Portant sa main tremblante vers le couvercle de bois du coffret, il l’ouvrit d’une simple pression vers le haut, alors que la poussière s'envolait, après de nombreuses vies enfermé. À l’intérieur, reposant sur un coussin de velours, une couronne de pampres reflétait la lumière du soir qui s’infiltrait laborieusement dans la salle sobrement éclairée. Caressant du bout des doigts l'artefact, l’elfe, ferma les yeux, occultant sa vision et se projetant dans l’univers des rêves, des visions, de l’inconscience, des mirages qui étaient les siens.

La neige, teintée de sang, tombant et virevoltant à travers l’azur, poussée par l’aquilon, entourant le monde d’une caresse froide, destructrice. Au sol, les morts rampaient, le vermeille recouvrant le sol, alors que les ombres du passé volaient, volaient, dans sa direction, menée par l’homme qui lui avait donné la vie.

Tremblant, frémissant, il autorisa la lumière à pénétrer ses iris afin de chasser les songeries qui formaient son quotidien, son éternel fardeau. Dans le creux de sa paume, gondolée, rougie par les ans et par les vies qui lui avaient été consacrées, une carte, pourtant absente auparavant, fardait sa peau d’un éclat écarlate. Une simple figure y était dessinée, à peine perceptible à l’œil nu, noyée sous les fluides qui gavèrent les fibres du papier à mesure que les consciences s’y perdaient. Le Bateleur. Jadis symbole du pouvoir et de la direction de la Geste, sa grandeur avait été perdue, oubliée, le Mat prenant peu à peu l’ascendance et profitant de son rôle particulier pour influer, légiférer, ordonner, avec l’autorité du maître… Maître dont l’identité était secrète.  

Dans une main, le pouvoir, l’autorité, les mirages, l’émerveillement…  et dans l’autre, le secret, le mystère, l’inconsistance. Deux atouts, deux entités, entre les mains d’un seul individu, qui, si sot, si arrogant, pensait pouvoir les contrôler. L’esprit de celui dont l’ambition avait été le moteur, la cause, se divisait alors, se fractionnant, se déchirant, dans une lutte entre les deux natures qui tentaient de prendre l’ascendance sur sa propre conscience.

Ramené à la vie par le son des cors, l’écho des tambours meurtriers, l’elfe demeurait seul, vulnérable, dans les profondeurs d’Ibenholt, caché, alors que les hommes massacraient ses cousins, brisant la vie et l’existence même d’une dynastie à la chute si soudaine, si précipitée. Une dynastie méprisée par ses frères, par ses sœurs, par sa maîtresse de circonstance, Nelrethenys, pour laquelle il avait espionné, brouillé, manœuvré, durant près de deux siècles… L’Échanson, ils l’appelaient, le réclamant pour obtenir ce nectar dont ils étaient si dépendants, alors que lui, Œil de la Reine, grappillait et manipulait ses prétendus supérieurs afin d’aider celle-ci, ou encore pour son bénéfice personnel. Oui… L’homme de confiance de Kalanar, son serviteur le plus fidèle, le plus proche.

Tant de mensonges, tant de fumée projetée pour cacher son véritable camp, sa véritable nature, qui avait été enterrée le jour du meurtre de son géniteur. Il avait été un espion compétent, un échanson zélé, un courtisan enthousiaste. Mais il était beaucoup plus, il l’avait prouvé, tandis que l’empire des elfes nordiques s’effondrait et que l'emprise des hommes s'affermissait.

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Alors que les grands de Middholt se glorifient de leur puissance, de leur influence, d’autre jouent un rôle bien plus subtil, vicieux. Confident fidèle des seigneurs du trône de Jais, espion zélé de la reine des Elfes, voilà deux rôles remplis à la perfection par celui dont la voix ensorcelle, calme, apaise, alors que dans son cœur, dans sa folie, il demeure le véritable maître de l’Amarante. Des grandes salles de l’Automne aux blizzards de l’Hiver, en passant par les profondeurs des montagnes, les rumeurs des complots de la Geste résonnent tels des échos indistinct, impossibles à comprendre ni à appréhender, mais pourtant bien présents, alors que lui, les mains tachées par la mort de son père, le destin de multiples existences sur la conscience, planifie et avance ses pions en l’attente de son heure. Profitant du chaos, se jouant de ses ennemis qui ignorent son existence, s’imaginant avoir obtenu son allégeance, Lillandlian patiente, alors qu’il corrompt d’un nectar abrutissant le sang, les sens, de ceux qui ne soupçonnent en rien sa duplicité.

Félicitations, très cher pion, et bienvenue sur l'échiquier de Frostfall. Gare à toi, parce qu'ici, la félonie est un plat qu'on sert à toutes les sauces...

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Sur ce, nous te souhaitons bon jeu sur Frostfall et espérons que la Fatalité te sera favorable !