days of futur past
«
Qu'as-tu dit ?! » L'adolescent a le visage tordu par la haine, comme un chien galeux atteint par la rage. Sa bouche se déforme en une grimace rageuse, alors que ses yeux écarquillés accusent difficilement un refus. La jeune fille répète à nouveau, cette fois d'un ton plus ferme. «
J'ai dit non, Lorkmir, et par la colère de Catharis ; lâches-moi. » Elle tente de dégager sa frêle manchette de la poigne du garçon, en vain. Ce dernier, au contraire, rapproche la fille dans un geste violent. «
Je pourrais te faire couper la langue, » qu'il lui crache au visage «
Tu devrais te sentir flatté que quelqu'un de ma noblesse t'ordonne de l'embrasser. Toi, maudite bâtarde des bas-fonds du Nord. » Cette fois, la jouvencelle se garda de politesse et, en un habile déplacement, expédia le jeune prince contre les pierres du jardin. Celui-ci, prit par surprise, n'eut pas le temps de se relever que déjà, l'ombre de l'adolescente se penchait sur lui. «
Je ne suis pas plus bâtarde que tu es noble, et je préférerais encore me rouler dans la bauge avec un crapaud baveur plutôt que de t'embrasser. » - «
Espèce de sale... » Le prince se remit prestement sur ses pieds, dégainant son épée de son fourreau et la pointant dangereusement sous le menton de l'insolente. Cependant, il n'eut pas le temps de taillader la peau pâle de sa joue ou encore de saccager sa mince tunique de soie : de la façade de l'Argonaute se découpa la silhouette austère et distinguée du cadet, dévisageant la scène avec déplaisance. Finalement, Lorkmir rangeant sa lame avec un soupir agacé, contournant la jeune Selebrian pour s'adresser directement à son frère. «
Père sera mis au courant de tout cela. À l'avenir, garde ta chienne en laisse, » qu'il lâche d'un rire siphonné avant de disparaître dans la forteresse. La gamine expire finalement, soulagé de voir enfin son bourreau parti. «
Il ne cesse donc pas de te harceler ? » La voix du petit prince se faisait grave. À peine âgé de douze ans, Lorkhan Ravncrone faisait preuve de bien plus de tenue et de diplomatie que son aîné. Cette scène n'était, hélas, pas la première des nombreux éclats survenus entre l'héritier et la jeune écuyer, décidément devenu l'attraction personnelle de Lorkmir et l'objet de tous ces caprices. Elle soupira, replaçant sa modeste tenue d'un geste vague tout en nouant sa longue chevelure d'ébène en tresse. «
Je ne peux pas concevoir que ce gamin prétentieux va un jour devenir Roi. Que Dagoth nous épargne lorsque sonnera le jour de son couronnement... » Elle lève les yeux vers la voûte, le soleil dissimulé derrière les hautes tours de l'Arête du Ciel. À en juger par les ombres, il devait bientôt être midi. «
Comment étaient tes leçons de géographie ? » Le garçonnet ne répond rien, observe d'un œil désintéressé les fleurs exotiques qui poussaient çà et là à la demande de sa mère, Sa Majesté la Reine. Selebrian le regarde avec empathie, reconnaissant dans le regard du prince celui d'un enfant ennuyé et délaissé, laissé à lui-même par ses propres parents. Elle réfléchit puis, sans plus de manières, saisit la main du jeune garçon pour l'entraîner à sa suite. «
Où m'emmènes-tu ? » Que se plaint le petit noble en bougonnant. «
Allons chevaucher au pied des Okerkysten, » qu'elle s'exclame avec enthousiasme, et il n'a d'autres choix que de la suivre, avec cependant beaucoup moins d'entrain. «
Ne t'en fais pas, Lorkhan, » qu'elle murmure alors qu'au zénith ils galopent loin des nourrices et des serviteurs qui les rappellent vainement. «
Un jour, je te construirai un château où tu seras le plus grand des Rois. »
glory in the blood
«
LORKMIR ! » L'accusation se percuta contre les parois rocheuses de la forteresse, prévenant ainsi l'interpellé de l'arrivée de l'ouragan. Et ô il entra par la grande porte des appartements, sa longue crinière d'ébène voltigeant autour d'un visage déchiré par la haine. Le prince, nullement décontenancé, salua l'intruse d'un sourire malicieux, une pulpeuse prostituée pendue à chaque bras. La dragonne écumait littéralement. «
Dehors, » qu'elle crache avec hargne, et les deux pauvres écervelés la dévisagent avec mépris. Alors seulement, elle dégaine son épée, menaçant dangereusement les deux filles de joie. «
DEHORS ! » Et elles couinent de peur et de mécontentement en se ruant vers la sortie, refermant la lourde porte de bois derrière elles.
Seuls. Enfin, ils étaient seuls, et elle pourrait finir ce que son précepteur avait commencé. La chemise à jabot dénoué sur son torse nu, Lorkmir se leva lentement, s'empara nonchalamment de sa rapière abandonnée plutôt et s'avança dangereusement vers Selebrian. Il souriait comme un dément, les yeux de loup sur sa cible. «
Sale couard, t'en prendre ainsi à ton frère alors qu'il est condamné aux cachots... Il n'y a donc aucun fond à tes bassesses ?! » Les paroles sont comme du venin, elle dévisage l'héritier comme un serpent belliqueux. L'homme s'esclaffe bruyamment, décrivant des cercles autour de la demoiselle. «
Le pauvre, pauvre Lorkhan... Pauvre petit prince oublié... Je devrais faire preuve de clémence, après CE QU'IL M'A FAIT ! » Qu'il hurle en pointant l'entaille profonde lui balafrant la joue, s'arrêtant juste à temps pour épargner son œil. Nul doute que si Lorkhan l'avait voulu, il aurait pu rendre son aîné aveugle d'un côté. Cependant, l'impétuosité de Lorkhan et l'animosité de son frère lui valaient une séance de torture quotidienne, dont Selebrian venait tout juste d'en connaître l'existence. Encore choquée de l'état dans lequel elle avait trouvé son seigneur, elle serra les dents et pointa son arme vers le Corneille «
Relâche-le, Lorkmir. Relâches-le, ou que les Quatre m'en gardent ; je viendrai chercher les clés de sa cellule moi-même, quoi qu'il en coûte. » et la pointe de sa lame dévia vers l'objet de libération de Lorkhan, pendouillant à la ceinture de garde du prince. Ce dernier répondit de la même manière, et les deux lames d'acier se caressèrent langoureusement, jusqu'à se heurter, se déchirer, se repousser. L'éclat du combat semblait se répercuter jusque dans les voûtes ; bientôt, les gardes se rueraient vers les appartements, alertés par le bruit. «
Crois-tu vraiment qu'il aurait réussi à me vaincre ? Moi, Lorkmir Ravncrone, l'héritier du trône ! » Et d'un coup habile, il désarma la belle et la plaqua au mur, sa lame guettant dangereusement sa gorge blême toute dévoilée. Pourtant, elle ne lui offrit qu'un regard noir, le cœur emplit de haine. «
Tu n'es pas un Dieu, Lorkmir. Les Dieux ne saignent pas, » qu'elle lui révèle en dévisageant sa blessure au visage. Ô, il manqua de peu de mettre fin à ses jours cette nuit-là, mais coup du malheur ou du destin, les gardes débarquèrent en trombe dans les appartements et se saisirent de Selebrian. Longtemps il la dévisagea avant de sommer qu'on la fasse disparaître de sa vue. «
Un jour, tout ce que tu possèdes deviendra cendres dans ta bouche, » qu'elle lui hurla avant d'être escortée hors des appartements, et condamnée à ne plus s'approcher de cette aile du château.
Quelques semaines plus tard, Lorkhan fut relâché et une rencontre de réconciliation fut organisée.
Cependant, aucun pardon ne fut jamais accordé.the worl in our hands
«
Mylady ! » Couina la servante en entrant en trombe dans les appartements. «
Par les Quatre, Lyssa, qui a-t-il ? » La damoiselle avait encore les cheveux humides, visiblement interrompu alors qu'elle sortait toute juste d'un bain. La nuisette qu'elle portait lui collait encore à la peau. «
C'est son altesse Lorkhan, Mylady... Il quitte la cité pour Ibenholt dès ce soir, » déglutit la jeune femme à la crinière dorée. Le chevalier, visiblement peu enchanté par la nouvelle, laissa échapper un long soupir, tout en commençant à préparer ses sacoches de selle en préparation d'un voyage tardivement annoncé. La servante, timide, se dandinait sur le porche. «
Dois-je... » - «
Oui, Lysa, oui ; files informer Lorkhan que je serai prête à l'y escorter dès None. Ce bougre, toujours à me prévenir une lune trop tard, » marmonna-t-elle alors que la servante disparu, refermant un premier carnier. Tout en s'avançant vers la fenêtre, elle dévisagea les contrées lointaines du Nord qui se cachaient derrière les hauts pics enneigés.
ces terres glacées qui l'avaient vu naître. Tout en caressant des doigts le pendentif métallique qui pendouillait à sa nuque, Selebrian se rappelait des dernières phrases que sa mère lui avait confié, moins d'une semaine auparavant alors que la mort l'attendait impatiemment. «
ton père était un Elfe Austral. » Oh, cette accablante vérité sur un père jusqu'alors inconnu n'aurait pas aggravé cette relation mère-fille déjà si fragile si, quelques mois auparavant, cette dite mère n'avait pas regardé sa fille partir aux champs de bataille pour terrasser quelques dizaines d'Elfes du Nord au nom des Ravncrone. «
Mon père est peut-être mort sous la lame d'une fille qu'il n'a jamais connue et qui l'a, pour la première fois, regardé avec le devoir du sang plein les yeux, » qu'elle s'était écriée en quittant la demeure familiale cette soirée-là, abandonnant cette femme sans honneur ni dignité, laissant le soin à Dagoth de récolter son âme à jamais noircie.Si elle avait aisément fait le deuil de son semblant de figure maternelle, l'idée d'un père assassiné sous sa propre lame la hantait chaque nuit.
Par la vitre, au-delà de la cime des arêtes du ciel et plus loin encore l'attendait les ruines de l'existence de son père, une ville remplit des espoirs d'un peuple défait par ses propres congénères.
Ibenholt.