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 Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)

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Dralvur Snowhelm

Ours cendré d'Ibenholt

Dralvur Snowhelm
Ours cendré d'Ibenholt
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MessageSujet: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyDim 20 Avr - 1:08

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Soupirs exaltés, promesses encensées.

jora & dralvur
Quels dédales incommensurables que ces royaumes oubliés de tous – de tous, sauf des petites gens. Drapé comme de coutume par une tunique cobalt aux lueurs sombres, le seigneur s'avance depuis maintenant de longues minutes – si ce n'est bien une heure – dans les couloirs étroits du palais, ceux habituellement sillonnés par les serviteurs et les quelques factionnaires terminant leur ronde. Discret comme le soleil qui s'en est allé rejoindre sa couche, il lui arrive pourtant de croiser quelques hères affairés qui ne remarquent pas même sa présence. Jernvugge se distille depuis plusieurs jours déjà en une excitation palpable, ébranlant çà et là le palais pour les incroyables préparatifs du grand bal. Les cuisines s'agitent, la Cour s'émeut et ce n'est plus qu'un ballet d'artisans qui défile sous les hautes alcôves. Une véritable marée pour l'ascète qu'il est, ne manquant toutefois pas de sourire face au soubresaut des festivités chamboulant les figures de multitudes de risettes et éclats joviaux.
Pourtant, une rengaine tourne dans son crâne qui, s'il n'était déjà pas coiffé d'un crin argenté, aurait assurément participé au blanchiment de ses mèches. Et qui d'autre, sinon que la princesse Jora, pouvant dérober à ce point culminant les pensées du lord ? Depuis qu'il est question de la faire évader de sa cage dorée, Dralvur ne vit plus que pour voir cet accomplissement. Hélas, fort peu miraculeux, voire suspicieux. Mais il ne peut, pour l'instant, se soucier de tous les paramètres. L'aide précieuse apportée par la reine Sylarne aurait de quoi soulever nombre de questions. Des questions qu'il se refuse à élaborer tant que Jora se trouve encore enfermée. Une fois son effigie loin, une fois sa vie en sûreté, alors, et seulement alors, pourra-t-il se permettre de dépenser le restant de son énergie à sonder les tortueux plans de la Clanfell.

La journée entière a été dédiée à la chasse. Une traque lente et tenace, menée de front à travers tout Jernvugge. Où peut-elle bien être ? Car telle est la question. Il ne peut se résoudre à la laisser partir sans avoir pu, au moins une fois, l'approcher en huis clos, sans tous ces roquets menaçants pour veiller à ses moindres fréquentations. Pouvoir dialoguer sans crocs et venins hissés pour tout étendard, pouvoir prendre le temps de se regarder en face sans devoir bafouer les orbes d'écœurements factices. Leur dernière altercation, bien que théâtrale, ne lui a laissé qu'un arrière goût amer. Une sensation d'échec. Si ce n'est politique, au moins sentimental. Ils ne peuvent se quitter sur de telles avanies, pas en ignorant quand seront leurs retrouvailles, ni même si retrouvailles il y aura. A cette vaste constatation, autant cruelle que réaliste, il sent son cœur se serrer avec nausée, obligeant son émail à se concasser de peine. Le grand bal approche, oui, et, avec lui, un nouveau chapitre pour l'héritière Ebonhand auquel il ne pourra parapher sa complicité. Son concours, oui, espère-t-il sincèrement, mais à des lieues de l'opale figurine à la cascade nacrée.

D'après ses plus frais renseignements, le roi laisse, parfois, sa jeune captive aller se promener à la bibliothèque du palais. Ce n'est là qu'une rumeur, tout au plus récupérée plutôt qu'extorquée, puisque, constamment, il lui faut être vigilant. Où va-t-il ? Que fait-il ? À qui parle-t-il ? Que mange-t-il et même que chie-t-il ? Il ne doute guère de la compétence professionnelle des espions de la Cour. Loin s'en faut. En tapinois, il lui a fallu rejoindre les tripes de Jernvugge, prenant d'amples détours pour mieux semer ses possibles spectres.

Et le voici enfin arrivé dans l'immense salle de la bibliothèque, hauts plafonds, relents de poussière malgré une atmosphère paisible voire douillette, il lui semble être seul. Pas un seul éclat de voix trahissant la présence d'un quidam, quelques rares lampes à huile enflammées et disposées de manière éparse projetant des ombres sinistres sur les étagères en bois ouvragé. A pas feutrés, il s'avance vers le fond, prenant garde à tendre l'oreille au moindre signe de visite et finissant par s'assoir dans l'un des fauteuils jonchant quelques sombres angles.

Plus de deux heures s'écoulent. Interminables soupirs qui meurent dans sa gorge tandis que son esprit finit par se faire une raison : elle ne viendra pas. C'est une évidence. S'offrir à ce point au hasard ne peut qu'être le vœu d'un sot et, avec humeur, il referme le volume lourdement relié de cuir jusqu'alors parcouru. En allant pour se relever, un bruit de gonds le dérange dans son mouvement, l'obligeant à se rassoir prestement et sans un bruit, rendu muet par son intensive écoute. Quelques phonèmes graves lui parviennent, et puis celui plus délicat et éthéré de Jora. Enivré d'une satisfaction brute, il décide de quitter son assise, de remettre l'ouvrage à sa place et de camoufler sa massive carrure comme un bambin le ferait, derrière l'un des rayonnages. Il la discerne entre les interstices s'avancer seule dans la salle, débarrassée de ses gardiens attendant supposément devant l’huis de la bibliothèque. Par choix ou par ordre, qu'importe ; il ne pouvait rêver mieux. Contournant les boiseries par le flanc opposé, il finit par s'approcher de la princesse telle une ombre parmi les ombres, prostré dans son dos avant de la séquestrer à bout de bras, une paluche chaude sur la pulpe rosée. Il serait stupide de la pousser à la faute par un quelconque cri d'alarme, car il est bien conscient qu'une telle approche est loin d'être la plus douce et courtoise possible.
« Shhh … », expire-t-il d'un ton bas, les lippes fichées contre le lobe d'oreille, l'enlaçant plus que l'enclavant. « C'est moi, Altesse. » Il lève son menton pour constater les dégâts auditifs, mais la distance les séparant des factionnaires leur permet le murmure. Aucun des deux gardes ne paraît suspicieux. Il en revient alors à l'enfant qui, au galbe emmuré contre son torse et son bras, ressemble dorénavant plus à une femme qu'à la gamine jadis connue et aimée comme sa propre fille. Sans desserrer, il s'enlise davantage à l'étreinte qu'au véritable maintient, oubliant quelques brefs instants leurs masques respectifs et se perdant dans la chaleur des deux corps joints, le souffle pesant et les paupières de fer. Il se décide finalement à la délivrer non sans une salve de honte brûlant sa carne.
Retirant tout contact, leurs calots s'ancrent avec ce qu'il attendait secrètement : de la sincérité. « C'est le seul moyen que j'ai trouvé pour que nous puissions nous entretenir en privé, veuillez en pardonner l'aspect rustique », chuchote-t-il, se parant d'un bref sourire respirant une quiétude oubliée depuis plus d'un mois. Depuis l'incarcération de Jora.    

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Jora Ebonhand

Perle de Nacre

Jora Ebonhand
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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyDim 20 Avr - 17:26



A
lors qu'elle avait craint l'obscurité d'une sorgue fictive, un simple voile opaque jeté sur sa cage, elle voyait à présent poindre les nuances aurorales venues chamarrées ces cieux sans astres. La nitescence de l'espoir se précisait au même titre que les nuances chaudes et séraphiques d'une aube inédite, merveilleux augure d'un jour qui, s'il tardait encore à se lever, amènerait avec lui une canonnade de métamorphoses pour le jeu des trônes. Au plus les journées s'écoulaient dans leur usuelle rengaine, au plus il lui semblait apercevoir les signaux sibyllins du complot qui secrètement s'ourdissait. Qu'il était à la fois étrange et réconfortant de savoir que de grands hommes mettaient leur vie et leur honneur en péril dans le seul dessein de la secourir, qu'elle n'était pas omise, elle qui avait encore tout à prouver sur le plan d'une virtualité souveraine. Si Jora s'était toujours sentie unique aux prunelles de son père, se sentir importante et même fondamentale aux yeux d'autres que lui, d'individus qu'elle n'avait pour la majorité jamais rencontrés, enfantait une émotion... enchanteresse. C'était à peine croyable, ce qui se fomentait dans l'ombre pour la dernière Ebonhand, et il ne s'agissait que des prémices de ce que le destin lui réservait. A l'horizon, l'étincelante voilure du futur qui, sur la houle du fatum, brimbalait avec orgueil et maintenait son cap. Elle avait hâte de goûter à cet embrun, celui de la liberté et d'un héritage spolié. Le dernier signe de bonne fortune s'était matérialisé sous la forme d'une elfe, le retour inopiné d'Irinwe auprès d'elle l'avait transcendée d'une incommensurable joie et, avec elle, la gouvernante avait transporté une nouvelle goulée d'espérance. Qu'il lui paraissait soudainement lointain, ce temps où son esprit se triturait et se tourmentait quant à savoir si, hors des enceintes de jais, les ouailles de la Main l'avaient oubliée, ou s'étaient résignées à courber l'échine devant le Freux pour mieux se préserver. L'âcreté de sa captivité s'était considérablement bonifiée et son fardeau lui était moins pénible, même si elle se languissait de l'instant où on la guiderait hors de Jernvugge pour lui faire humer l'air pur des landes middholtiennes. Elle tâchait de ne pas laisser le vice de l'impatience avoir raison d'elle et de tous les efforts que l'on déployait intra et extramuros, il fallait attendre, encore un peu...

« Vous me harassez ! » Cingla la voix de sirène, sans réellement attirer l'attention environnante qui, accoutumée à ses éclats térébrants, préférait se concentrer sur les préparatifs de la commémoration à venir. Prendre son mal en patience, certes, mais cela ne signifiait pas que la donzelle avait le devoir d'escompter en silence, ou diaprée d'une circonspection qu'elle n'avait que peu eue depuis sa sujétion. Si acrimonie elle se sentait d'humeur à déverser, elle ne regarderait pas à deux fois sur son attitude que d'aucuns disaient indigne pour une lady de si haute naissance. Les maux de l'incertitude s'étaient apaisées, mais pas ceux de la rancoeur, viscérale et sempiternelle envers des détracteurs qui lui avaient tout pris. Elle n'avait cure que Jorkell se plaise à lui octroyer davantage de libertés, surtout pas alors qu'elle subodorait qu'il avait juste d'autres occupations auxquelles vaquer plus qu'une réelle envie d'être généreux envers elle. Qu'ils soient dix, six ou deux, elle demeurait insatisfaite de voir les gardes la talonner au moindre de ses gestes, en particulier alors que leur vigilance était à mille lieues d'être constante bien que toujours nuisible pour une quelconque incartade. Et alors qu'elle n'avait point vu les sentinelles depuis la matinée, voilà que celles-ci avaient soudainement pris l'initiative de l'escorter à travers le palais. Aussi discrètes qu'efficaces... « Pourquoi n'iriez-vous pas voir ailleurs si j'y suis ? Je ne risque pas de me jeter du haut des remparts, ni même de m'ouvrir les veines avec un objet contondant si telle est votre crainte ! Les ordres sont les ordres princesse. » Des instructions qu'ils respectaient selon leur bon vouloir, visiblement, un fait qui eut le don d'exaspérer la nymphette. « A l'Abîme votre prétendue discipline, qui croyez-vous leurrer ? Huh ! Fort bien... » La lutte serait vaine, elle le savait pour l'avoir déjà tentée un bon nombre de fois. Alors, elle reprit simplement sa route en direction de la bibliothèque, où une fois devant les immenses huis, elle s'immobilisa. « Où pensez-vous donc aller ? Vous accompagner à l'intérieur... ? Que nenni roquet, il n'y a point d'autres issues dans cet endroit, je ne vous fausserai pas compagnie. Et j'aimerais m'instruire sans sentir vos regards sur ma moelle, est-ce trop demander ? » Les quidams se guignèrent, puis acceptèrent de se mettre en faction devant les portes. Un soulagement comme un autre.

Après un soupir, Jora progressa enfin dans l'antre littéraire. Elle s'engouffra dans l'une des allées pour se rendre directement à la section souhaitée, pleinement centrée sur la lecture des titres d'opuscule, sans se douter un seul instant du nouvel Acte qui allait se jouer. Sa menotte s'approcha d'une couverture désuète, lorsqu'à brûle-pourpoint, l'on se saisit d'elle. Harpée comme un trésor de rapine, elle sursauta et crut voir son coeur bondir hors de sa poitrine. Les yeux écarquillés, un bâillon de chair sur ses lèvres et un étau de muscle à sa taille, une salve d'hypothèses folles eut le temps de traverser son esprit et elle pensa vivre là ses ultimes secondes. La théorie qu'elle jugea la plus probable mettait en scène un meurtrier furtif venu débarrasser Ibenholt de la plaie argentine qu'elle était. Non, pitié, elle ne voulait pas finir ainsi, la gorge tranchée et le faciès abject de son assassin comme vision terminale. Un glapissement se prépara dans sa cavité gutturale, prompt à donner l'alerte tandis qu'elle grifferait et mordrait toute carne à portée. Mais une voix. Cette voix... mit un point d'orgue à son piètre pancrace. Terrorisée, elle lorgna pour reconnaître le hâle et les cendres de l'Ours féal qui venait peut-être de lui faire la plus belle peur de toute son existence. Si elle daigna calmer son envie de vociférer, elle n'y parvint avec son eurythmie chaotique qui pulsait à ses tympans et faisait monter le pourpre à ses joues. Où était-ce le brasier de la promiscuité qui, même obligée, restaient troublante ? Elle déglutit, docile, et s'appliqua à reprendre son souffle lorsque l'adonis la relâcha.

L'Ebonhand fit volte-face, encore choquée, une main sur son décolleté azurin pour pacifier les ardeurs de son palpitant pendant que son esprit cherchait lui aussi à s'éclaircir. Elle le contempla avec décontenance, l'émotion trop vivace que de mirer le chatoiement dévoué dans le charbon de ses calots. Elle avait du mal à concevoir qu'ils se trouvaient derechef en scène, mais cette fois si loin des oeillades curieuses et dérangeantes d'un public déshonnête. Il avait couru tant de risques seulement pour ce conciliabule, et osait encore se confondre en excuses. Le minois de Jora se peignit d'une inqualifiable détresse, comme si la seule présence du Snowhelm suffisait à ébranler et écarteler les pans de son masque d'actrice. Elle sentit l'émoi, la lave du branle-bas grimper en crue et décomposer ses traits en une expression qu'elle n'aurait jamais dû arborer en pareilles circonstances. Elle sembla à l'orée de l'irruption, de la pâmoison, de la perdition et de tout ce que l'on désirait d'autre. Puis, sans crier gare, elle s'élança, éperdue. « Dralvur... ! » Un hurlement dont elle ne fit qu'un susurre à demi étouffé, car les effusions des retrouvailles allaient devoir se faire autrement que par les cris. Elle se plaqua un peu trop violemment à la charpente du lord et l'étreignit à l'image d'un naufragé à son récif, supputant que sa poigne même au maximal de ses capacités serait incapable de causer le moindre mal à pareil galbe. Le sanglot s'étouffa dans le cobalt de la tunique, où elle aurait aimé pouvoir épancher toute sa peine. « Je suis... je suis si contente de vous voir ! » Elle frotta doucement son front contre le textile, camouflant son visage crispé et les larmes qu'elle sentait fleurir à ses cils. « Merci ! Par Catharsis, merci, merci ! Merci de ne pas m'avoir abandonnée, j'avais si peur de me retrouver toute seule ! » Une flopée de réminiscences l'assaillit, celles-là qu'elle se forçait à occulter face au monde, pour mieux humecter ses traversins des perles saumâtres de ses mirettes. Même devant Irinwe, elle s'était refusée à pleurer, mais ici, avec lui... peut-être portait-il inconsciemment la fragrance de son défunt père, lui rappelant qu'elle s'était tenue droite et fière lors de son exécution et lors de ses obsèques. Elle les avait toujours vus ensembles, suzerain et vassal, mais surtout amis. Sans le vouloir, le seigneur endommageait l'égide que la jouvencelle s'était forgée, et ce fut une mine affligée qu'elle releva vers lui. « C'est terrible... c'est abominable ce qu'il s'est passé... tout ceci... depuis le début cela n'aurait pas dû être... ! » Il était le seul qui avait eu l'occasion de discerner les vraies qualités d'Hulgard à travers le voilage de ténèbres, le seul avec lequel elle se sentait encline à en parler.

Les yeux scintillants de mille feux, elle renifla doucement et se fit incroyablement violence pour ravaler des larmes qui n'avaient pas encore coulé. Il n'y en eut qu'une, hardie, qui goutta sur sa pommette, alors qu'elle plongeait corps et âme dans les onyx de son vis-à-vis. Ses phalanges graciles vinrent s'apposer sur la joue à la toison rugueuse, la même qu'elle avait malmené d'une gifle magistrale lors de leur esclandre à la cour. Ce fut d'abord le dos de ses doigts qui s'y perdit, puis la pulpe, dans des caresses qu'elle voulut conjuratrices. « Je suis désolée, tellement désolée pour l'agression de l'autre fois... et pour cette claque... qui restera dans les annales d'Ibenholt... » Le commentaire lui arracha un ricanement délicat, puis une frêle risette encore timorée.

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Dralvur Snowhelm

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyDim 20 Avr - 20:14

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Soupirs exaltés, promesses encensées.

jora & dralvur
Comme elle est troublée, la douce tourterelle, encore secouée par le choc brutal de son jeune corps contre la falaise. Des éboulis indisciplinés ayant parcourus la nymphe aux atours d'azur, qui, avec un peu moins de flegme chevaleresque, se seraient certainement laissés aller un peu plus à la contemplation tangible. Mais si le seigneur croyait s'être enfin débarrassé de la muse irrévocable de ses sens primitifs, il se voit subitement séquestré à son tour par une vigoureuse étreinte suppurant de déréliction. Un flot candide non moins dénué d'affliction, qu'il lui faut endiguer de ses larges bras dans lesquels la brindille n'est plus qu'éphémère silhouette. La peine de la femme-enfant soulève bien nombre de barrières chez l'auguste banneret, qui ne saurait souffrir de la voir plus encore chagrinée sans la recueillir comme le ferait un père. Prise par la taille et cajolée du crin par une autre paluche, il engloutit l'effigie avec soin et calme, mutique par respect, prophète d'une sagesse dont les mots sont exempts. La chaleur humaine, l'affection des cœurs cognant à l'unisson, voilà bien le seul baume pouvait dulcifier les vicissitudes compréhensives de l'héritière Ebonhand. Aucun quidam pour souffler un quelconque outrage, si ce n'est les auteurs séculaires des volumes les entourant, rendus poussière voilà bien des siècles auparavant. Le sieur, ivre d'une tendresse meurtrie, finit même par gratifier la cascade d'or d'un long baiser pudique. Un sceau de protection honoré par, il l'espère, les dieux eux-mêmes.
« Ne craignez pas la solitude, Altesse. Être évincé des regards ne signifie pas être dérobé aux cœurs. » Maladresse rhétorique et si impersonnelle, pour enseigner Jora de son plus fidèle dévouement. Que peut-il bien dire, affirmer, ou même jurer pour la rassurer à jamais, sinon qu'un chapelet de mots aussi mirifiques que plats, car tant et tant réitérés par la race des hommes envers leurs idoles. Paix, mon enfant, laisse tes larmes couler et ton âme s'épancher, souhaiterait-il tant lui murmurer.  

Leurs carrures dissemblables s'éloignent enfin. « Cela n'aurait pas dû, vous avez mille fois raison, et pourtant … Je crains qu'aucun autre horizon que le Déclin même ne puisse être considéré, une fois que les êtres s'assoient sur le trône. C'est un fait dont on m'a de nombreuses fois fait part et que je refusais jusqu'alors d'envisager … » Sombres paroles que voici. Parle-t-il d'une malédiction sibylline jaspant les reliefs de jais, ou de l'incapacité cyclique des souverains à honorer leur miséricorde et leurs vertus passées ? Las et l'esprit noirci, il balaye ses imprécations d'un rictus aigri. Quel sot fait-il d'alourdir le fardeau de Jora de telles médisances, n'a-t-elle pas suffisamment à faire avec ses propres doutes ? Peste soit-il ! Le reflet de la larme perdue sur la carne ivoire sermonne à lui seul les palabres du seigneur avant que la fine menotte ne vienne sillonner sa gueule parcheminée par une vie éprouvante. La douceur apaise ses maux et le verbe de la princesse achève de lui extorquer un discret sourire. « Certes. Rappelez-moi de ne jamais vous fâcher, j'ai fait la guerre et subit bien des colères, mais la vôtre est semblable à celle d'un volcan en effusion. Je n'ose imaginer la véhémence dont vous auriez fait preuve à mon égard si votre rage avait été réelle … ! » Il lui faut parler d'un ton bas, et pourtant, son timbre rutile avec amusement. Voire fierté.

L'attirant par les épaules pour la noyer un peu mieux dans la pénombre des hautes étagères et renforcer leur conciliabule clandestin, il enchaine, l'air cette fois soucieux et grave : « Jora, s'il me fallait absolument vous voir c'est parce qu'il s'agit certainement là de nos adieux. Je dois vous faire part de ma décision. Celle de rester au palais après votre fuite, mais je ne pouvais décemment en arriver à cette  péroraison sans vous en informer au préalable. Je sais que vous ne doutez pas de ma loyauté – je l'espère, tout du moins – mais il m'aurait été douloureux de vous savoir partie sans me justifier a minima. Ma place est ici, mon poste au sein du Conseil me confère un avantage non négligeable dans la pyramide politique du royaume, un rôle qui, je le crois, pourra vous servir une fois évadée et en lieu sûr— », un bruit furieux l'interrompt, on vient de cogner contre l'huis de la bibliothèque, mais aucun phonème ne donne suite. Peut-être n'est-ce qu'un mauvais geste des roquets qui s'impatientent en piétinant le sol et, par conséquent, se laissent peser tout contre le bois des portes. Revenant à la lady, il soupire et reprend : « Qu'importe, je ne vais pas vous assommer avec mes apologies, sachez juste que ma dévotion vous est acquise, même si je reste dans le nid des Freux. Je ferai en sorte de vous apporter au mieux mon soutien, aussi longtemps qu'il me sera possible de le faire », conclut-il doucement, loin de s'empêtrer dans une solennité ridicule. « Cependant, Altesse, laissez-moi vous mettre en garde. Certaines grandes figures de ce monde chercheront à faire couler le vin dans votre coupe, mais gardez-vous bien d'en boire la moindre goutte. Les flatteries et les promesses sont les armes de la trahison, ne vous détournez pas de votre vigilance, même lorsqu'il vous semble être en présence d'alliés. Considérez toutes vos rencontres avec méfiance, que votre interlocuteur soit un prince comme un badaud, et ne vous laissez jamais aller à l'impétuosité. Endiguez votre colère avec sagesse, ne la perdez pas en énergie disparate, concentrez-la sur vos ennemis, faites-en une épée dont seul vous connaîtrez le reflet. »

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Jora Ebonhand

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyLun 21 Avr - 15:13



D
ralvur ne couvait aucune rancoeur, pas une seule flammèche vindicative à l'horizon – et par tous les dieux, quel délicieux onguent sur les lésions inquiètes de la colombe. Qu'il continue à oeuvrer tel un affidé des Ebonhand, elle en avait eu confirmation auprès d'Irinwe, ne signifiait pas que leur relation était exempte de griefs. Une allégeance aussi fervente était-elle n'alléguait pas tout, elle ne l'avait pas seulement tancé d'abominables catachrèses, ni n'avait fait qu'estampiller l'héraldique de sa maison sur sa joue, elle l'avait littéralement tourné en ridicule au vu et au su de tous. Une avanie dont toute la cour se souviendrait et dont le souverain avait très probablement été informé, et même si la démarche avait été à la fois nécessaire et fructueuse, elle n'avait pu empêcher un carcan de culpabilité de lui ceindre la gorge dès lors qu'elle avait été emmenée loin de lui, sans plausibilité de voir si sa mystification avait été efficace. Elle avait craint que non, et auquel cas, elle aurait été incapable de recroiser sa route sans s'empourprer d'opprobre. Avec ce conciliabule, un nouveau chapelet d'angoisses prenait son essor et dépurait son fardeau, la perle lacrymale dont ne demeurait plus qu'une vague rigole sur sa pommette était fille d'affliction, certes, mais aussi de soulagement. C'était là toute la duplicité des larmes. Et déjà, le chagrin s'estompait au profit de la consolation et d'une frivolité qui, si elle semblait hors de propos avec les désastreuses circonstances dans lesquelles ils évoluaient, était démesurément salutaire. Le ricanement pusillanime de la demoiselle se transfigura en rire plus prononcé, un succinct éclat diaphane sur cette toile enténébrée. Un volcan en effusion ? Elle se rappellerait de l'allégorie et promettait de la lui brandir à la moindre occasion, car l'idée d'avoir toujours été une puissance de la nature seulement assoupie lui plaisait fortement. « Je n'ai pas tellement envie de le découvrir à dire vrai... » Elle avait tout de même souri, heureuse de ne pas avoir à démontrer l'étendue éruptive d'une véhémence qu'elle se découvrait à peine et qu'elle avait un mal considérable à contrôler. Elle non plus, n'osait imaginer de quel acte fou elle aurait été apte si son ire avait été véritable, elle craignait qu'elle n'eût pu réfréner ses ardeurs vengeresses au point de lui bondir à la gorge pour lui crever les yeux. Et pourtant, c'eût été tout sauf la bonne attitude à adopter, en particulier sous les regards des sujets royaux.

Soudain, les traits d'esprit semblèrent toucher à leur fin, et se pelotonnant un peu plus dans la pénombre conjuratrice des étagères, Jora écouta avec autant d'attention que d'appréhension le discours de son interlocuteur. Elle ne connaissait que trop bien cet aspect grave sur la gueule ravinée de l'Ours pour savoir qu'il n'était plus question de badiner, les périls tant que les enjeux étaient réels, primordiaux, non pas juste pour eux. Et plus les syllabes défilèrent en flot hâtif et sans pitié, plus la belle sentit une phobie intuitive lui prendre les viscères et ascensionner son oesophage pour corseter son gosier. Rapidement, elle ne parvint plus réellement à suivre le fil des informations tant la panique fit renaître les palpitations de son pauvre coeur taraudé, son minois se secoua frénétiquement de gauche à droite tandis que ses lippes d'incarnat se mouvaient sans son. Puis, elle soubresauta comme si la Corneille en personne s'était introduite dans l'antre littéraire. « Hiii ! » Couina la pauvrette en appliquant ses mains sur sa bouche, enfant terrorisée qui devait encore apprendre à dompter ses peurs. Ses mirettes biaisèrent vers l'allée principale où un spectre susceptible d'étêter tous leurs efforts aurait pu apparaître, ce qui ne fut heureusement pas le cas. Plus que jamais, peut-être, elle prenait conscience que tout ceci était à mille lieues d'être un jeu, et que la moindre erreur pourrait coûter horriblement cher. Le Snowhelm reprit ensuite l'enchaînant plus encore à ce rocher qu'elle le voyait jeter à la mer pour la faire couler à pic. Il avait entièrement raison, elle le savait, et l'ensemble de ses conseils était à nieller en lettres d'or dans ces méninges dont elle aurait plus que jamais besoin. Mais... Dralvur l'effrayait, et il n'en avait vraisemblablement pas conscience. Il n'eut qu'à peine le loisir de ponctuer sa tirade que la jouvencelle agricha sa tunique comme s'il allait s'évanouir dans le néant si elle ne le retenait pas.

« Non non non non non non ! » La négation sortit en kyrielle sans qu'elle ne puisse la retenir, et à l'instant t, elle sembla hermétique à tout ce qu'il pourrait lui dire. « Non non je ne vais nulle part sans vous ! Vous ne pouvez pas me laisser, ne m'abandonnez pas dans un monde dont je ne connais rien, je vous en prie ! Je-vous-en-supplie ! Je n'y arriverai jamais sans vous à mes côtés, vous êtes là et... et vous avez toujours été là et avec Irinwe vous... vous êtes tout ce qu'il me reste ! Vous n'avez pas le droit de ne pas être avec moi, non, je vous l'interdis ! » L'Ebonhand prononçait ses vers comme l'on annoncerait une funeste prophétie, sans coupure mais dans un afflux ininterrompu et brisé par une terreur qu'elle n'était plus à même de farder. Sa voix oscillait d'émotion et les larmes qu'elle s'était naguère échinée à retenir refirent surface dans l'azur de ses prunelles. « Vous entendez ? Vous ne restez pas à Jernvugge, c'est un ordre ! » Entre supplique, sommation et raison, Jora ne savait plus sur quel pied valser, et puisqu'elle refusait d'entendre Dralvur éconduire ses tentatives, elle ne lui ploya pas la possibilité de répondre et poursuivit. « Je... je sais que vous avez votre place au Grand Conseil et votre... votre fief, mais... votre famille a toujours été près de la mienne et... je ne suis pas mon père, je ne suis pas encore assez forte pour survivre dans ce cloaque de dévoyés, comment vais-je savoir à qui me fier si vous n'êtes pas là pour me guider ? J'ai besoin de vous, Dralvur, je suis... littéralement terrorisée de ne pas être à la hauteur, et pourtant je vous jure... je vous jure sur ma vie, sur mon nom... sur mon héritage que je le souhaite sincèrement !  Je ne veux pas fuir face à mes démons, je ne me suis jamais sentie exister avant aujourd'hui, ce qui est d'autant plus dramatique ! Je suis... la dernière Ebonhand sur cette terre, si j'échoue, ce sera bien plus que moi qui s'éteindra, je veux tellement être digne de mon patronyme, de son histoire et de toutes ses ouailles... Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir et ce jusqu'à mon ultime souffle, mais que se passera t-il si ce n'est pas assez... ? »

Avait-on idée de la croix que la nymphette portait ? Couvée et mise à l'écart pendant vingt ans, jusqu'à ce que, du jour au lendemain, son hoirie entière lui tombe sur le crâne. Hulgard n'avait pas élevé une sotte, mais il ne lui avait jamais offert les instruments adéquats pour se défendre, lui qui avait pensé pouvoir être l'égide de son enfant jusqu'à la nuit des temps. Jora se savait être un symbole qui n'avait aucun droit de flancher devant ses gens, elle s'était tant persuadée qu'il lui fallait être infrangible qu'elle en avait omis qu'elle était humaine... Humaine, inexpérimentée et sensible. Ourlée de fierté, de volonté et d'ingéniosité, mais il lui restait tellement à apprendre. Une lunaison qu'elle jouait à l'insoumise immodérée, et le retour de flammes de l'indicible brasier qui la consumait arrivait. « Et s'il n'y avait pas que le Trône de Jais qui était maudit ? » Interrogea la délicate vénus, sibylline dans ses pensées, avant de les éclaircir, plongée dans les onyx de son vis-à-vis. « Je crois que je suis maudite, vous savez... vraiment... Je le suis... » Elle faisait référence à cet incident vieux de cinq ans, où sa colère avait occis l'une de ses nourrices en la putréfiant. Cette ignominie, elle ne l'avait pas rêvée, elle le savait, et si elle n'en disait rien, elle la hantait depuis. Cependant, le seigneur qui ignorait tout ne verrait certainement qu'une fabulation épeurée, là où la colombe voyait une cruelle réalité.

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Dralvur Snowhelm

Ours cendré d'Ibenholt

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyLun 21 Avr - 17:44

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Soupirs exaltés, promesses encensées.

jora & dralvur
La princière colombe se hisse subitement avec véhémence, hâtant des injonctions aussi dissidentes qu'impitoyables, fêlant le seigneur de crevasses émues tant le fléau paraît n'être qu'une douloureuse affliction. « Calmez-vous », tente-t-il maladroitement d'apaiser l'enfant apeuré, lui qui, pour un royaume entier, engage son éloquente diplomatie. Mais l'administration politique ne se trouve en rien comparable aux déchirures d'une jouvencelle, plus encore celle-ci, qui décontenance l'Ours austère des montagneuses régions du nord. Que peut-il faire, ou dire, lui dont le phonème de gravier s'épargne la douceur du verbe. Lui qui, sinistre lord, n'a eu que des fils à conforter. Lui qui ne sait plus, depuis des lustres maintenant, estomper sa masculinité rustique pour apprivoiser la sensibilité féminine. Pis encore, il entend et comprend l'esclandre aphone de sa protégée, détournant par instants fugaces son portrait tanné, incapable de supporter le regard éploré de la princesse ; un azur bouleversé par une houle térébrante. « Ce n'est pas un ordre, c'est un caprice », s'entend-t-il proférer, certes le timbre bas, mais la gorge nouée d'une rudesse paradoxale. S'il lui est douloureux d'entendre la profusion craintive jaillissant de l’Ebonhand, il peine toutefois à se défaire de ses atours d'homme de guerre qui ne saurait, en cette occasion et sous de telles circonstances, abreuver l’asthénie de l'héritière. Les paumes hissées sur les flancs menus de la lady, il enserre comme un étau le ferait, se gardant toutefois bien de lui infliger quelconque douleur. « Maudite ? Allons bon ! » Las de la voir s'agiter comme une fleur juchée sur falaise, il finit par lui dérober le visage entre ses paluches, l'obligeant à faire face comme il le sommerait à l'un de ses soldats.

« Regarde-moi Jora, et cesse donc ! » Brutale, la familiarité s'invite en s'excavant de la lourde poussière antédiluvienne. Jadis, il n'était pas rare qu'il abandonne le vouvoiement bienséant lorsque, seul ou avec Hulgard, il se retrouvait en présence du visage poupon clairsemé de mèches nacrées. Plantant férocement ses orbes sombres dans les calots glacés de l'Ebonhand, il poursuit : « Tu n'es pas maudite, et quand bien même ! Ne le sommes-nous pas tous ? Nous naissons damnés par un crépuscule hasardeux, que nous soyons nés dans de fastes étoffes ou entre d'immondes oripeaux, chacun de nous est voué à souffrir, à craindre et à supporter jusqu'à ce que nos os redeviennent poussière. » Ses phalanges s'imbriquent un peu plus dans la fine carnation, et ses lippes, tordues par les affres, poursuivent en jaspant ses yeux de brumes affligées. « Ne crois-tu pas que mon fils était maudit, lui aussi ? Jedath, te souviens-tu de ce fier garçon empli de vie ? Ton âge ! Il avait ton âge lorsque les dieux l'ont rappelé à eux, mis en offrande pour une guerre dont il ne connaissait pas la moindre aspérité. Il avait tant de choses à vivre encore – l'amour d'une femme, la fierté d'un père, l'orgueil d'un seigneur et la paix d'un vieil homme. » La broussaille cendrée se met à trembler sous les lèvres, mais avec ferveur, il poursuit, ravivé par une ardeur de fer : « Ne fais pas de ton âme une proie, ne la victimise pas. Quels que soient les obstacles, relève-toi toujours, c'est à mon tour de t’interdire la faiblesse d'esprit. Tu es jeune, c'est vrai, femme dans un monde d’hommes, qui plus est. Je conçois tes frayeurs et tes doutes face à l'autel des responsabilités devant lequel ton rang te place. Mais au nom de tous les fils qui sont tombés, de tous les pères qui ont pleurés, relève-toi toujours. Tu n'es qu'à ton aube, on ne te demande pas de briller incessamment, souviens-toi de ceci : quoi qu'en disent les livres et les usages, on ne naît pas reine, on le devient. Je ne suis qu'un grain de sable parmi tous les êtres qui n'attendent que de t’épauler, peut-être même ne te verrai-je jamais régner, et puis quoi ? Vas-tu miauler des pleurs de pénitence et te reclure dans une caverne d’effroi une fois mon ultime départ ? Bons dieux, Jora ! », lui remuant d'un à-coup vif mais indolore le minois, il termine par rabaisser ses épaisses mains en reprenant un ton plus adouci, balayant au mieux les vagues sillonnant ses affects. « Tu te rendras au sud, rejoindre Ehvan Clanfell. Il sera ton pilier, ton phare. N'aies crainte, tu ne seras jamais seule, jamais abandonnée. » Le gosier asséché par son long monologue, il déglutît en retrouvant un flegme placide et un mutisme contrit.  

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Jora Ebonhand

Perle de Nacre

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyMar 22 Avr - 18:18



P
ourquoi fallait-il que l'on remue les lames affilées déjà fichées dans sa peau, tranchant dans sa chair jusqu'à aller gratter l'os et la moelle... Elle avait déjà perdu l'unique parent qu'elle avait jamais eu, et voilà que Dralvur semblait lui sonner le glas de leur relation. Jora ne connaissait pas le goût des adieux, seulement celui de l'intraitable perte, celle que l'on ne voit pas amarrer au port de notre vie. Cette sapidité saumâtre tel du sel en bouche ne lui seyait pas, ou peut-être... n'étaient-ce que la saveur de ses larmes qui s'infiltraient depuis la commissure de ses lèvres, torses et tremblotantes. Déjà prompte à se claustrer dans un phylactère de dénégation, son intempérance affligée fut brusquement endiguée par la poigne ferme du noble sieur qui confronta l'onyx au turquoise. Si la mouvance péremptoire abandonna la donzelle pantoise, la familiarité adventice qui réduisit l'usuelle bienséance en cendres acheva de l'ébahir. Elle omit tout de go ses pleurs et ces tribulations qui lui collaient au séant comme diptères sur un macchabée en putrescence, littéralement happée et décontenancée par le Feu sacré du Septentrion qui oeuvrait avec maestria. C'était comme contempler une merveille de la nature à la fois saisissante et effrayante, c'était pire qu'un arôme d'ambroisie, pire qu'une cantilène de sirène, pire que toute force attractive qu'elle avait connue jusqu'à présent. Les mots des Fils de l'Hiver n'était que salve cataleptique, et elle sut avant l'heure que la lutte serait vaine, elle ne pourrait empêcher le Snowhelm de pénétrer jusqu'à son âme pour la persuader de ses dires. Combien de fois les avait-elle vu échanger, le suzerain et le vassal, dans des envolées de rhétorique et de dialectique qui l'avaient toujours laissée admirative, car elle se savait incapable de faire preuve d'autant d'aisance orale. Le sceptre discursif n'était pas à prendre à la légère, ses un ou deux siècles d'espérance de vie ne pourraient rivaliser.

Elle l'écoute comme le Démiurge, se sustentant des proses comme d'une pitance qu'elle savait salvatrice et qu'elle avait pourtant du mal à savourer. L'arrière-goût des véracités n'était jamais appréciable, et, dieux, qu'elle aurait aimé objecter et lui cracher une argutie digne de ce nom pour le convaincre de son tort. Pour qu'il abdique et accepte de la suivre... Mais cela n'arriverait pas. L'évocation de Jedath fut comme des phalanges agrichant ce palpitant qui martelait et martelait encore, ajoutant une douleur suraigüe à son état cataleptique, elle qui aurait préféré mourir que d'obliger Dralvur à lui brandir l'argument de son défunt fils. Même s'il en montrerait peu, il devait atrocement en souffrir. Se remettait-on véritablement un jour de la disparition d'un être cher ? Entièrement ? Au point de ne plus ressentir une seule once de peine ni de regret lorsque les pensées bourlinguaient vers son souvenir ? Elle avait elle-même connu et adoré le regretté ourson, profondément outragée de le savoir mort pour les desseins autolâtres d'Hulgard. Là n'était toutefois pas la question, et l'Ebonhand se laissa morigéner à phonème bas par l'un des plus dévots de ses partisans à l'image d'une enfant devant son père. Les échos de la déclaration résonnèrent en maux distincts, mais elle ne pouvait ignorer la sapience des conseils plus longtemps. Cela aurait été indigne, insensé. Elle manqua de couiner derechef à la saccade finale, mais se retint et apposa ses poings serrés contre la pulpe de ses lippes, les yeux clos, tentant de se remettre de l'ouragan qui venait de passer.

Ce fut la honte qui surgit cette fois en voile rouge sur ses pommettes, et même si apprendre qu'Ehvan l'attendait bel et bien à l'antipode des landes la réconfortait, elle ne réagit pas à l'information. De longues secondes fluèrent sans un mutisme de saint, la colombe ravala la dernière houle de son émoi et se fit violence pour ne plus agir comme une fillette décérébrée. Jora se calma, guigna timidement les agates du lord, et se rapprocha. Une fois n'étant pas coutume, elle se lova contre le musculeux galbe avec infiniment plus de suavité que lors du premier essai, se pelotonnant contre lui comme si l'Ours avait été sa seule couverture dans la froidure hiémale. « Tu n'es pas très adroit avec les femmes, n'est-ce pas... » Un rire triste suivit le gentil quolibet, alors qu'elle positionnait son oreille sur le pectoral senestre du guerrier, à l'exact endroit de l'organe cardiaque qui le cadençait de vie. Que des fils, et une propension atavique à la fermeté du verbe, parce qu'il n'en nécessitait pas moins pour diriger un fief, une armée et une famille. Il n'avait pas côtoyé la délicatesse d'une fleur filiale, et n'avait plus eu celle d'une épouse pour l'adoucir. « Je préfère la chaleur de tes étreintes au givre de tes mots... Mais cela a au moins le mérite d'être franc... et efficace. » Elle aurait pu jouer les précieuses princesses offensées, mais à quoi bon ? Elle n'était pas sotte. Prosélyte dans le jeu des trônes, mais pas sotte. Elle ne voulait pas faire les mêmes erreurs que son géniteur et s'embourber dans  une opiniâtreté irraisonnable, alors, séchant ses ultimes larmes, elle se résigna. « D'accord... c'est d'accord... Je ferai comme tu le dis, je te le promets... Mais ce n'était pas un caprice... ce n'était... qu'une utopie... »

Le regard égaré sur une rangée de vieux ouvrages, elle se perdit aussi dans les vagues rassérénées de ses réminiscences. Si ce conciliabule devait véritablement être un au revoir, elle voulait violer les règles de bonne contenance et flirter avec la promiscuité jusqu'à ce que l'on vienne l'arracher aux pattes de l'auguste mammifère. Il pouvait lui parler avec autant de sévérité qu'il désirait, la sylphide ne chercherait pas moins cette tendresse substantielle qui la faisait renaître. Jora voulait être forte, oui, mais elle ne voulait pas oublier d'être sensible, d'être humaine. « J'aimerais que tu me fasses toi aussi une promesse, Dralvur... » Sans jamais relever le menton pour l'observer, chuchotant à sa cage thoracique comme si elle espérait atteindre son coeur plus que son encéphale, elle reprit. « Promets-moi que tu seras prudent... et qu'au moindre danger, tu déserteras l'aire des corbeaux pour me rejoindre plutôt qu'offrir ta carcasse même fière aux charognards de Jernvugge. » Les mirettes suspendues dans le vide, l'Ebonhand octroyait la parole à son intuition plus qu'à ce cerveau qui bouillonnait dans sa boite. « J'ai déjà perdu un roi, un père, je ne veux pas te perdre toi aussi, pas si je peux atermoyer cet ultime départ. » Ses paupières s'abattirent lentement, et apaisée par l'eurythmie de l'adonis, elle semblait sur le point de s'assoupir. « Hulgard n'était assurément pas le meilleur des monarques... mais il était un bon père, un père aimant tout du moins. Je n'ai jamais douté de son amour à défaut de ses méthodes, même s'il le méritait, je regrette de l'avoir exécré ces deux dernières années. Je trouvais presque satisfaisant de le voir blessé par ma froideur, après tout ce qu'il avait fait, je voulais qu'il souffre comme il avait fait souffrir... Si j'avais su qu'il disparaîtrait si tôt, au pied même de son trône, je ne lui aurais pas laissé croire que je le haïssais vraiment... Rien de ce que je dirai n'estompera ses péchés ni ne le ramènera, je le sais, il est loin désormais, à l'Abîme peut-être, mais j'aurais aimé pouvoir lui faire mes adieux. » Elle ne se lamentait pas, elle ne faisait qu'énoncer un fait. Ses phalanges allèrent quêter pour la main du Snowhelm, qu'elle serra et où leurs doigts s'entremêlèrent. « Il me manque... » Et qu'importait qu'il ait été bourreau, despote ou fou à lier.

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyMar 22 Avr - 21:59

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Soupirs exaltés, promesses encensées.

jora & dralvur
Une ombre de sourire traverse ses lippes rendues mutiques, témoignant de la véracité des jeunes propos. Que répondre pour authentifier la clairvoyance sagace de l’enfant ? Revenue dans ses bras, elle lénifie les maux térébrants du rude seigneur comme si elle en augurait les moindres faiblesses, les moindres fêlures par lesquelles se glisser pour le désarmer. Levant les bras pour l’accueillir dans un étau de muscles et tissus, il ravale son autorité pour soupirer une douceur de bête apprivoisée lorsqu’enfin, elle décide de porter attention à son verbe intransigeant. S’il ne se voit pas remercier son élève pour avoir acquis son enseignement, il ne manque toutefois pas de l’étreindre un peu plus – un peu mieux – contre son âme et essence réconfortés.
« Laquelle donc ? », s’enquière-t-il d’un ton bas, si peu audible, le portrait chutant dans la crin nacré de la vénérée lorsqu’elle l’intime au serment. Bien qu’épris d’une droiture impartiale adhérée à son esprit comme un haubert de fer, il se surprend à dématérialiser ses plus franches rectitudes au bon vouloir de Jora. Et la requête, tout aussi légitime que juste, ne manque pas de lui trancher les cordes vocales en le laissant aphone de toute réponse immédiate, l’obligeant à déglutir des monceaux falsifiés qu’il pourrait jurer comme incontestables. Les jeux politiques sont trop venimeux pour qu’il puisse préserver coûte que coûte son existence, lui qui, de sa vie entière, se consacre à la sauvegarde de l’héritière Ebonhand. S’emplissant de mystifications, certain de pouvoir altérer les angles de perception concernant lesdits dangers dont elle lui fait part, il entrouvre sa gueule pour couler un : « Je te le promets », bas et sincère. Ce n’est pas mensonge, si lui-même y croit un peu, bien qu’il se sente lentement envahi les turpitudes néfastes de la tromperie. N’est-il qu’un mentor incapable de respecter ses propres dogmes ? Comment peut-il engager sa parole avec si peu d’exactitude, lui qui, des secondes plus tôt, exhortait à la princesse des promesses solennelles. Se maudissant intérieurement de n’être qu’un parjure attentiste, il se décide au silence en écrasant son émail avec férocité, lynchant son abjection avec fureur, la conscience geignant comme un animal malade.

Lassé de sa dualité psychique, il oit dès lors les confessions de la triste colombe avec une attention tutélaire, peiné de l’entendre si affectée par ses actes passés. Il ne savait pas, jusqu’alors, la dureté avec laquelle elle s’était comportée envers Hulgard. Une époque de laquelle lui-même s’était écarté, se retirant dans le calme et la sérénité de son fief pour ne plus avoir à jauger cet ami transfiguré par le crime et l’ignominie. Constatant avec une fierté qu’il sait mal placée, le strict tempérament dont Jora a pu – et peut donc encore – faire part envers le quidam décevant, Dralvur sent dans sa patte de grizzli taciturne la fine menotte glisser avec tiédeur. Les sens ravivés par la suave attention qu’il sait pourtant n’être que celle d’une enfant affligée, le lord ramène sa figure dans la nuque opaline en griffant de sa barbe la carne chétive. Enivré par les flots émotionnels émanant de l’héritière comme s’il en était l’écorce même, le patriarche se plaît, sans y prendre véritablement conscience, à gratifier le derme nu de chastes baisers. « Il me manque aussi », certifie le seigneur en un murmure précoce qui jalonne la chair d’un souffle embrasé. Sa tempe s’aligne avec lenteur contre celle de l’Ebonhand, cajolant avec primitivité l’effigie étreinte. « Ce qu’il était, naguère, me manque… », précise-t-il dans le creux de l’oreille avant que ses paupières, subitement lourdes, ne s’affaissent à l’unisson. Il lui semble inhaler pour la première fois le parfum fleuri et sucré se dégageant de la peau diaphane, abritant encore sur ses lèvres le goût savoureux de la carne auparavant jaspée. Qu’est-elle, cette ébriété bienfaitrice qui appesantit ses muscles et annihile son raisonnement…? Découlant une liqueur aussi chaude qu’un vin d'Agathée, emplissant ses veines de succulentes écumes qui le perdent dans le ressac de la convoitise. Car il se prend à la vouloir, seul, se défaisant de cet hypocrite travestissement jusqu’ici préservé. Un sage chevalier boursoufflé de principes qui ne se trompe que lui-même, car, même si sa loyauté est des plus franches, c’est une toute autre aubade qui définit sa féale vassalité. Entre deux souffles puissants, il se souvient des regards avides de son aîné lorsque, tout jeune encore, il posait ses yeux d’adolescent sur la fille Ebonhand. Si le phénomène avait pu déclencher une hilare constatation chez le paternel – faisant rougir jusqu’aux oreilles l’adonis pré-pubère – force est de constater que, ce soir, en cette bibliothèque et par ces sinistres adieux, Dralvur s’embrase à son tour pour la nymphette au regard sodalite. Son galbe de femme, ses imprécations caractérielles et sa douceur d’âme lui paraissent être des lames pourfendant son flegme typique et son austérité de maître.

C’est en détournant son visage rugueux et frôlant les pommettes rondes de sa sculpture ferreuse qu’il finit par exorciser les démons de ses entrailles jouant depuis des nuits au luth obscène du désir. Ses lippes s’enchevêtrent avec impéritie sur celles charnues de la princesse, menant une lutte drastique dans ses affects à laquelle il renonce en moins de temps qu’il ne faut pour exhaler un ultime soupir. Dès lors, brûlant et passionné, Snowhelm écrase avec ambition ses lèvres sur la pulpe garance comme aurait rêvé de le faire son rejeton et comme, lui-même, y a bassement fantasmé dans ses plus avilissants songes de mâle impur.

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyJeu 24 Avr - 16:44



U
ne promesse captieuse scellée, que la cécité de confiance de la jouvencelle agréa avec une candeur au moins aussi élégiaque que l'impératif diplomatique qui enferrait l'Ours Cendré à son siège du Grand Conseil. La situation écartelait les sentiments de la colombe devenue emblème d'espérance, elle prenait seulement conscience que nombre de ceux qui soutiendraient sa cause ne seraient pas enclins à se tenir à ses côtés dans le sens propre du terme. Si la très ample majorité des feudataires Ebonhand avaient été mise au ban, quelques-uns avaient su passer entre les mailles du filet sépulcral, à l'instar du lord Snowhelm, dont les titres étaient ironiquement plus importants aujourd'hui. Il ne suffirait pas d'appeler les partisans à unir leurs héraldiques pour ensuite marcher sur le freux ennemi et reprendre un héritage exproprié, il allait falloir jouer de mystifications, de stratagèmes et de hardiesse pour remporter les batailles, et gagner la guerre. Peut-être ne verrait-il jamais la couronne de jais ceindre son crâne, avait-il dit, et Jora se souvenait qu'Ibenholt ne s'était pas érigée en un jour. Devrait-elle guerroyer et patienter des décades durant, voire mettre à profit le Feu du Midi et sa longévité séculaire pour traverser les époques à venir qui s'auguraient houleuses, avant d'avoir un seul tison d'espoir quant à asseoir son séant sur le trône ? L'avenir commençait certes à être sapide, là où l'aurore de la liberté s'éveillait lentement, mais c'était aussi un horizon d'appréhension où chaque nue et chaque ressac pouvaient cacher une entrave. Toutefois, elle ne serait pas abandonnée, une fois à l'extérieur, là encore, la tirade avait résonné tel un serment de la bouche du patriarche. Elle formerait son propre concile, qu'il intégrerait inéluctablement dès lors qu'il serait de retour auprès d'elle, car elle se persuadait que des retrouvailles auraient lieu et qu'elle   n'apprendrait pas que sa tête tranchée ornementait les remparts de Jernvugge pour félonie envers l'Usurpateur.
Mais diantre. Pourquoi songer à pareil déboire maintenant ? Si Dralvur avait rencontré le succès là où nombre d'autres féaux avaient échoué, il parviendrait à réitérer son haut-fait d'apparence renégate. Les simulacres de baisers papillonnant sur le gypse de sa nuque firent naître un ondoiement d'une douce ivresse qui vibra le long de son épine dorsale. Ils exorcisèrent ses pensées dommageables, avant que la voix de rogomme ne ratifie le regret de l'enfant sans plus de père. Et voilà qu'elle se sentait étrangement heureuse de constater qu'elle n'était pas l'unique âme en peine quant au trépas d'Hulgard, soulagée, sûrement, d'ouïr qu'autrui sustentait encore une once d'estime pour le sanguinaire monarque.

Le caractère saumâtre des larmes naguère versées acidifiait l'aquosité naturelle de ses mirettes qui, sous le voile des paupières, lui semblaient brûler de cette kyrielle d'émois qu'elle percevait encore térébrante quelque part en elle. Elle renifla encore, et se laissa simplement aller à la promiscuité salvatrice du quidam dont l'arôme était celle de ces mâles qui impressionnent. Sur cette épaule, la belle désirait s'assoupir, le toucher et le souffle du mammifère en puissant narcotique qui lui offrirait l'innocuité des rêves plutôt que les affres des cauchemars. Mais elle sentit le poil abrasif glisser sur sa pommette et ramener le museau de l'ours au plus proche de sa truffe de biche. Les haleines s'enchevêtrèrent en une brise voluptueuse, et étourdie, Jora entrouvrit les yeux sans prédire qu'une lisière était sur le point d'être franchie. Les lippes masculines accolèrent leurs jumelles charnues et les prunelles azurines s'écarquillèrent d'une stupeur juvénile. Quelle était cette sensation ? Quelle était cette saveur ? Quel était ce sybaritisme vrillant les moeurs et les entrailles d'un vertige inénarrable ? Après la pesanteur des maux, voilà que l'éther des sens qui découvraient clairsemait son corps d'ankyloses hilares. Une drôle de griserie qui initiait ses capteurs labiaux au plaisir du baiser et à celui de l'amour physique, ces notions prohibées qu'une dame était censée réserver à son époux et seulement à lui. L'homme qui l'embrassait pour la toute première fois avait toujours fait figure d'oncle ou de pater de substitution lorsque le sien était trop embesogné, il l'avait vu grandir, s'épanouir, et la perdait aujourd'hui dans une étendue conjecturale quant à l'essence de son affection pour elle.  Elle aurait pu s'interroger et se torsader les méninges pendant qu'il goûtait un fruit vierge et défendu, mais elle en fut tout bonnement inapte.

De longues secondes, et l'Ebonhand écarta ensuite son visage pour rompre le contact sans toutefois se défaire de l'étreinte de leurs charpentes respectives. Ses grandes mirettes sidérées sondèrent les onyx et la moindre crevasse de l'âge sur le faciès seigneurial, en quête d'une réponse dont elle ignorait même la nature. Les érythèmes sur ses joues se transformèrent en masque empourprée recouvrant l'ensemble de son minois, ou la gêne ardente de la pucelle qui ne savait plus ni que dire, ni que penser ni que faire. « ... » Nonobstant les mouvances fébriles de sa mâchoire, elle ne put former aucun son et se réfugia dans un mutisme équivoque. La nymphe détourna le regard, profondément embarrassée et cocassement rubiconde, ses phalanges se décrochèrent à celle du sieur pour strier sa bouche d'une faible barricade, derrière laquelle naquit... un sourire. Un sourire qui fut impossible à camoufler, ses pommettes s'arrondissant sous la contracture des muscles faciaux, offrant aux traits sculpturaux un aspect étrangement charmé et amusé. Dralvur avait décidément un don inégalé pour la faire passer par toutes les émotions, elle en avait connu, des courtisans qui s'étaient plu à l'encenser de leurs belles dithyrambes, mais c'était véritablement là la genèse de sa condition de femme. Qu'elle devait paraître idiote, à ricaner au revers de cette paume dans laquelle étaient censés se trouver pouvoir et magnificence. L'attitude adéquate aurait voulu qu'elle chasse l'incongru et lui rappelle sa place, et pourtant, elle n'en avait aucune envie. De tous les ressentis qui la cahotaient, la curiosité piétinait volontiers le bon sens et était en train de se hisser aux plus hautes cimes, de là où elle pourrait toiser cette contenance pusillanime dont se drapait la donzelle. Elle se racla la gorge, vacillant entre l'aplomb et la continence, jusqu'à croiser les obscurs calots de son vis-à-vis qu'elle contempla timidement.

Certaines scènes se privaient de paroles, et se satisfaisait des pantomimes des acteurs. La princesse se mordit la lippe, puis en humecta ensuite l'incarnat, à la fois apeurée et galvanisée par l'acte prochain. Après avoir dégluti en dernier signe d'angoisse, ses menottes s'aplanirent sur le puissant poitrail et elle entama sa conquête de l'impudicité. Elle se rapprocha, levant les talons du sol pour se jucher sur la pointe de ses chausses et atrophier la distance qui les séparait – non sans compter sur son aide pour lui faciliter la manoeuvre. A son tour, Jora vint cueillir les lèvres du Snowhelm avec une assurance toute relative, un domaine où là encore, elle avait tout à apprendre. Ployant toutefois les brides de l'échange à son seul instinct, elle tenta de le rendre réciproquement appréciable, élève soucieuse pour qui l'abysse des années n'était qu'un détail trivial – après tout, n'avait-on pas voulu la marier à Jorkell ? L'âge avait un attrait envoûtant et la force de l'expérience, pour peu que les rainures ne soient pas celles d'un régicide.
Ce fut alors que l'exercice prit un atour inopiné, lorsque dans un élan un peu trop zélé, la belle  mordit malencontreusement la lèvre amante et sentit le soubresaut – probablement surpris – du lord. « Pardon ! Désolée ! Navrée ! Aaah, non, pardon ! » Se confondit-elle tout de go, confuse par sa gaucherie qui la fit, une fois n'étant pas coutume, rougir à outrance. De honte, elle plaqua ses mains sur son visage embrasé et baissa la tête pour sa tapir derrière une cascade argentine, non sans formuler le voeu secret de se liquéfier sur place tant la situation était burlesque.

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Dralvur Snowhelm

Ours cendré d'Ibenholt

Dralvur Snowhelm
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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyDim 27 Avr - 16:26

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Soupirs exaltés, promesses encensées.

jora & dralvur
Au retour de raison, le cœur se met à vaciller comme chaloupe offerte à la tempête. Qu'a-t-il fait, sinon désacraliser les liens uniques – tout du moins purs – entre sa protégée, pupille de sa foi, et lui-même, pilier inébranlable de la nymphe ? L'onyx de ses orbes se pose avec trouble sur les joues empourprées de l'Ebonhand, se maudissant de mille tourments – et plus encore – pour avoir eu l'audace de fracasser le vase jusqu'ici intact des certitudes relationnelles. Les éclats d'opprobre viennent jusqu'à se ficher sur son faciès masculin, tissé d'un rictus torve envers lui, et lui seul. Le désarroi de Jora est tel, que le seigneur devine sans peine avoir là blasphémé le virginal parcours de la colombe. Que la peste l'emporte !
Voici que l'enfant se délivre et se prend à rire. Accueillant dans son torse une profonde inspiration, le lord paraît n'être plus qu'un taureau piétinant les planches vernies de la grande bibliothèque. Si l'héritière s'amuse de la situation avec une douce légèreté incombée aux jouvencelles, le ser, lui, concasse son émail avec disgrâce, le fardeau coulant sur ses ridules comme l’huile chaude dans les meurtrières. S'il ne lui vient ni mots, ni gestes adéquats, la houle de ses pensées, elle, sait admirablement trouver le chemin du regret.

Aussi, lorsque la princesse revient faire front, menottes arrimées et talons tendus, le premier réflexe du patriarche Snowhelm est d'écarter son visage de celui – étonnamment – conquérant de son élève. La leçon semble lui avoir plu, néanmoins assez pour réitérer l'expérience. D'un flegme catastrophé, les paluches de l'Ours viennent s'opposer à l'avancée en se nichant contre les hanches féminines, prêtes à insuffler une force répulsive dans ses muscles pour ne plus avoir à sentir le souffle tiède de la candide. Une négation traverse son palais, étouffée par des cordes vocales trop séditieuses pour accorder quelconque avantage. Avec une appréhension palpable – et une réelle défiance – Dralvur accueille derechef la pulpe en y jaspant ses lèvres tordues par instants de crispations aussi nerveuses que réfractaires.
Il ne repousse toutefois pas.
Il arrive même un tournant duquel il cède enfin un semblant de docilité, décidément happé par l'onguent enivrant détroussé de la carne lactescente. Rien n'est plus doux et plus délicat que les lèvres de Jora Ebonhand, faut-il croire ; et ainsi le croit-il. Les mains en bordure de robe l'attirent contre lui, et l'échine s'offre un peu plus pour dévorer avec souhait le baiser sacrifié. Une douleur vive vient même ponctuer l'acte, qui, si elle ne s'était écartée – alarmée par son soubresaut d’automatisme –, l'aurait moins laissé indifférent que rasséréné, homme passionné qui ne s'étonnerait ni ne s'offusquerait de pareille ardeur.

Confuse, elle s'égare de nouveau loin de l'étreinte pour laisser dans l'imbroglio le seigneur mutilé. Cette fois, une vague risette soulève les zygomatiques hirsutes du Snowhelm qui traverse sa chair blessée du bout de la langue en examinant le minois camouflé derrière le crin nacré. « Ce n'est rien », la réconforte-t-il d'un ton bas soulevé par un éclat léger qu'il enserre dans son torse pour ne pas alerter les gardes. Les paluches se reposent sur les frêles épaules, le faciès cherchant dans son champ les gemmes de la penaude donzelle. « Ce n'est rien te dis-je », se faisant violence pour ne pas céder à une douce hilarité, il astreint la princesse à redresser le menton en glissant ses paumes sur les reliefs de la mâchoire. « C'est une fougue que beaucoup d'hommes apprécient », s'entend-t-il articuler comme un mentor le ferait, avant de ravaler les syllabes avec gêne et défaisant ses phalanges pour la laisser reprendre contenance. « C'est de ma faute, je n'aurais pas dû. Sans doute l'émotion de te savoir partir », avoue-t-il humblement, faisant taire l’émoi obligeant son vieux palpitant à cogner contre sa cage thoracique comme on pilonne du fer chaud. « J'aurais préféré que tu ne subisses pas mon impair. Mais j'imagine que c'était un mal nécessaire. Le vois-tu, maintenant ? Nous sommes tous assujettis aux faiblesses. Moi le premier. » Lui, le digne, le droit, aucun esprit, aussi fort soit-il, n'est à l'abri de ce précipice nommé humanité. Il s'écarte un peu, à peine, mais suffisamment pour relever leurs murailles solennelles. Néanmoins incapable de retrouver le conventionnel vouvoiement, il conclut leurs huis-clos. « Va, maintenant. Ne rallonge pas ma peine plus qu'il ne le faut. » La gorge nouée, il parvient quand même à tracer un sourire sincère. Tendre. « Que les dieux veillent sur toi Jora, et que leur force t'accompagne, où que tu sois. »  

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Jora Ebonhand

Perle de Nacre

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MessageSujet: Re: Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora)   Soupirs exaltés, promesses encensées. (jora) EmptyMar 29 Avr - 11:28



S
i elle avait pu se faufiler dans un antre de rongeur, elle l'aurait assurément fait tant l'embarras l'étranglait à l'instar d'un carcan candide. Qu'avait-elle espéré, au juste, à prendre ainsi les brides avec tant de témérité ? Elle n'avait jamais étudié le sujet auparavant, en était restée à une théorie spéculative et sciemment estompée par la bienséance inhérente à son statut. A l'antipode de celles que l'on nommait communément les coureuses de remparts, il n'était pas convenable pour une dame de son apanage de se faire enseigner ces subtilités charnelles par un autre que son époux – époux, qui aurait dû être celui qui usurpait présentement le Trône de Jais, une pensée qui suffisait à la faire trémuler d'aversion. A choisir, la décision était promptement ficelée : elle préférait infiniment le fraisil de l'Ours au pennage du Freux, mais quel étrange pédagogue en la matière faisait-il lorsqu'elle se souvenait du lien qu'ils sustentaient depuis tant d'années. Et désormais ? Il pourrait se gausser, allègre de l'incurie de la belle, qui avait failli lui coûter sa lippe. Elle, serait probablement incapable de le regarder à nouveau dans ces yeux insondables et aussi étincelants que l'anthracite, qu'elle sentait lécher son galbe avec une pesanteur amusée. Le ricanement muselé tendit à la faire s'empourprer plus encore si tant est que cela fut possible, et Jora chercha à fuir le regard qui quêtait pour le sien au revers de la courtine capillaire. Elle finit par redresser le menton, pusillanime, croquant nerveusement l'ongle de son pouce tandis qu'il la rassurait. Et lorsque le sieur confia que les quidams appréciaient ce genre d'exubérance, la demoiselle ne sut plus où se mettre. Un instant, elle se demanda si, à sa place, elle aurait aimé qu'on lui morde la carne, et si elle n'en fut naïvement pas convaincue, elle accepta de croire le plus expérimenté de leur binôme. L'information, elle la niellait secrètement dans son esprit pour en faire plus tard bon usage, savait-on jamais si elle venait à en avoir besoin. Le charme était une arme à considérer dans cette guerre des nerfs, même s'il lui faudrait déterminer la juste lisière avant de commettre une bévue qu'elle regretterait amèrement.

Dralvur porta la responsabilité de l'égarement, ce à quoi elle ne répondit rien, trop occupée à retrouver sa contenance perdue au profit d'une hardiesse qu'elle ne se connaissait pas. Elle se racla la gorge et tritura une mèche ondoyant sur son épaule, consciente que le conciliabule touchait à sa fin. Peu persuadée par le terme de mal nécessaire, elle contracta la commissure de ses lèvres en une expression équivoque et ne dit toujours mot, jusqu'à ce qu'il la renvoie à sa cage dorée et aux piètres cerbères qui rongeaient leur frein à l'huis principal. « La peine, voilà bien ce que nous partageons... » Concéda t-elle avec une douleur manifeste nonobstant ses efforts pour attiédir la transe émotive que son cœur suait sous les atours princiers. L'Ebonhand déglutit et opina positivement du chef, humecta instinctivement ses lippes, puis s'éloigna. Au passage, elle saisit un épais ouvrage qu'elle congloméra contre elle et destiné à faire illusion auprès des factionnaires qui s'interrogeraient si elle revenait les mains vides. « Puissent-ils te guider dans les méandres putrides de la politique et t'octroyer protection et sapience, Dralvur Snowhelm. » Elle guigna en arrière pour l'apercevoir une ultime fois, avant de sortir de leur cache improvisée et de rejoindre la porte, songeuse, chagrine, et indiciblement troublée.

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