perdre maintenant que les corps avaient été dévorés, les os blanchis par la langue des nécrophages et la mémoire bannie des princes et des rois ? « Un flambeau, un verrou et du cran auraient pu sauver des milliers d'innocents... »

La catharsis. Une chimère qu'elle buvait comme le vin, pour se transir.

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Blaze Blackthorn

Ronce à la Rapière

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MessageSujet: Re: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptyVen 11 Avr - 2:02

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Roses with steel thorns

la vipère & la rapière

Pourquoi étions-nous ici ? Je n'aurais jamais osé le demander à ma souveraine. Mais j'étais mal à l'aise depuis que nous étions en vue du lieu. À cheval, j'avançais contre le flanc de la calèche, le regard scrutant la route et les environs afin de m'assurer qu'aucune menace ne viendrait troubler le voyage même fort bref. Il n'y avait eu aucune encombre, fort heureusement. Tout était d'or et de rugissements métalliques. Fortrekke était imposante et tout dans le lieu respirait la grandeur, la puissance et la richesse, là où Staltistler, le fief des Blackthorn, était fait de roches et de ronces. Deux façons d'appréhender le Nord, en somme. Je suivais la reine consort comme son ombre, la main sur la garde de ma longue épée, prête à l'extirper du fourreau si le besoin s'en faisait sentir. Nous étions en terre amie, mais c'était souvent les terrains où il fallait être le plus prudent possible. Ce qui était familier endormait la méfiance et noyait les relents d'alarme. Lady Sylarne congédia l'ensemble des gens d'armes, me demandant pourtant de rester. C'était assez logique après tout, je ne la quittai pas d'une semelle depuis un mois, j'avais prêté serment à Synric de toujours faire passer la vie de sa sœur avant la mienne. Je m'en acquittais consciencieusement jusqu'à présent, et j'espérais pouvoir le faire encore longtemps. Une cape noire aux reflets de moire bleutée couvrait mes épaules carrées, façonnées tant par les entrainements au maniement des armes que par l'armure que je portais.

La porte se fermait, et nous étions seules. Un poids semblait déjà s'envoler, et les convenances protocolaires les plus strictes avec. Je la suivis des yeux avant d'emboiter ses pas. Docile, je pris la coupe qu'elle m'avait servie, murmurant un remerciement des plus déférents. Elle se remit à parler et je la laissai faire. Je n'avais jamais été très encline à la conversation. J'étais peut-être trop honnête pour les minauderies de la cour, et ça n'avait pourtant pas été peine de me l'apprendre, ma mère y avait laissé quelques cheveux blancs lors de mon adolescence. Mais avec la lionne couronnée, je me sentais en confiance. J'avais envie de parler avec elle, d'échanger et de ne pas la laisser seule à discourir. Mais pour l'heure, je goûtais le jus grenat et le savourai. Ainsi était-ce ici que le destin de Sylarne Clanfell avait été scellé ? J'avançai de quelques pas en regardant tout autour de moi, les tentures et les arches, et à chacun de mes pas, les articulations de mon armure cliquetaient.
« Le devoir, l'honneur. Les hommes n'affectionnent comme bijoux que ces glorieux oripeaux. Et que nous reste-t-il à nous ? » Le devoir et l'honneur, milady, aurais-je voulu lui répondre. Mais mes lèvres restèrent scellées. À quoi bon disserter sur des valeurs qu'elle voyait comme des oripeaux ? De toute façon, elle était amère, du moins pouvais-je le conclure à son ton de voix, pour l'avoir moi-même tant entendu dans ma propre bouche après le décès de Gwaine. J'avalais une nouvelle gorgée du nectar alcoolisé et la laissais poursuivre. « Devoir et honneur. Le premier poussa Hulgard et Jorkell à jeter cadavres exsangues dans les venelles. Le second les obligea à appeler justice ce que tous auraient nommé carnage. »

Je comprenais pourquoi Ser Synric m'avait confié la tâche de veiller sur sa chère sœur. Lady Sylarne n'était pas sotte, loin de là même. Mais elle semblait révoltée à l'égard des actions passées de son époux. Nos prunelles se croisèrent un temps, et je soutenais l'éclat interrogateur qui y brillait. Devais-je, pouvais-je, lui dire comment j'avais vécu ces événements de loin ? Peut-être me demanderait-elle mon avis sur la question. Je déglutissais et me remettais à déambuler dans la vaste salle. « Un mois s'est écoulé depuis que vous avez été affectée par mon frère à mes côtés et pourtant je ne sais rien de vous. - Si votre Majesté me permet, il n'y a pas grand chose à savoir de moi. Peu de rumeurs courent, et je n'ai pas beaucoup de secrets qui pourraient vous intéresser. » Je ne disais pas que je n'avais pas de mystères dans lesquels m'envelopper, simplement qu'ils n'auraient aucune grâce à ses yeux. Je la fixais une nouvelle fois, la coupe désormais vide toujours tenue dans ma main droite. La léonine dame attendait-elle que je parle plus allant ? Elle précisa sa question, me laissant entrevoir où elle voulait se diriger. « Avez-vous, comme moi, vu les flammes lécher les échines, les bouches n'exhalant rien d'autre que les cendres du trépas, les corps disloqués par la folie des uns et l'inaction des autres ? » Quelque chose dans le claquement de sa langue, ou dans le fond de ses billes émeraudes, m'indiquait une révolte sourde, une horreur profonde face au spectacle du massacre perpétré par les soulevés guidés par Hulgard et Jorkell. « Parfois je crois que j'y suis pour quelque chose et sachez qu'aucun crépuscule ne me préserve du talion des regrets. Hulgard, Jorkell et Synric planifiaient déjà cette hécatombe dans cette même loggia. » Elle se dévoilait, sans hésiter, à sa propre ombre. J'avais juré, je ne la trahirais point. L'entendre me confier ces quelques pensées qui l'avaient traversée à ce moment si crucial m'assurait que j'avais fait le bon choix, de prêter serment aux Clanfell et non aux Ravncrone. Lady Sylarne était une femme droite, et elle n'était roublarde que par nécessités de la Cour. « Un flambeau, un verrou et du cran auraient pu sauver des milliers d'innocents... »

Le cœur gonflé de fierté de protéger une femme si noble d'âme, malgré son penchant pour la ruse et les coups en traitre, je posais la coupe sur la table et ôtais ma cape pour la poser sur le dossier d'un des sièges.
Elle voulait connaître mon histoire. En savoir un peu plus sur celle qui la suivait sans bruit.

« Je n'étais pas à Ibenholt à l'époque que vous me décrivez. J'aurais sans doute été écœurée par un tel spectacle. » "Horrifiée" était un terme plus adéquat, mais je ne pouvais pas laisser paraître d'éventuelles failles, même à ma souveraine. Devais-je tout révéler à la Reine ? Ne le savait-elle déjà pas ? « Je protégeais Lady Jora Ebonhand, sur ordre de son père, qui était mon suzerain à l'époque. Je l'avais escortée en terrain plus paisible, à Ravenhole. Mais au retour… » La mine assombrie, je me souvenais de la stupéfaction qui m'avait saisie en arrivant devant les charniers aux portes d'Ibenholt. Des corps putréfiés, brûlés, mutilés, qui pourrissaient en tas en attendant qu'on daigne les enterrer. J'avais cru que Catharis avait abandonné Ibenholt à des heures bien sombres. La patronne du Nord avait forcément dû oublier ses adorateurs pour laisser produire pareil massacre. Ou bien c'était les hommes qui étaient des monstres, des abominations auxquelles les dieux avaient donné des visages trompeurs. « Lorsque nous sommes revenues à Ibenholt, nous avons été accueillies par une odeur putrescente. Ce n'est qu'après que j'ai connu les origines d'une telle hécatombe. Et pourtant… » Je haussais les épaules, résignée face à ce présent auquel on ne pouvait plus rien faire. « Ce qui est fait est fait, et il ne sert à rien de ruminer comme vous le faites, sauf votre respect, ma dame. Rien de bon ne sort jamais des "j'aurais dû". » J'en savais quelque chose, mais je le taisais furieusement. J'essayais de me faire la dame de confiance de la Reine, à défaut d'être son amie. Quelque chose chez cette femme me donnait envie de l'apprécier, et en un mois j'avais appris à connaître ses états d'âme et ses expressions. « Certains disent que c'était un châtiment envoyé par Catharis : ceux-là veulent dédouaner les hommes qui ont mené cette action. D'autres parleront de crime infâme. Je m'efforce de ne pas porter de jugement, même si je vous avoue que le choc a été rude. Mais vous, vous étiez à Ibenholt à ce moment funeste ? Comment se fait-il que vous n'ayez pas été en lieu sûr ? » Quelle folie… pourrais-je dire, mais je me taisais.

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MessageSujet: Re: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptyMar 15 Avr - 0:04

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Roses with steel thorns

Septembre, 5E 930.

E
ssaim agité, abeilles s'affairant dans un bourdonnement incessant qui se déclinait en cliquetis métalliques plutôt qu'en agaçante acouphène. Elle était là, stoïque, une main se faisant carcan d'un hyalin calice mouillé de vermeil, le grès malachite de ses prunelles se laissant buriner par les flavescents éclats d'un soleil à l'agonie dont le substrat sanguin s'étiolait en érubescentes nuées opalines. « Lady Clanfell... » Elle ne dédaigna se retourner quand le tintement du chrome parvint à ses oreilles, encore moins quand la lourdeur de la pièce où l'oxygène se raréfiait eut porté sa déférente apostrophe jusqu'à elle. « Votre frère m'a sommé de vous faire quitter Fortrekke. Il vous ordonne de me suivre. » La léonine prunelle se détacha des flammes du ciel pour sonder l'ondée rougeoyante qui s'épanchait en tremblements imperceptibles dans le calice. Il lui ordonnait. Comme si elle avait été un de ses roquets à la laisse écarlate liserée d'argent. « Je n'ai, en cette matière, que faire des ordres de mon frère. Et je ne quitterai pas Fortrekke, dusse-t-il me supplier à genoux. » Le soupir du féal cerbère souligna sa glaciale verve alors qu'il s’apprêtait à la relancer. « Le ser Clanfell m'a enjoint d'utiliser la force si jamais vous vous refusiez à honorer sa requête. Je vous prie, ne m'obligez pas à le faire. » Bien sûr. Synric ne s'avouerait pas vaincu si rapidement. N'aurait-il pas dû, en bon patriarche et grand frère se rendre lui-même à Fortrekke pour mettre sa sœur en sûreté ? S'il n'avait pas daigné lui faire part de ses plans, s'il n'avait pas répugné à lui demander son avis, elle n'aurait pas rejeté sa demande avec autant de morgue et refusé la protection qu'il lui offrait, préférant mille fois voir son ventre déchiré par les rapières de toute la soldatesque rebelle plutôt que de se résigner, une fois de plus, à ses silences et à ses secrets. Son jumeau avait toujours préféré les brasiers de la gloire téméraire aux apyres de la calculatrice rationalité et si l'envie lui prenait de précipiter toute la famille dans les abysses de l'anamnèse par imprudence, elle préférait expier son dernier souffle avant de vivre une telle turpitude. Devant l'interdit de la frondeuse, le cerbère avait franchi les quelques pas qui les séparaient, posant une main gantée sur le parchemin de sa peau. Un bref moment avait suffi à la lionne pour dégainer la dague qui sertissait sa cuisse, désarçonnant son adversaire par la surprise avant de lui coller l'arme sous la gorge, le plaquant au mur avec une rapidité effarante. « Ne vous y trompez pas, ser Greer, je n'aurais aucun remord à ajouter un peu plus d'écarlate aux ornements du château. » La lame s'accrocha à sa gorge, juste sous la pomme d'Adam alors qu'elle exerçait une pression plus importante sur le vélin ombragé de barbe de sa peau. « Je vous fais la promesse que vous regretterez d'avoir cru que de tous les lions j'étais la moins redoutable. Contrairement à mes frères, je ne me laisse pas dompter par vos codes d'honneur et vos révérencieux principes. Maintenant laissez-moi et faites monter une amphore de myr, si je dois souffrir quelque péril autant que ce soit en bonne compagnie... »

Roses with steel thorns [PV Blaze] 962983line

L
e myr à présent avait un goût de cendre entre ses lèvres. Les murs de Fortrekke, s'ils n'avaient pas été repeints par le substrat sanguin de ser Greer, avait toutefois vu se dérouler les oriflammes anthracite d'un cynisme qui avait avalé le magma dont elle avait été subrepticement faite pour en extraire basalte immuable et déflagrations contingentes, hasardeuses. La sylphide avait-elle regretté de s'être fait sentinelle de Fortrekke, le ductile sinople de ses mirettes se lithographiant du vaudeville presque simiesque qui se jouait devant elle, buvant les burlesques tragédies qui s'étiolaient en hurlements et en souffles d'agonie dans sa poreuse conscience ? Elle ne pouvait répondre sans risquer de tanguer à la frontière de l'insanité, préférant se répéter que les remords valaient mieux que les regrets, que le vin de cendre des brasiers demeurait toujours plus buvable que la liquoreuse vacuité insouciante qu'on voulait lui faire avaler et qui agissait sur ses viscères comme un puissant émétique. Synric avait capitulé, Ehvan, l'avait abandonnée, les vigiles qui s'étaient enfuis, la peur aux tripes, avaient péri par l'estoc qu'on réservait aux déserteurs et elle y avait personnellement veillé. Et comme elle l'avait escompté, le fauve rugissant sur le gonfalon incarnat avait dissuadé tout soudard de passer les lourdes grilles. Elle n'avait pourtant jamais été plus menacée qu'en cet instant. Menacée par une incendiaire vésanie, menacée par une égrotante anxiété, menacée par une asthénique déréliction alors qu'elle s'étourdissait de dipsomanie pour oublier la désarmante absence de sa moitié et son aboulique impuissance à le savoir en vie. Et tout ce qui l'avait obsédé c'était l’obnubilante aporie qui croissait dans son encéphale troublée : en tant que jumelle pourrait-elle sentir le souffle de Synric le quitter ? Cette question l'obsédait toujours autant, même après les carnages, les trahisons, les conjurations et le retour de son géminé dans l'enceinte de la domaniale forteresse. Probablement la tarauderait-elle jusqu'à ce qu'elle pousse elle-même la péremptoire haleine de son trépas. La voix de sa suivante avait l'étonnante faculté d'anesthésier les excoriations de son âme, une embrocation plus que bienvenue dans le pandémonium qu'étaient devenus ces murs. Elle se souvenait maintenant pourquoi elle s'en était extirpée sans trop en pâtir, troquant volontiers les neurasthéniques réminiscences pour les enfiellées coursives de Jernvugge. « Je n'étais pas à Ibenholt à l'époque que vous me décrivez. J'aurais sans doute été écœurée par un tel spectacle. » Les doigts toujours rivés au diaphane cristal, elle se laissait bercer par les éthyliques cynismes que suscitait l'alcool de ses souvenirs. Écœurée était encore euphémique, la sera aurait été révulsée. « Je protégeais Lady Jora Ebonhand, sur ordre de son père, qui était mon suzerain à l'époque. Je l'avais escortée en terrain plus paisible, à Ravenhole. Mais au retour… »


R
avenhole, bien sûr. Un havre creusé à même la lithiase des falaises, un sanctuaire érodé par les vents qui, fort heureusement, n'auraient pu transporter jusqu'à la cime du monde les vagissements des mères qu'on séparaient de leurs enfants, les gémissements des fratries qu'on décimait et les hurlements des fillettes qu'on déchiraient d'un brutal coup de reins avant d'en suriner le sein. Le conseil de Blaze tira néanmoins du calcaire éburnéen de son visage un froncement de sourcils et arracha de la soie de ses lèvres une caustique réplique alors qu'elle se retournait vers elle, l'émeraude de ses yeux s'empanachant des lueurs torchères des chandelles. « L'inertie est un crime si insidieux qu'il suppure les âmes les plus honorables d'une purulence endémique. Je ne me suis que trop réfugiée dans l'apathie pour ne pas en être malade à outrance ! Et ne croyez-vous pas que j'ai assez souffert de ma propre septicémie sans avoir à tolérer encore celle de mon propre frère et à endurer celle de l'homme à qui on m'a convolé ? » Les mots s'étaient abattus comme couperets pas tant sur la tête de sa garde du corps que sur la sienne. Peut-être cette mise à mort du peu d'empathie dont elle était déjà capable n'avait qu'avivé l’asepsie de sa morale. Aujourd'hui, elle n'avait d'égards que pour les faits, que pour cette froide logique qui maintenait ignifuge l'asthénosphère de ses colères et pierreux les magmatiques fondements de son repentir. « Certains disent que c'était un châtiment envoyé par Catharis : ceux-là veulent dédouaner les hommes qui ont mené cette action. D'autres parleront de crime infâme. Je m'efforce de ne pas porter de jugement, même si je vous avoue que le choc a été rude. Mais vous, vous étiez à Ibenholt à ce moment funeste ? Comment se fait-il que vous n'ayez pas été en lieu sûr ? » Ne pas porter de jugement. Encore fallait-il distinguer l'opinion de la critique et cette dernière, elle en était persuadée était précisément ce qui la distinguait des mignards ou des chiens suivant aveuglément leur maître avec un amour inconditionnel. Le sien ne l'était pas, le sien était un privilège qu'elle octroyait et retirait, sa docilité était une prérogative qu'elle n'offrait pas à la légère et qu'elle enlevait avec plus de légèreté encore.


L
a reine siffla tout le contenu de sa coupe, visiblement cynique. « J'étais à Ibenholt précisément parce qu'on voulait m'y voir loin. » Combien de fois Synric avait-il essayé de lui faire entendre raison, se faisant tantôt mielleux tantôt mordant pour mieux redevenir onctueux et incisif à nouveau ? Elle n'entendait pas quitter la tanière encore moins l'ombre de son frère qui risquait si hardiment sa crinière. Elle avait été catégorique : elle resterait entre les remparts de la ville veuve, qu'elle dusse brûler avec les décombres ou être exécutée aux côtés de son jumeau. « Je ne suis pas, à l'instar de la fragile Ebonhand, une oiselle qu'on balade de perchoir en perchoir ainsi Ravenhole n'était pas pour moi une option à considérer. » Un ongle vint s'attarder sur le cristal de son verre alors qu'elle rivait son regard à celui de la fille Blackthorn. « Ce soir-là, j'ai perdu deux frères. Cette nuit-là, j'ai assisté, impuissante comme lionne en cage, à la conflagration de ma famille alors que mon cadet attentait à la vie de mon aîné et que celui-ci l'exilait, l'expulsant de ma vie comme s'il eut été un domestique qu'on congédiait. » Un rictus sarcastique sculptait ses lèvres, le vairon de ses prunelles jouant à s'habiller des clairs-obscurs. « Quand Ehvan est venu prendre ses affaires, il m'a accordé un regard torve avant de me cracher au visage, faisant de moi l'extension de Synric, me haïssant avec la même force qu'il lui dédiait à lui. Et si je n'ai jamais été proche de mon jeune frère, je ne croyais pas mériter autant de rancœur et pourtant aujourd'hui je comprends qu'en restant passive j'avais commis un crime pis encore que celui de Synric. Je ne m'étais pas interposée comme Ehvan l'avait fait, au péril de sa vie, et, par conséquent, je méritais le couperet de mon cadet autant que lui. » Elle leva sa coupe, portant un toast, se faisant coryphée d'un bal de sarcasmes et d'un banquet d'ironie. « La voilà la gloire, le voici, l'honneur ! Un chevalier n'est pas plus noble qu'un coupe-gorge et votre précédant suzerain n'était pas moins usurpateur qu'un autre. Dans ce monde tout n'est que forces sur l'échelle du pouvoir : l'inertie qui vous retient au sommet, la morale qui vous tire vers le bas et la félonie qui vous hale vers le haut. Tous appréhendent la montée, tous craignent la chute et personne ne redoute le sommet. La descente pourtant, est plus vertigineuse et létale, la dégringolade, plus cruelle et abyssale encore... Voilà votre Middholt, voilà votre Ibenholt. Comment faites-vous pour ne pas porter de jugement... ? »

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MessageSujet: Re: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptyMar 22 Avr - 0:39

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Roses with steel thorns

la vipère & la rapière

« La voilà la gloire, le voici, l'honneur ! Un chevalier n'est pas plus noble qu'un coupe-gorge et votre précédant suzerain n'était pas moins usurpateur qu'un autre. Dans ce monde tout n'est que forces sur l'échelle du pouvoir : l'inertie qui vous retient au sommet, la morale qui vous tire vers le bas et la félonie qui vous hale vers le haut. Tous appréhendent la montée, tous craignent la chute et personne ne redoute le sommet. La descente pourtant, est plus vertigineuse et létale, la dégringolade, plus cruelle et abyssale encore... Voilà votre Middholt, voilà votre Ibenholt. Comment faites-vous pour ne pas porter de jugement... ? »

Elle était amère. Amère et blessée quoi qu'elle en dise. Je contemplais la léonine dame et ses plaies ouvertes. L'échiquier du pouvoir avait un pion cynique. Du dehors pourtant, son sort n'était qu'enviable. Tête couronnée, mariée a l'homme le plus puissant de tous les royaumes, issue d'une famille renommée, elle était celle dont on chantait la beauté du nord au sud, de l'est a l'ouest. Mais, puissant ne voulait pas dire invincible et tout le monde avait une faille. La mienne, comme celle de la plupart des nobles, était cachée sous moult faux-semblants. Comment faisais-je pour ne pas juger ? Une lutte de tous les instants. Je me prenais a caresser du regard les murs de la pièce funeste. « Je ne prétends pas avoir la solution miracle, votre Majesté. Que pourrais-je vous dire d'autre, a part que je tente d'écouter ma raison plutôt que mes affects ? » Je savais pertinemment que cette réponse ne la satisferait pas. Las ! C'était la vérité. A vrai dire je me mentais a moi-même : savoir qu'Ehvan avait envoyé au diable sa famille au nom de ses principes moraux m'avait empli non pas de joie mais avait renforce mon estime a son égard. Le jugement que je portais était surtout un jugement sur moi-même : la droiture que je prétendais avoir ancrée dans ma chair ne m'avait pas empêchée de retourner ma cape sitôt le souverain Ebonhand assassine. Qu'oserai-je affirmer devant sa fille ? Je l'avais protégée pendant de longues années, et je lui avais tourné le dos. Lady Jora saurait-elle quel rôle j'avais joue dans le renversement de l'allégeance des Blackthorn ?

J'observais la reine et je trouvais en elle une lucidité cynique sur le monde auquel nous appartenions. Quelque chose me retenait pourtant. « Madame, vous disiez avoir perdu deux frères. Lord Synric est pourtant toujours présent en Ibenholt. » Les mots filèrent plus vite que ma pensée et je compris trop tard que je n'avais pas à poser ce genre de questions. J'étais sa protectrice, pas sa confidente. Et puis j'avais prêté allégeance à Ser Synric lui-même. Si je savais ce qu'elle lui reprochait, comment pourrais-je rester objective à l'égard du suzerain à qui j'avais juré fidélité totale et inébranlable ? Ne pas porter de jugement était une traversée du désert en pleine foule à ce moment-même et je sentais bien que plus le temps passerait, moins j'en serai capable. La cour était un dédale de roueries et de mensonges et j'avais voulu en être éloignée pendant si longtemps qu'il me semblait avoir oublié ce qui s'y cachait sous les beaux atours.
Le récit de Lady Sylarne m'avait laissée pantoise, tourmentée, et inquiète. Avais-je fait le bon choix en ployant genou devant son frère ? Aurais-je dû, comme Ehvan, refuser de rendre les armes, au risque de tout perdre ? Le bien-être de nos serfs valait-il mille fois l'honneur maculé ? Mais pourquoi s'aveugler, pourquoi tentais-je de me convaincre que mes actions avaient toujours un noble but ? Je savais bien pourquoi j'avais abandonné les Ebonhand pour les Clanfell. Certes, j'avais bataillé pour protéger Lady Jora, mais dès lors que le Roi Hulgard était mort, les choses m'avaient échappé des mains. Ça, et l'intérêt premier, celui de la famille. Oncques ne faillit, était notre devise. Mais les Blackthorn étaient en rangs serrés, et la famille et son intérêt primaient sur tout le reste. Épouser Gwaine ? La famille -ma mère surtout- l'avait promis. Servir les Ebonhand ? La Famille. Servir les Clanfell au mépris de serments plus anciens ? Les intérêts de la famille l'avaient dicté. Encore et toujours, et toujours, et encore. Mes pupilles étaient fixées sur Lady Sylarne, mais je ne la voyais pas, je ne la voyais plus, je ne voyais finalement qu'un amas d'étoffe et de chair que je devais protéger. Et de sa bouche jaillissaient des mots qui m'ouvraient les yeux sur ma condition.
Je n'osais la contredire : rien que la voir feuler sur l'honneur et la gloire me pétrissaient d'effroi. Que pouvais-je lui dire qui n'attiserait point son courroux ganté de velours ? Que pouvais-je lui dire qui ne me ferait pas passer pour une sotte ? Elle était plus jeune que moi, mais elle me semblait bien plus sage, ou en tout cas, bien plus au fait des intrigues et des motifs réels qui poussaient les hommes dans une direction ou dans une autre. « J'ai grandi seule, Milady. Comme un garçon jusqu'à mes douze ans. Aux tours d'Airain, avec d'autres enfants de mon âge. J'y ai appris à me battre, comme un homme. On nous apprenait qu'il fallait toujours attaquer de face, que seuls les malandrins et les pouilleux attaquaient en traitre. Que frapper un homme dans le dos était la pire des trahisons. Et puis, lorsque les dieux ont cru bon de me rappeler ma féminité, j'ai appris que le paraître était la meilleure des armes donnée à la gente féminine. Que nous n'étions que des images. Que nous devions avoir le verbe, mais pas la force. Que nous devions être, nous les femmes, des objets dociles. » La coupe était reposée depuis bien longtemps, et je m'étais appuyée sur un des meubles, tournant le dos à la reine, me confiant sans doute plus que de raison. « Je n'ai pas interrogé ces deux enseignements. Pas tout de suite. Sans doute aurais-je dû avoir la présence d'esprit de m'en inquiéter assez tôt. Mais j'ai tenté de concilier les deux. En vain, vous le concevrez assez aisément. Je ne suis pas faite pour la vie de cour. » Je faisais une pause, le temps de remettre de l'ordre dans mes pensées confuses. Où voulais-je aller ? Que cherchais-je à lui dire ? « L'honneur sur lequel vous rejetez tous les crimes est le seul endroit où j'ai réussi à faire la part des choses entre mes deux éducations contradictoires. J'ai vu des hommes ruser, j'ai vu des femmes tenir des serments ancestraux. J'ai vu des hommes tenir, jusqu'à en mourir, et des femmes mentir. Je m'efforce de ne pas juger parce que, sachant d'où je viens, je sais aussi que tout n'est finalement qu'une question de dosage. La chute que tous redoutent est représentée pour moi par la perte de valeur de ma propre parole. Le pouvoir m'importe peu. Les terres que je chéris et qui m'ont parfois vue grandir sont celles de ma famille, et je ne vous cache pas qu'elles ont été prises en compte au moment de plier genou devant votre frère. J'abhorre la félonie, mais j'ai calculé. J'ai été inerte, et j'ai su me mettre en mouvement. Ne pas porter de jugement est certes une tâche ardue, mais je tente de m'en acquitter. »

Une question me brûlait les lèvres, et le flot de paroles que j'avais laissées couler m'avait empêchée de la poser. Et pourtant, arrivée au bout de ma tirade, dont je n'étais pourtant pas totalement convaincue -ce qui était un comble- je voulais encore la poser. Pouvais-je, devais-je interroger la Reine, ou devais-je me taire ? Depuis que nous étions en vue de Fortrekke, je voulais la formuler, mais ne pouvais m'y résoudre. Et pourtant, sans doute enivrée par les mots, je continuais : « Votre Majesté, si vous me permettez : pourquoi avez-vous voulu revenir dans cet endroit qui semble vous ramener tant de sombres pensées ? » Je savais bien qu'elle n'était pas une oiselle, son récit me l'avait fait comprendre et j'apprivoisais peu à peu cette vision de ma souveraine. Mais la noble lionne avait-elle choisi sciemment de souffrir en silence, et de s'apposer elle-même le fer chauffé à blanc ? Pourquoi ? Il fallait bien que je connaisse ses noirs desseins, si je devais la protéger : quitte à la protéger d'elle-même.

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Sylarne Clanfell

Reine consort d'Ibenholt

Sylarne Clanfell
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MessageSujet: Re: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptySam 26 Avr - 2:54

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Septembre, 5E 913.
Sylarne a quatorze ans.

«S
ylarne ? » L'aquilon se heurtait au récif de cristal, chargé d'une frigide humidité. Il lui semblait que tous les feux de Fortrekke ne réussissaient pas à chasser les halitueux frissons qui constellaient de vallons le vélin de sa peau. Le jour agonisait, laissant sur l'horizon un linceul versicolore, progressivement happé par de noires nuées. « Sylarne ! » Pourquoi s'intéressait-il à son unique fille maintenant ? Tant d'années, elle n'avait été qu'une inconnue aux yeux de son père, une vague réminiscence qui revenait à lui dans d'égrotants éclairs de lucidité, comme si la maladie rendait enfin à sa mémoire l'acuité. Claudiquant, il avait traversé la loggia, posant une patte sur le bras de sa fille, la tirant brutalement vers lui. Le muscat et l'odeur du bois trempé. Ainsi Sylar Clanfell avait de nouveau décidé de s'étourdir de vin et de chasse pour oublier la honte de n'être plus qu'un reflet de son auguste présence. Une maladroite chute à cheval lui avait percé la cuisse d'un estoc rocheux et désormais l'illustre patriarche n'était plus qu'un clopinant infirme. Les tempêtes de sa colère étaient désormais fulgurantes et violentes, le géniteur éreinté d'avoir trop feint une parfaite santé à la cour toute la journée durant, passant ses nerfs à vif sur le moindre quidam qui croisait son chemin. Le soir n'était désormais qu'un prétexte à une déliquescente dipsomanie et à une brutalité épanchée sans remords. « Cesseras-tu un jour d'avoir sur le visage cette éternelle expression de deuil ? À te voir on dirait que j'ai enfanté une morte. Maintenant, sers-moi du vin, rend-toi utile. » L'haleine avinée l'étourdit un instant, puis il relâcha son étreinte, la poussant vers la table pour qu'elle s'exécute. Ulcérée, elle ne put qu'attacher le malachite de ses prunelles à celles, identiques, de son père avant de lui répliquer, amère : « Les domestiques servent le vin. Moi je suis votre fille, au cas où vous l'auriez oublié, pas un vulgaire échanson. » Si elle s'était préparée au fiel de paroles tranchantes, elle ne s'attendait pas au choc qui la percuta de plein fouet, la faisant choir sur la crédence, entraînant dans sa chute une amphore et quelques sébiles, fragments de verre s'écrasant sur les voliges avant de se river dans la peau délicate de ses mains. La brûlure s'étira sous sa peau, la couvrant d'une empreinte rubicond qui se teintait progressivement de guède, puis de violet. Le dextre lilial creusé de sillons d'hémoglobine s'arracha à l'emprise du sol, tremblant et elle se redressa prestement, les orbes rivés à ceux de son géniteur, le céladon de ses prunelles chancelant sous l'effet d'une magmatique rage qui lovait ses feux à l'orée de son occiput. L'homme traversa les quelques pas qui le séparaient de sa suppliciée, agrippant par les épaules pour l'agiter alors qu'elle se disloquait, poupée désarticulée, entre ses bras puissants. « Ne t'avise plus jamais de me parler de la sorte ou je te ferai murer dans cette maudite loggia jusqu'à ce que ce que ta voix se brise en supplications et que tes ongles se creusent jusqu'à l'os d'avoir trop gratté la pierre. Maintenant excuse-toi, je suis encore ton père et tu ne m'as pas encore enterré... » En un instant la flamme qui rougit sa joue se répandit comme traînée de braises sur sa peau, creusant sa nuque d'une colère qui ne dérougissait pas. Qu'il la séquestre s'il le souhaitait, qu'il la violente s'il en avait envie, elle ne souhaitait plus désormais que lui prouver qu'elle est née Clanfell tout comme lui, qu'elle était lionne et non brebis, aussi cuisante soit l'humiliation qu'il souffrira ou dont il la lestera. Qu'importe, au final. Tout ce qu'elle souhaitait, c'était que cette damnée maladie l'emporte et qu'avec son dernier souffle lui vienne en tête la fureur de la fauve. N'était-ce pas une manière de la tester et de l'obliger à se prouver ? N'était-ce pas un moyen de savoir si sa fille savait faire autre chose que se murer dans le silence, feulant intérieurement ? N'était-ce pas une façon d'entendre enfin son rugissement ? D'un geste vif, elle quitta l'étau de ses mains, lui dédiant un regard mouillé de haine avant de lui cracher avec défiance : « Le lion ne plie pas le genou devant l'agneau, mon seigneur... »
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L'
anamnèse était un mal qui brûlait les peaux comme les mémoires et les landes vaporeuses et réminiscentes qu'elle arpentait n'étaient qu'une étape de plus vers la résilience. Là où les communs esprits se terraient dans l'oubli, préférant la velouteuse caresse de l'amnésie, elle s'abandonnait au ressac de ses turbulentes mémoires, accueillant au creux de son être la lame des flammes qui lui rappelaient à chaque fois qu'à travers son audace, elle avait gagné le respect de Sylar. Oh le lion vieillissant ne l'avait pas murée ni claustrée dans cette même pièce et les dernières chaleurs que son père avaient disséminées sur le parchemin de ses affects avaient été celles qu'il lui avaient réservées après cette poignante utilisation d'une de ses propres maximes. Et c'était dans cette même loggia que le patriarche Clanfell avait soigné les mains meurtries de sa fille, déposant un ultime baiser sur la couronne de son front avant de l'abandonner à son silence. La voix de la lady Blackthorn s'imposa au creux de son encéphale, l'arrachant aux pérégrinations de ses souvenirs et au pèlerinage de son esprit. Écouter sa raison ? La lippe royale fut ébranlée d'un sourire ironique, visiblement amusée par la situation qu'on renversait ainsi de quelques paroles. La raison était essence, ontologique substrat qui irriguait les alluvions de son corps, un ichor qui était depuis trop longtemps devenu une raison d'être, un fondement. N'avait-elle pas vu en cette allégorie une théorie transposable, implacable positivisme qui régulait chaque rapport social, chaque être composant la toile sociétaire, chaque décision qu'elle soit réfléchie ou non ? Tout n'était, au fond, qu'application systématique d'un paradigme qu'elle n'avait fait que formuler à voix haute. La raison était tectonique chez elle tant et si bien qu'elle faisait se mouvoir ses affects comme lithosphère sur océan magmatique, induisant chez la reine chaque acte, chaque parole, chaque pensée et même chaque épanchement de colère. « Madame, vous disiez avoir perdu deux frères. Lord Synric est pourtant toujours présent en Ibenholt. » Elle aurait tant voulu que présence rime avec promiscuité et pourtant il en était rien. Synric lui avait glissé des mains lorsqu'il l'avait vendue à la Corneille, sans égard pour son propre avis sur la question, faisant d'elle une marchandise alors qu'il lui avait promis dans cette même pièce qu'il ne se permettrait jamais de la perdre, dusse-t-il se battre et en mourir. Mais les promesses de la jouvence étaient si précaires, si vénales, si volatiles. « Je l'ai néanmoins perdu. La proximité géographique n'est pas la proximité de l'âme. Autrefois, nous étions proches. Autrefois il m’appelait encore ma sœur plutôt que votre majesté... » Elle ne connaissait que trop bien, néanmoins, l'outrageux hubris qu'elle alimentait d'un broc d'huile, faisant indéniablement croître l'incendiaire rancune qu'elle lui vouait ; son propre pragmatisme se faisant comburant. Elle aurait fait la même chose. Pourtant elle se plaisait à croire qu'il aurait pu trouver un échappatoire...


E
t bien que les confessions de Blaze arrachèrent à l'argile ductile de ses pensées de corrodantes questions, la férale reine fut happée par le récit de son ombre, relevant les similitudes qui, sous le couvert d'une éducation antagoniste, en venaient à être si contrastées qu'elles brillaient d'évidence et d'une emphase plus qu'obvie. Une nouvelle fois le sébile vint caresser ses lèvres de ses exhalaisons muscatées, les dernières paroles lancées par Blaze lui arrachant un pâle sourire. L'honneur. Elle n'y croyait pas, pas plus qu'aux dieux dont on peuplait les quatuaires. L'intérêt était la seule force motrice, l'architecture de chaque être humain. Qu'il se pare des oripeaux de l'honneur ou de ceux de la traîtrise, tout n'était qu'une question de référentiel. « L'honneur est, certes, une vertu cardinale chez vous. Et peu importe, au final, quelles sont les valeurs des uns et celles des autres, les fondements sont les mêmes. Un chevalier sera honorable pour la société qui cautionne son titre. Un traître et un sycophante sera honorable pour les marginaux qui cautionnent le sien. Interchangez-les et ils deviendront félons, antagonistes. Tout est une question de perspectives, sera Blackthorn. » Elle attacha un doigt au cristal du calice, les sillons céladon de ses iris se taillant d'une lueur cristalline, celle qui accompagnait chaque élucubration philosophique de son esprit. « Comme tous les autres vous avez fait ce que vous deviez faire pour survivre. Pour certains vous êtes une traîtresse, une femme à qui l'on ne peut faire confiance. À mes yeux, vous êtes fidèle et c'est sans hésitation que je vous accorde la mienne. N'oubliez jamais que chaque être humain est mû par une seule force, Blaze : celle de vouloir être aimé, reconnu et cautionné par ses pairs. Et cette force intrinsèque est dans notre monde appelée arrivisme. Moi, je l'appelle survie. » Ses prunelles étaient désormais rivées à celles de sa garde du corps. Il n'était désormais plus question de cynisme ou de fatalisme. Tout n'était qu'observations aseptiques, qu'empirisme objectif. « Le nourrisson glisse des yeux attendrissants vers sa mère pour survivre. Pas par amour, pas par affection, - il n'en comprend pas encore la notion -, mais par volonté d'être réchauffé, nourri et protégé d'une mort certaine. La maturité n'efface pas les réflexes et quoiqu'on les masque sous de pompeuses appellations - honneur, arrivisme, valeurs, ambitions - ils sont toujours là, charpente médullaire qui soutien chaque existence. » Loin des mirettes inquisitrices des mignards, elle laissait ses vérités franchir l'orée de ses lippes, sans filtre, sans démagogie. Une rhétorique de la sincérité dont elle habillait rarement sa langue ou l'arantèle de ses pensées. Mais ce fut tout ce qu'elle s'autorisa, signant son mutisme d'une autre lampée de myr, sceau éthylique qui cachetait une conscience épistolière. « Votre Majesté, si vous me permettez : pourquoi avez-vous voulu revenir dans cet endroit qui semble vous ramener tant de sombres pensées ? » La reine creusa son faciès d'un sourire léger, presque imperceptible, faisant à nouveau couler le vin dans les sébiles.


F
ortrekke se faisait berceau et tombeau. La forteresse avait connu genèses, déhiscences et épilogues ; chaque réminiscence toutefois trouvait sa place sur le canevas de son existence, chaque liseré, qu'il soit blanc ou noir, composant un tout qui, à l'oeil, n'était ni ébène ni ivoire, gris, simplement. Fortrekke était un pèlerinage, une procession, un autel sacrificiel où expier ses vices ou encenser ses vertus. Et tout entre ces murs lui rappelait qu'elle était comme eux tous : façonnée par l'anamnèse, construite d'expériences, constituée de noir et de blanc. Si cette fois elle avait décidé de partager cette absolution avec Blaze, c'était encore par utilitarisme. Charpente médullaire qui soutenait toute existence. La reine quitta néanmoins le socle de bois et de soies, posant une main désinvolte sur les guipures qui ornaient une banquette. Et devant ses yeux s'animaient désormais les réminiscents spectres, épigones de son jumeau et d'elle-même, fantômes d'une jouvence évadée, arrachée par les doigts sibyllins d'un temps kleptomane. Elle avait goûté le miel de ses lèvres à cet endroit, l'érubescence de la première fois couvrant ses joues d'adolescente de frissons tièdes. Et sur cette même banquette s'était perchée la Corneille, rivant ses orbes claires dans les siennes, l'épiant comme le charognard le ferait d'une carcasse, transperçant son âme pour la dénuder, pour la violer. « Pourquoi une veuve visite la tombe de son époux ? Il appartient au passé. Sa mort lui rappelle un chagrin incommensurable et pourtant elle persiste à y aller. Peut-être pour se remémorer les éclats de lumière qui ont traversé l'ombre, ne serait-ce qu'un fugace moment... Je crois pourtant que c'est plus complexe que cela. Une veuve visite le sépulcre de son époux parce qu'elle veut s'assurer qu'elle est encore en vie. Parce que devant la mort et la poussière du temps, elle sent les battements de son cœur avec plus d'acuité encore que si elle les avait étouffés dans ceux des autres. Si je viens ici ressasser de sombres mémoires, si je viens aussi pour me remémorer les faiblesses de mon enfance, c'est pour prendre la mesure de la force qui m'habite désormais. » Elle revint auprès de sa suivante, reprenant place sur le siège avant de vider sa coupe. « Je dois vous paraître bien amère et pourtant l'amertume est comme un marc. Lorsqu'on vide une coupe il ne reste plus que lui pour nous rappeler qu'elle fut un jour remplie. » Puis, elle baissa les yeux, pensive avant de les relever vers elle. « Puis-je vous poser une question, moi aussi, et espérer une réponse sincère, sans égard pour mon titre ou mon rang ? » Sylarne marqua une pause, la lithiase de son visage désormais pétrie d'une douceur qui était, chez elle, peu caractéristique. « Si le pouvoir m'était échu, ferais-je une bonne reine ? »

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Blaze Blackthorn

Ronce à la Rapière

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MessageSujet: Re: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptySam 3 Mai - 1:20

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« Pourquoi une veuve visite la tombe de son époux ? Il appartient au passé. Sa mort lui rappelle un chagrin incommensurable et pourtant elle persiste à y aller. Peut-être pour se remémorer les éclats de lumière qui ont traversé l'ombre, ne serait-ce qu'un fugace moment... » A-t-elle jamais été veuve ? Sait-elle ce que c'est de porter le deuil d'un époux ? Ses mots ramènent dans ma mémoire immédiate les traits de Gwaine, mort trop tôt, pleuré longtemps, mais enterré dans le cimetière des visages a jamais dérobés par la Camarde. Je n'avais que peu visité la tombe de Gwaine depuis qu'il était mort. Je ne retournais que très rarement dans le fief où nous nous étions installés, celui de son père. Je ne voulais plus rien avoir à faire avec eux, et pourtant le souvenir de mon défunt époux était encore tendre dans mon esprit. Je ne pourrais donc pas trouver ma réponse ici. « Je crois pourtant que c'est plus complexe que cela. Une veuve visite le sépulcre de son époux parce qu'elle veut s'assurer qu'elle est encore en vie. Parce que devant la mort et la poussière du temps, elle sent les battements de son cœur avec plus d'acuité encore que si elle les avait étouffés dans ceux des autres. » Était-ce cela ? M'étais-je sentie plus vivante parce qu'il était mort ? Dans l'immédiat, non. Mais après oui… mais c'était pour d'autres raisons, et sans doute pas parce que sa mort ravivait l'éclat de ma vie. Loin de là. « Si je viens ici ressasser de sombres mémoires, si je viens aussi pour me remémorer les faiblesses de mon enfance, c'est pour prendre la mesure de la force qui m'habite désormais. » Je comprenais mieux ses explications. Elle se présentait là où elle avait été autrefois jeune et frêle, si elle l'avait un jour été, cela dit, et constatait qu'elle avait changé. Les remparts de Staltistler m'avaient apporté le même genre de constatations. Je ne disais plus rien et la laissais poursuivre. « Je dois vous paraître bien amère et pourtant l'amertume est comme un marc. Lorsqu'on vide une coupe il ne reste plus que lui pour nous rappeler qu'elle fut un jour remplie. » C'était donc ça, sa justification ? Laisser les regrets et le goût de l'amertume pour se souvenir de ce qu'on avait été ? De ce qu'on aurait pu être ? Personne ne pouvait vivre indéfiniment en regardant toujours en arrière. Il fallait vivre avec ses choix, et apprendre à les assumer. Je savais de quoi je parlais, même si je restais encore muette. Immobile, je me fondais dans le décor et je devenais ombre parmi les ombres alors que la lumière du jour décroissait. « Puis-je vous poser une question, moi aussi, et espérer une réponse sincère, sans égard pour mon titre ou mon rang ? - Bien sûr Madame. Je répondrai avec la même sincérité dont vous m'avez fait montre. » Accompagnant ses paroles d'un hochement de tête lent et unique, je me tournais vers elle, pour lui faire face et scruter son visage en attendant qu'elle m'interroge. Que voulait-elle donc savoir ?

Elle avait parlé de perspectives, de fidélité, d'amour. De trahison, d'estime, de mensonges. De maturité, de mort, de vie. De force. De faiblesse. De souvenirs. De regrets. De confiance. La question me prit par surprise, tant est que je ne l'avais pas vu venir : « Si le pouvoir m'était échu, ferais-je une bonne reine ? » Lady Sylarne me faisait confiance, elle me faisait l'honneur de me l'accorder et je savais que je ne pouvais pas me détourner maintenant qu'elle avait posé la question fatidique. Et pourtant, je ne savais quoi répondre. Je n'étais pas comme Lady Crowgale, à minauder pour voir un chemin s'ouvrir devant moi. J'étais déjà arrivée bien haut, et je pouvais rester là où j'en étais. Alors… Que savais-je de Lady Sylarne qui me permettrait de dire si oui ou non, elle serait une bonne reine ? Et devais-je voir dans ses paroles les sombres désirs d'une femme vendue à son époux qui voudrait s'en débarrasser et calcule ses chances pour monter sur le trône à sa suite ? Humectant mes lèvres, je réfléchissais désormais en faisant les cent pas dans la pièce, en me doutant bien que mon silence n'apaiserait pas ma Reine. « Je crois, Milady, que vous avez la force de caractère pour être Reine. C'est déjà quelque chose que bien des gens n'ont pas. » Je m'approchai d'une armoire et en inspectai le contenu, oubliant un instant la question pour y revenir cela dit assez vite. « On dit qu'un bon souverain est un gouvernant qui se soucie du sort du peuple avant de se soucier des intrigues de la cour… Mais d'un autre côté, telle qu'est la cour, il faut impérativement savoir la manier si on veut pouvoir rester en place longtemps et ne pas se faire assassiner lâchem… » Je m'interrompis, consciente que mon jugement pointait dans mes paroles. « Mes excuses, Votre Majesté, je m'emporte. » Ferait-elle une bonne reine ? Qui étais-je pour pouvoir juger cela ? « Je pense que oui, Ma Dame, vous pourriez faire une bonne reine. Peut-être pas la plus aimée du royaume, mais vous comprenez ce qui meut les hommes et c'est un atout que peu peuvent se targuer d'avoir. Cela dit… » Devais-je aller jusqu'au bout de ma pensée ? Elle avait demandé que je sois sincère, et je me devais de l'être. Qu'importe les conséquences. Elle comprendrait mes retenues. « Cela dit, votre Majesté, je crains que le pouvoir ne soit pas bénéfique pour vous. Il aveugle, il enivre comme du bon vin, mais les conséquences de cette ivresse sont bien plus dévastatrices que celles de la seconde qui se soldent simplement par un épouvantable mal de crâne le lendemain de l'excès. » Je devais la protéger, j'en avais fait le serment, et cela voulait aussi dire la mettre en garde si j'en avais la possibilité contre la noirceur que le pouvoir apportait dans le cœur et les âmes de ceux qui le cherchaient. « Vous feriez une bonne reine au début, Ma Dame. Mais je ne sais si cela durerait éternellement. Le pouvoir corrompt, comme disait je ne sais plus quel grand penseur de cour, qui a sans doute fini au billot pour avoir proféré une pareille atteinte à l'autorité royale. »

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MessageSujet: Re: Roses with steel thorns [PV Blaze]   Roses with steel thorns [PV Blaze] EmptyMar 13 Mai - 2:14

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Mars, 5E 931.
Sylarne a trente-deux ans.

«V
otre Majesté... Ne sois pas stupide, Synric. » Sur la crinière flavescente un cuprifère diadème captant les longs pans solaires pour en faire gemmes nitides ornant le métal poli qu’on avait rivé à son imposante coiffure. L’esquisse d’un sourire amusé s’attardait sur les lèvres fraternelles alors qu’il la toisait, les léonines prunelles masculines s’attachant à chaque courbe jumelle sans l’ombre d’un remord. Sur ses lippes à elle ne fleurissait ni sourire ni félicité alors qu’elle arrachait d’une main preste la tiare pour la laisser choir sur une méridienne. « Te voilà reine, Syla… je dois t’adresser comme tel. » Exhalant soupir sardonique, elle s’amarra à la crédence où gisait sébiles et carafes de vin, faisant couler une cascade grenat au fond d’un calice qu’elle porta aussitôt à ses lèvres. « C’est toi qui aurait dû épouser Jorkell vu l’empressement dont tu fais preuve à asseoir un Clanfell sur le trône. Cela n’aurait-il pas été plus simple que régner par procuration à travers moi ? » Elle mouilla enfin sa lippe d’un sourire ironique, inclinant imperceptiblement du chef pour plonger le malachite de ses orbes dans celui de son frère. « Régner est un grand mot. Le freux semble peu disposé à laisser le lion apposer sa griffe, même sur le plus indigeste des morceaux de viande. Nous voilà bien avancés. » Sa langue s’imprégna une nouvelle fois des capiteux arômes de muscat pendant qu’elle prenait place sur un fauteuil, le sébile trônant entre ses doigts diaphanes comme s’il eut été un sceptre. C’était bien là le seul royaume dont elle était souveraine et les seuls sujets sur lesquels elle souhaitait poser son hégémonie étaient ceux qui fermentaient dans les amphores depuis trop longtemps. Le géminé à la crinière mordorée se glissa derrière elle, encerclant les épaules féminines de ses mains puissantes pour les comprimer avec douceur, un doigt nomade s’attardant à l’angle de sa nuque et de son lobe pour disséminer frissons aériens sur le parchemin de sa carnation. « Tu te souviens des apophtegmes de Père, Syla ? » Les prunelles noyées dans la vacuité, elle laissait les velouteuses fièvres s’éprendre de son corps. Un rictus cynique passant la frontière étanche de sa bouche pour se substituer à sa voix feutrée. « Comment les oublier ? Il n’avait que ça aux lèvres, des maximes… » Une main masculine s’était aventurée sur la soie carnée de la gorge offerte, engoncée dans un corset de satin cinabre. « Même à l’ombre le lion gouverne. Tout ce que voit le soleil est son domaine… » La voix féminine se mêla, machinale, à celle de son géminé. « …la lune, même, n’est pas souveraine. Même à l’ombre le lion gouverne. » Cet aphorisme était de loin le plus ridicule qu’elle eut entendu de la bouche de Sylar Clanfell et pourtant, il lui semblait désormais se réifier sous ses yeux. Dans l’ombre du freux la lionne était souveraine. Le dextre filial se rivait à l’arrête de sa mâchoire, un doigt hardi glissant sur sa joue alors qu’il empoignait doucement son menton pour faire courir ses lèvres sur la courbe de son visage. « Les Clanfell n’ont jamais été aussi près du but, Syla… » Fauve, il s’approchait des lèvres jumelles, son souffle se heurtant au récif halitueux du sien. Mais déjà elle se soustrayait au magnétisme de son géminé, détournant le visage de celui qui le gardait captif. « De ton but à toi, Synric… Si nous avons tout partagé jadis, nous ne partageons pas ça. » Elle sentit l’apyre de son regard se faire flammes pendant qu’il vrillait son visage de prunelles noires. Sur son propre visage la lithiase était demeurée stoïque, ses lippes résolument closes en un silence placide. « Mon but à moi ? Et quel est le tien, je t’en prie ? Qu’est-ce qui justifie que tu me tournes le dos ainsi pour fuir mon regard, Syla ? Dis-le-moi ! » De feutrée sa voix était passée à magmatique. Elle soutint de nouveau le regard de Synric, le masque de flegme soudainement lézardé par une morgue qui lui arracha presque un feulement. « Je n’ai jamais voulu de tout ça ! Le mariage, la couronne, le pouvoir, l’influence… tout ça, c’est toi qui le convoite et qui l’a toujours convoité, comme si tu devais te faire l’épigone de Sylar et porter son stupide héritage à bout de bras ! » L’imperturbable lithosphère se faisait désormais brasier qui s’agrippait à son épigastre pour laisser sur ses lèvres un âcre goût de cendres. Elle se leva, posant ses mains sur les bras du fauteuil pour faire face à son frère. « Non content de m’avoir imposé ton absence, de m’avoir obligée à apprendre comment jouer la docile chatte de compagnie en présence d’hommes, voilà que Sylar, même muselé par le sépulcre, vient s’assurer de la pérennité de mes chaînes à travers toi ! » Sur les traits de son frère elle put lire l'exaspération alors qu'il lui lançait, excédé : « Mais que veux-tu, Sylarne à la fin ? » Entre ses lèvres se glissait un souffle, soupir leste qui témoignait de sa lassitude. Elle riva une fois de plus ses prunelles aux siennes. « La liberté de choisir. »

Roses with steel thorns [PV Blaze] 962983line

E
ntre ces murs qui furent son ergastule, elle ne trouvait désormais que tièdes réminiscences, les flammes d'une anamnèse brûlante se tarissant jusqu'à devenir cendres froides et mêlées de givre. Elle avait laissé couler sur sa langue les souvenirs, vaporeuses mémoires dont l'acuité se faisait lucifère, dans les ombres mouvantes de la loggia. Si Blaze avait été le témoin privilégié d'une telle soliloquie, c'est qu'elle semblait désormais à la lionne prête à l'entendre. La férale souveraine n'avait jamais été de nature loquace, se terrant avec plus d'aise dans une rhétorique qui n'en était que plus puissante maintenant qu'elle était raréfiée et cet instant, aussi fugace soit-il, n'en était pas moins rare. Pourquoi tenait-elle à avoir l'opinion de la Blackthorn sur une question qui l'obsédait désormais tout à fait ? Elle n'avait jamais voulu le pouvoir hormis celui qui lui permettrait d'avoir une emprise totale sur le fil de ses jours. Désormais il lui semblait que cette ascendance ne pouvait s'obtenir qu'à travers une couronne, comme si elle avait épousé un royaume plutôt qu'un homme, comme si elle s'était enchaînée à un trône plutôt qu'à une couche... La Fatalité n'avait pas fait d'elle une reine pour lui subtiliser cette hégémonie sur sa propre vie aussi facilement, faisant se dérober à l'étreinte de ses doigts avides un contrôle qui était désormais à portée. Du moins l'espérait-elle... Quelle ironie ce serait qu'on l'eut couronnée pour la claustrer davantage dans une geôle dont elle seule possédait les clés, fuyantes émancipatrices métalliques qui se dérobaient tout de même à son emprise. Les léonins iris avaient calqué leur motion sur la silhouette imposante de la garde du corps, suivant avec une attention soutenue les moindres déplacements, tentant d'y déceler une quelconque réponse. Pourtant la lionne n'avait posé aucun piège à celle qui se faisait son ombre ; elle n'était pas de celles qui, comme le vouivre, étreignaient leur victime avant de lui cracher venin dans les veines. Quand Blaze rompit enfin le silence, la reine sentit qu'il n'y avait dans son discours ni ombre de faux-semblant ni spectre de mensonges et elle attacha ses doigts au sébile, son encéphale se couvrant imperceptiblement des orbiculaires questionnements qui engluaient la toile de sa conscience. Chaque phonème se burinait dans l'argile ductile de ses pensées, suscitant d'arcanes interrogations qui s'étiolaient dans les vaporeuses effervescences de son esprit. Un souverain s'intéressait au bien-être du peuple. Un précepte qui était loin d'être axiome et encore moins paradigmatique sur Middholt. Et elle savait qu'à travers la souveraineté ce qu'elle recherchait n'était ni le bien d'un peuple ni la félicité de la populace. À travers le pouvoir qu'on avait distillé en elle comme la plus étourdissante des ciguës, elle cherchait la liberté. Sa liberté. « Vous feriez une bonne reine au début, Ma Dame. Mais je ne sais si cela durerait éternellement. Le pouvoir corrompt, comme disait je ne sais plus quel grand penseur de cour, qui a sans doute fini au billot pour avoir proféré une pareille atteinte à l'autorité royale. »


L
e pouvoir était venin s'étirant en jaspures zinzoline sous l'épiderme. Combien d'hommes avait-elle vu dévorés par la viciée strychnine d'une ascendance qui s'érigeait en eux comme le vertige éprenait ceux qui trônaient sur l'apex panoptique du monde ? La lune même n'est pas souveraine. Soumise aux ombres, la sélénite ne revêtait sa mercuriale lumière que sous la caresse éteinte du soleil. Par procuration. Toujours elle serait condamnée à vivre une liberté par procuration, se moirant, comme la lune, dans l'éclat diffus et agonisant d'un astre qui l'assujettissait de son empire, même absent. Se corromprait-elle également par procuration ? Dans le cortège des ombres ne s'épanouissait-elle pas comme la lune, se diaprant d'un pouvoir prêté qui empanachait la longue suite de sa procession et qui finirait inévitablement par lui faire revêtir les cuprifères voiles de la corruption ? Sylarne relâcha son étreinte sur l'hyalin sébile, relevant vers Blaze un visage dénué de toute ironie. « Vous avez été trop indulgente à mon égard, Blaze. » Son ton s'était adouci, sa voix s'oignant du miel de la sincérité. « Je suis venue au monde déjà viciée... » Le lest qui alourdissait une poitrine saturée semblait glisser de sa peau, laissant sur le vélin une impression éthérée, une légèreté qu'elle n'avait pas connu depuis longtemps. Elle quitta le berceau d'étoffes, laissa ses pas la porter jusqu'à la fenêtre, ultime rempart entre elle et le monde, entre l'anamnèse et l'avenir, entre la perdition et la salvation, poussant le carreau pour sentir l'haleine de l'aquilon embrasser ses joues et souffler son halitueux frimas sur ses lèvres. « ...j'ose espérer que j'ai été mithridatisée par les années... » Elle se retourna vers la sera, captant sa prunelle. « ...et que votre curative présence saura me libérer du venin de la corruption. » Sur sa lippe églantine fleurit un sourire alors qu'elle se dirigeait vers un présentoir en bois ouvragé, faisant grincer les gonds alors qu'elle l'ouvrait, glissant ses doigts sur la garde ciselée d'une rapière. Sous la caresse mordorée du jour se révélaient en filigranes deux rugissants fauves, gueule bée, croisant les griffes au-dessus d'une rose burinée dans l'argent émaillé, empanachée de ronces qui s'étiraient sur la tige avant de ceindre la taille des lions pour les lier. L'acier solvite était le plus redouté, puissant métal aussi acéré qu'il semblait indestructible. L'épée à la main elle revint près de sa garde du corps, lui présentant la garde de l'arme pour qu'elle s'en saisisse. « On me l'offrit à l'occasion de mon septième anniversaire. Juste avant que Synric me quitte pour les Tours d'Airain... » Elle passa un pouce sur les festons qui ornaient le pommeau. « Synric se vit offrir une rapière identique, qu'il rompit à Askevale. Sans sa jumelle, elle dort à Fortrekke et ce depuis des décennies. J'ai toujours préféré les mots aux glaives... » Ses doigts se détachèrent de l'arme alors que Blaze s'en saisissait. La nostalgie était un mal qu'elle s'infligeait depuis trop longtemps déjà pour ne pas regretter son euthanasique étreinte. « Puisse-t-elle connaître avec vous des jours plus glorieux qu'avec moi. » Levant vers Blaze de smaragdines prunelles, elle laissa un sourire farder ses joues. « Merci pour votre honnêteté, Blaze. » Puis elle se détacha, jetant un dernier regard aux spectres qui vacillaient dans l'éclat cuprique d'un jour qui agonisait, fuyant comme les réminiscences brûlantes qui avaient jadis enflammé son épigastre pour ne laisser en elle que vacuité mortifère et vésanie atone. « Rentrons. »

Et une fois de plus Fortrekke se refermait sur ses fantômes.
Cette fois pourtant tout était différent.
La liberté ne se donne pas, elle se conquiert d'abord sur soi même.

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