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e grand jour était arrivé, les prémices de la Grande Mascarade avait plongé la Cité dans une effervescence dont la fièvre ne se lénifierait qu'à l'aurore suivant, non sans abandonner un chapelet de victimes dans son sillon. Les ans n'avaient point émoussé la propension des sujets à ripailler, qu'il soit question de la masse indigente ou dignitaire, l'on se préparait à commémorer les printemps et la résurrection de ce que l'on espérait être une période prospère. Prospère ? Ce n'étaient que les cors de guerre que Jora entendait vrombir depuis l'horizon, clamant son patronyme dans des échos lointains mais qui se précisaient graduellement, et si elle en croyait les informations qu'Irinwe s'était plu à lui distiller au gré de ses visites en tapinois, ses féaux s'en venaient briser ses chaînes dès aujourd'hui. Un mouvement de loyalistes mené de front par un jeune lion qui avait tourné l'échine aux siens pour ses convictions – et par extension, pour elle. Une conspiration à laquelle s'ajoutait l'aide substantielle de quelques âmes qui lui avait plus que jamais prouvé leur fidélité, ses pensées bourlinguant naturellement vers un certain Ours Cendré et sa préceptrice elfique qui avaient tous deux affronté d'indicibles périls pour ne pas l'abandonner. Après des semaines d'isolement, d'une haine viscérale envers ses geôliers et d'incertitude quant à ceux qui furent jadis les partisans de son défunt père, elle sentait enfin des flammèches de soulagement embraser son être. Et c'était bien parce que l'appréhension la taraudait malgré tout qu'elle avait décidé de se changer les idées en musardant sur le parvis de Jernvugge, flânerie simple qu'elle n'avait point été autorisée à faire depuis plus d'une lunaison.

Chaque foulée distraite faisait valser les pans mordorés de sa robe, que les membres de la roture guignaient avec diverses expressions. Rêvait-on de la lui arracher ? De la lui dérober ? Ou d'éventrer la taille gracile qu'elle habillait d'un joli drapé ? Les intentions des individus étaient tant opaques que fardés de ces masques propres aux festivités charivariques qui avaient le don de la rendre anxieuse, car si les faciès des gens étaient usuellement des toiles abstraites, la situation ne faisait qu'empirer les choses. Au point que la donzelle en vint à se demander s'il aurait été opportun qu'elle dissimule son minois également, peut-être avec l'une de ces fioritures criardes qu'elle admirait sur l'étalage d'un artisan. Un instant que choisit un hôte surprise pour se manifester et, à défaut de l'effaroucher, il parvint néanmoins à la surprendre. « Monseigneur Strider ! Par tous les dieux, cessez de vous faufiler tel un serpent auprès des gens, ce n'est pas la première fois que je vous le fais remarquer ! » Elle porta sa main à son buste pour mimer son émoi, avant de réprimer un sourire désinvolte derrière une moue. « Allons bon, vous savez pertinemment que je n'enflamme personne – et surtout pas vous, vil encenseur. » Elle avait appris à le connaître à travers leurs quelques conversations, et elle savait le personnage haut en couleurs ainsi que peu avare en compliments.

Toutefois, l'Ebonhand se laissa emporter dans la marche, intriguée par un Vex qui avait toujours quelque chose à conter. « Je ne suis à offrir à personne mon cher, tout du moins, je ne le suis plus, et j'ai bien l'intention que cela continue ainsi. Dois-je vous rappeler que j'ai un trône à reprendre ? » Insolente demoiselle dont l'aspiration n'était un secret pour personne, et si son interlocuteur ne s'était jamais explicitement prononcé sur son allégeance, elle subodorait que ses déclarations puissent lui être intéressantes. « Qui plus est, vous vous fourvoyez sur l'escorte de l'oiselle, vous devriez mieux observer autour de vous. » Dans les environs, plusieurs gardes qui, s'ils avaient pris le soin de ne pas empiéter sur l'espace vitale de la captive, la surveillaient d'un œil particulièrement acéré. « Vous ne pensiez tout de même pas que la Corneille aurait eu la bonté de m'épargner ses roquets ? Et outre cela, je doute que ce soit très prudent de me montrer sans protecteurs. Sa Majesté Jorkell est peut-être le nouvel Usurpateur du Trône de Jais, mais je ne me fais pas d'illusions, certains ont encore en mémoire les vilenies de feu mon père et les rancoeurs sont loin d'être apaisées. L'une de mes nourrices avait l'habitude de dire que les assassins sont pareils aux araignées : il y en a toujours un dans les environs, et le pire ce n'est pas lorsque vous en voyez un, c'est quand vous ne le voyez plus. » Un trait d'esprit qui la fit ricaner, mais le sérieux du sujet la ramena à une circonspection plus prononcée, alors que ses mirettes balayèrent les badauds. « Je gage que plus d'un spadassin adorerait mettre un point d'orgue à la lignée dont je suis le dernier emblème, et il serait bien aisé de me briser quoi que je puisse en dire... Dois-je me ronger les sangs, avec vous à mes côtés ? »

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e ses actes revendicateurs, mieux valait qu'il évite d'être la cible. Aux yeux des personnalités courtisanes, le Conseiller Diplomatique avait fait les frais de sa rancoeur cinglante en se faisait vitupérer en public – et pis encore, gifler en guise de châtiment en plus de l'anathème et de la promesse de vendetta qu'avait formulée la donzelle courroucée. Une scène certes fallacieuse, mais qui n'avait pas moins été un juste reflet de l'ire qui tonitruait dans les entrailles de l'Ebonhand, nullement effrayée des regards et jugements du monde. Si de ses mains, elle avait pu sonner le glas du règne inique de Jorkell en enjolivant son poitrail d'une longue lame affilée, elle l'aurait fait, quitte à se souiller de la mort d'un homme. C'était ce qu'elle pensait plus que sincèrement, même si, dans les faits, les choses étaient généralement plus ardues à réaliser. Qu'importait, ce n'était point le jour adéquat pour songer à occire quiconque, la commémoration du Printemps offrait un répit trop salutaire – et surtout une porte secrètement ouverte sur l'avenir – pour qu'elle ose le dédaigner. Etait-ce l'occasion d'être folle ? Certainement, car dans le cas contraire, jamais ne se serait-elle laissée entraîner par un individu de l'apanage de Vex. L'âme ésotérique, certes, mais il fallait être inepte ou aveugle pour ne pas deviner qu'il n'était pas un simple badaud dans le jeu des trônes, et ce, même si elle était à mille lieues de se douter que ses derniers propos étaient plus véridiques qu'elle ne l'aurait pensé. Lorsqu'il mit en liaison son patronyme et les illustres Sycophantes, la donzelle fut déstabilisée au point de le mirer sans parvenir à articuler le moindre mot. Dans ses traits enjôleurs cependant, elle ne dénicha rien de plus qu'un opaque mystère. « Les âmes vénales sont celles dont il faut le plus se méfier, j'aime à penser qu'aucune vie ne devrait être fauchée que c'eut été pour une bourse bien garnie ou le trône de jais... Malheureusement, ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent. » Elle avait eu tout loisir de le comprendre.

Le garçonnet qui se fit violemment congédier tira une nouvelle expression stupéfaite chez la jouvencelle qui lorgna son compagnon sans parvenir à en saisir les aspérités – quel truculent personnage, qui n'avait assurément pas fini de l'épater. Si bien qu'elle préféra se méfier de cette courtoise invitation à gobeloter un verre avec lui. « Je ne sais pas si... » Mais son doute se fit endiguer par un discours équivoque, qui la laissa de trop songeuse pour empêcher le dignitaire de passer commande. Bienséante nonobstant les circonstances, elle saisit le verre tendu, avant de remarquer l'oeillade indiscrète qui tentait de discerner à travers ses atours et dont elle s'offusqua. Pommettes rosies, elle patienta qu'il achève sa prise de parole pour rétorquer d'une phonation manifestement rancunière. « Bien entendu, que j'y serai ! Que croyez-vous ? Que Sa Majesté laisserait sottement filer l'opportunité de m'exposer tel un trophée de guerre, remémorant non seulement à tous de quelle façon il s'est emparé du siège royal d'Ibenholt mais aussi de celle par laquelle il a réduit l'une des plus anciennes familles de Middholt à l'état de captivité ? Ne soyez pas nigaud, et je gage que vous serez trop embesogné à soulever les jupons de quelque invitée pour m'emmener valser. » Le palpitant cognant à sa poitrine, la moue amère, Jora n'était plus de celles qui se taisaient. « Et je vous prierais de me regarder dans les yeux et non pas autre part, je ne suis pas une fille de petite vertu pour m'écailler. Je suis peut-être une prisonnière politique, mais n'omettez pas à qui vous vous adressez noble sieur, c'est une princesse que vous avez en face de vous. »

Se disant, elle détourna ses prunelles et eut le malheureux réflexe de porter sa coupe à ses lippes pour s'offrir une contenance plus adulte... qui vola en éclats à peine la première gorgée avinée. La grimace qu'essaya de retenir l'héritière déchue fut pour le moins signifiante, et elle toussota légèrement. « Nom d'un... ce n'est... pas très bon... » Elle observa la robe du breuvage qu'elle fit rouler dans le récipient. « N'y voyez pas d'offense, mais je dois vous avouer que c'est la première fois que je goûte du vin, ou alors, si première fois il y a eu avant, je ne m'en souviens pas. Je ne sais pas si cela est raisonnable de m'y mettre en votre compagnie... » La moue se transforma en rictus taquin. « Quelqu'un qui est au fait du créateur des Sycophantes ne peut être qu'inquiétant, ce n'est généralement pas une information que l'on cherche à savoir. Je serais curieuse de savoir ce que vous avez glané d'autre sur ma famille, ou encore sur cette guilde dont il vaut mieux éviter de trop prononcer le nom. Certains affirment qu'à trop le dire, c'est un coup à les faire apparaître dans votre dos. »

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es rumeurs prétendaient qu'un Sycophante était toujours dans les environs, il était vrai, et il n'y avait rien de rassurant à cela lorsque l'on portait le patronyme d'Ebonhand. La Main Blanche se retrouvait bien tremblante à l'idée d'une rencontre fortuite avec ceux qui avaient vu le jour grâce à l'un de ses ancêtres – le plus fou de tous, et ce n'était d'ailleurs pas une coïncidence. Traiter avec eux revenait probablement à jouer avec le feu, et les flammes du péril, elle allait devoir s'y accoutumer une fois en dehors des murs de Jernvugge. Vex était le parfait exemple du genre d'homme qu'elle serait susceptible de croiser dans sa course à l'héritage de Jais, minaudier et particulièrement ésotérique sur ses véritables intentions, car comme tout à chacun, il en possédait plus que certainement. A qui allait son allégeance, si ce n'était à lui-même ? Un quidam qui assurait qu'une vie était infime à côté d'une fortune n'était pas innocent, mais elle restait bien incapable de déterminer s'il riait avec elle ou s'il riait d'elle. Inconsciemment, il lui apprenait qu'être diaphane était une mauvaise stratégie, et que la théâtre de la vie était un art substantiel si elle désirait s'en sortir. Théorie acquise, encore fallait-il qu'elle s'exerce en la matière, et elle doutait que ce soit lui qu'elle parvienne à leurrer, pas si aisément. Alors, elle se défendait comme elle le pouvait, à travers port altier et rhétorique de grand domaine en guise de bouclier, ce que le Strider cherchait vraisemblablement à abattre dans le but de l'atteindre. Perspective dangereuse, mais... étrangement intéressante tout en même temps.

Tâchant de soutenir et de résister au regard perçant de l'assassin sous cape de noblesse, et le défi qu'il lui lança alors la fit tomber des nues. Avait-on idée de se montrer si désinvolte en société ? Parmi la roture ou non, elle avait une certaine image à sustenter et ne pouvait se permettre trop d'incartades. Bien malgré elle, elle fut fascinée par l'aisance avec laquelle il lampa son propre verre, illustration qu'elle peinerait à reproduire, elle le sentait. A ses tirades, les prunelles azurées observèrent la foule environnante, incrédules et méfiantes, avant de revenir sur son interlocuteur qui n'attendait plus que des preuves de son hardiesse princière. « Epargnez-moi vos réflexions phallocrates, vous ne ferez que m'offenser en vous exprimant de la sorte. Je n'ai pas besoin que vous me rappeliez la mésestime des genres, je l'ai suffisamment coudoyée pour en savoir quelque chose. » Claustrée dans une cage dorée depuis sa jeunesse, c'était à peine si elle commençait à déployer son joli pennage aux yeux du monde. « Pensez-vous vraiment qu'il faille savoir être une sorte de pochard lorsque l'on vient de haut rang ? C'est une théorie plutôt inculte si vous me le permettez, s'amuser ne va pas forcément de paire avec l'ivresse, c'est ainsi que les incidents arrivent et que les fruits adultérins naissent. N'y voyez aucune inimitié personnelle envers les enfants illégitimes, ce n'est rien d'autre qu'un fait. Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle ou de délassant à ne plus avoir conscience de la réalité ou à ne plus se souvenir de la soirée à l'aube du lendemain. » Peut-être était-ce son jeune âge et son éducation rigoriste qui la faisait parler ainsi, dans tous les cas, elle était convaincue de ce qu'elle avançait et ne partagerait pas l'opinion de son vis-à-vis seulement pour lui faire plaisir. Elle avait trop longtemps acquiescé sans rien dire, cette époque était révolue.

« En revanche... » Reprit-elle à l'orée de plusieurs secondes, arborant alors une fine risette mutine. « Votre suggestion de vous prosterner me séduit, je dois l'avouer. Vous n'avez pas froid aux yeux pour vous targuer être apte à cela en public, c'est vous mettre en danger face aux probables partisans de la Corneille ou de qui sais-je d'autres. » Elle plissa les paupières, patienta un moment en le fixant... Puis, Jora porta sa coupe à ses lippes charnues pour ingurgiter le breuvage qui s'y trouvait. Ce fut laborieusement qu'elle réussit, et elle crut défaillir en quinte de toux une fois la victoire remportée. « Facile... ! » Dit-elle d'une voix enraillée et avec une grimace qui témoignait du contraire.

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e breuvage lui embrasait le gosier et se frayait un chemin jusqu'à sa panse où s'alluma un étrange âtre, qui l'emmaillota tout de go dans une truculente bulle de chaleur qu'elle eut du mal à s'expliquer. Elle le savait pertinemment, que l'alcool était une arme dangereuse et nocive pour qui ignorait comment l'utiliser à bon escient, et c'était justement parce qu'elle faisait partie de ceux-là qu'elle avait eu envie d'en consommer avec une extrême parcimonie. Volonté reléguée au dernier plan avec la tentation rusée du quidam, qui s'avérait être un serpent bien trop agile dans ce nid de vipères. Toutefois et bien en dépit de sa morgue princière, Jora avait effectivement encore tout à prouver, dont une dose adéquate de témérité si elle ne voulait pas qu'on la taxe de passive. C'était chose faite en ce qui concernant Vex, mais le bougre était un vorace invétéré en la matière, et elle ne doutait pas qu'il s'essaierait à la dévêtir et à ravir jusqu'à son innocence s'il en avait la plausibilité. Outre le fait que la donzelle n'était pas particulièrement sensible au charme néanmoins manifeste de son vis-à-vis, l'Acte était une notion tout à fait obscure et point à l'ordre du jour, elle qui avait seulement échangé son premier baiser peu de temps auparavant. Elle ne put d'ailleurs s'empêcher de songer à Dralvur et à cette suave hardiesse qui avait conduit ses lèvres aux siennes, un instant inopiné et hors de toute réalité, auquel elle repensait encore la nuit. Si cette affaire aurait déjà fait polémique si dévoilée à tous, que dire d'une aventure avec un noble lambda de la cour ? Non, aucun excès de pochardise ne la mènerait aux draps avec lui, quand bien même osait-il poser rotule au sol et lui reconnaître autre chose que son statut de captive. Une considération appréciable, et savoir qu'elle l'avait gagnée avait quelque chose de gratifiant, voilà qu'elle se surprenait à en glaner une certaine forme de fierté.

« Puissent les dieux vous entendre monseigneur. » Répondit-elle simplement, les lippes enjolivées d'une risette sobre mais ébaudie, tandis qu'elle prenait connaissance des types d'oeillades qui s'étaient tournées en leur direction. Nul doute que l'on en parlerait, de cette scène que d'aucuns jugeraient inappropriée, et si la notoriété du sieur n'était pas déjà controversée, il était plausible qu'elle le devienne dans les lunes à venir. Cependant, là n'était pas la préoccupation de la jouvencelle, qui estimait à juste titre que le Strider devait assumer les risques et conséquences de ses actions. N'était-il pas un grand garçon ? « Tout semble prétexte à la fête avec vous... ou peut-être est-ce contextuel. » La renaissance du printemps était propice aux réjouissances et aux débordements, ce n'était pas nouveau. Sensiblement engourdie par le vin qui, il lui semblait, fluait doucement dans ses veinures, l'Ebonhand se massa la tempe tout en prêtant une ouïe distraite aux propos du dignitaire... jusqu'à ce que celui-ci soulève un point particulièrement sensible et qui la fit instantanément blêmir. Un soubresaut de frayeur lui retourna les viscères et elle eut le réflexe d'asséner une claque sur la main libre de l'individu. « Silence, je vous prie ! » Feula la belle entre ses dents serrées, puis elle fit un bref tour d'horizon et s'assura que les gardes ne laissaient pas traîner des oreilles trop aux aguets, avant de s'incliner vers lui et de reprendre sur le ton de la confidence. « Etes-vous complètement fou ? A t-on idée d'évoquer tel sujet en ces lieux ? C'est sur l'échafaud que vous désirez finir la Grande Mascarade ? Non pas qu'il m'en coûte de parler de cela, mais si quelqu'un nous entend, la suspicion de conspiration vous créera de gros ennuis. Vous me serinez à propos de matoiserie sociale et autres simagrées depuis les prémices de notre tête-à-tête alors que vous jouez constamment avec le feu, ce n'est fort pas malin de votre part ! Et ne me répondait pas que je suis outrageusement docile ou bienséante, je n'ai juste pas envie de vous conduire à votre perte, j'aimerais éviter les dommages collatéraux tant que je le peux. » Elle fronça les sourcils, lui faisant cette fois comprendre qu'elle ne badinait pas, pas plus qu'elle n'avait l'intention de poursuivre ce pan de conversation. Elle se redressa ensuite, avisa les regards soupçonneux de ses roquets, et feignit à voix plus haute. « Donc, cessez vos suggestions grivoises, je suis une lady et princesse de surcroît ! » Une déclaration destinée à tromper les factionnaires et tous ceux qui les entouraient, mieux valait qu'ils pensent qu'ils traitaient de sexe plutôt que d'évasion.

Suite à cela, un long moment s'écoula, durant lequel la discussion se fit plus animée et... enivrée. Les pommettes empourprées, les mirettes scintillantes et le sourire niais, Jora s'était faite prendre au jeu du Sycophante et en avait omis jusqu'à l'âcreté de la boisson qui n'avait cessé de remplir sa coupe. Et justement, ce fut presque désespérée qu'elle constata que plus une goutte ne demeurait dans son verre, ce à quoi elle pallia en y versant le reste d'une seconde carafe qu'elle avait, étonnamment, vidée à elle toute seule. « Je vous assure ! Je chante comme... une véritable casserole, mes préceptrices ont abandonné tout espoir de m'apprendre ! » Elle s'esclaffa sans pondération, et dans un automatisme terrifiant, lampa sa boisson avant de se lever. « Par contre, je danse, très bien... trèèèès bien ! » Elle fit quelques pas et chancela dangereusement, contraint de se rattraper au Strider pour ne pas lamentablement s'étaler.